Interview de MG Buffet paru dans Libération du 16 06 05

jeudi 16 juin 2005
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Marie-George Buffet, secrétaire nationale du PCF, après la victoire du non :
« Faire gagner une gauche qui cette fois-ci colle à son peuple »

Par Pascal VIROT

jeudi 16 juin 2005 (Liberation - 06:00)

Depuis la victoire du non le 29 mai, une fracture s’est creusée à gauche entre un camp réformiste emmené par le PS de François Hollande et un autre, résolument « antilibéral », que le PCF voudrait fédérer. La secrétaire nationale du Parti communiste, Marie-George Buffet, évoque les moyens d’entretenir la dynamique du non de gauche dans la perspective des élections présidentielle et législatives de 2007. Et précise qu’elle pourrait bien être la candidate du PCF à l’Elysée. Entretien.

Après le référendum, que dites-vous au patron du PS, François Hollande ?

Il faut que le PS comprenne ce qui est en train de se passer dans la société et à gauche. Malgré son engagement pour le oui et l’armada médiatique, il y a quand même eu une majorité du peuple de gauche et de l’électorat socialiste qui a dit non. Il doit entendre cette contestation de l’ordre libéral. La réponse ne peut donc être le repli dans un quelconque social-libéralisme, ni de continuer comme avant. Sinon, il n’y aura jamais de véritable alternative. La gauche risque d’échouer si elle ne répond pas aux attentes populaires.

Pour l’heure, la direction du PS s’est surtout préoccupée du sort de Laurent Fabius...

Je n’ai pas à me mêler de cela. Elle a décidé la tenue d’un congrès, c’est le débat des socialistes. Mais je dis que toute la gauche, dans toutes ses sensibilités, doit travailler ensemble. Il ne peut y avoir de leadership de pouvoir.

N’êtes-vous pas en train de constater une fracture irréductible avec le PS ?

Non. Je ne mets pas de limite au rassemblement qui s’est dessiné lors de la campagne référendaire. Je ne dresse pas de murs. D’ici les élections de 2007, cela peut encore bouger à gauche. La dynamique peut grandir. Toute la gauche peut se rassembler sur une base antilibérale. Y arrivera-t-on avant les prochaines échéances ? Cela dépendra de la dynamique sociale et politique engagée qui va se poursuivre.

Mais vous en connaissez les obstacles...

Oui, on aura sans doute des difficultés si l’aboutissement du congrès du PS est la réaffirmation d’une ligne sociale-libérale. Mais si on veut gagner sur une politique de transformation sociale, toute la gauche doit être rassemblée, y compris le PS. On travaillera avec lui et les hommes et les femmes qui lui font référence.

D’ici là, comment espérez-vous prolonger la dynamique de la campagne du non dans l’optique de 2007 ?

Un des enseignements de la campagne, c’est que nous l’avons menée avec toutes les forces qui ont milité pour le non, sur la base d’analyses et d’objectifs clairs : d’abord, on a jugé que le traité européen nous enfermait dans un carcan libéral, et donc qu’il fallait le rejeter. Après, chacun, avec son approche différente, est allé à la bataille. Mais nous avons su travailler ensemble. Aujourd’hui, il faut qu’il y ait à gauche le rassemblement le plus large possible qui permette de faire gagner ce que nous appelons l’union populaire pour changer la vie, c’est-à-dire faire gagner une gauche qui, cette fois-ci, colle à son peuple, soit audacieuse, courageuse, et porte un projet de transformation sociale en rupture avec le libéralisme.

Comment faire ?

La gauche a bougé durant cette campagne. Toutes les forces de gauche ont été traversées par des débats profonds sur le thème : faut-il renoncer ou faut-il résister pour changer ? Poursuivons ce débat. Je ne désespère pas. La décision de la direction des Verts de manifester aujourd’hui (lire en pages Evénement) pour que le vote du 29 mai soit entendu au sommet européen de Bruxelles est importante car cela veut dire qu’elle prend en compte ce qui s’est passé. Poursuivre le débat ne veut pas dire que toute la vie politique passerait par les collectifs du non. Chacun a ses responsabilités, celles des partis politiques sont différentes de celles des associations ou des syndicats. Tout ne se mélange pas. Mais il faut pouvoir coélaborer une alternative programmatique.

Le PCF aura donc son projet pour 2007 ?

Bien sûr, nous mettrons en débat nos idées et nos propositions. Certains comités du non voudront sans doute continuer et rebondir vers cette coélaboration. Mais ce mouvement s’adresse aussi aux partisans du oui de gauche à la Constitution. Il faut sortir de l’idée qu’on ne construira pas une réponse forte sans tous les hommes et les femmes de gauche. Quand j’entends des dirigeants socialistes dire : « On va élaborer notre projet et après on dira aux autres forces de venir l’amender et puis on présentera tout ça à notre peuple », je dis que c’est l’échec assuré. On va droit dans le mur.

Y aura-t-il un candidat communiste à l’Elysée ?

Nous avons convoqué notre congrès pour la fin mars 2006. L’ordre du jour comportera la candidature à l’élection présidentielle. Il y aura une candidature communiste en 2007. D’autant plus que le PCF regagne, pas à pas, une utilité, un rôle à gauche. Je crois que cette candidature sera très utile au débat et au rassemblement de la gauche.

Vous pourriez être sa candidate ?

Nous n’en sommes vraiment pas encore là, mais pourquoi pas ?


A tout le moins un entretien qui mérite débat...

Y a-t-il une fracture irréductible à gauche ?

La gauche anticapitaliste ne peut elle pas se (re)constituer à partir des comités qui ont mené bataille pour le NON et former le socle de l’alternative ?

Le PS peut-il faire partie de cette « base antilibérale » ?

« On travaillera avec lui » est ce bien l’avis de ceux et celles qui ont gagné le 29 ?

A vous la parole...



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