La carotte ou le bâton

mercredi 15 juin 2005
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Le mouvement Kefaya (« Ça suffit » ), qui rassemble les diverses tendances de l’opposition au régime égyptien, réclame le respect des droits de l’homme, le pluralisme politique, la liberté d’expression et de la presse, dénonce tout aussi vivement, et avec des termes plus radicaux encore, cet « allié de l’ennemi américain » que représente, à ses yeux, le président Hosni Moubarak.

En pratiquant une politique d’ouverture avec Israël, Hosni Moubarak s’est forgé une image respectable en Occident. Celle d’un homme plus ouvert et plus moderne. Il est parvenu à conserver un rôle d’interlocuteur privilégié de Washington dans le conflit israélo-palestinien et dans les affaires du Moyen-Orient en général. En retour, il a bénéficié d’une importante aide financière américaine.

L’accord de coopération économique israélo-égyptien signé en décembre 2004, le retour d’un ambassadeur égyptien à Tel-Aviv après quatre ans d’absence, la visite en Israël d’Ahmed Aboul-Gheith, le ministre égyptien des affaires étrangères, suivie de celle de son homologue israélien, Sylvan Shalom, au Caire, sont autant d’aboutissements récents de cette politique.

Mais, en Egypte, la politique extérieure de Moubarak soulève la colère et la désapprobation. Elle a contribué à creuser le fossé entre le régime et la population, qui ne s’y reconnaît pas. Au fil des années, la« rue » égyptienne est devenue de plus en plus hostile aux Etats-Unis et à Israël, ces deux pays étant indissociables dans les esprits.

Ce sentiment se retrouve dans cette réflexion que Rifaat Al-Saïd, dirigeant du Tagammou ( Parti du rassemblement, d’obédience marxiste ), affirme avoir faite à un diplomate américain : « Nous ne serons jamais amis. Les Américains ne savent pas se faire des amis. Ils n’ont que des ennemis ou des agents. »

Le nom de Gamal Abdel Nasser demeure un symbole rassembleur. Trente-cinq ans après sa mort, l’ancien Raïs reste une figure aimée car il continue à incarner la « fierté » des Egyptiens et, au-delà, celle des peuples arabes. Une « fierté » dont beaucoup, en Egypte, estiment qu’elle a été « piétinée » par la politique américaine au Moyen-Orient.

Deux dates sont généralement citées par les Cairotes pour établir la comparaison entre « la grandeur » de l’Egypte d’hier et « l’honneur perdu » de l’Egypte d’aujourd’hui. En 1956, Nasser défiait les deux grandes puissances étrangères de l’époque, la France et l’Angleterre, en nationalisant le canal de Suez. En 1991, Hosni Moubarak envoyait ses troupes aux côtés des Etats-Unis pour attaquer l’Irak. Aujourd’hui, concluent ces Egyptiens, la « politique américaine du dollar » sert de carotte ou de bâton pour manipuler un gouvernement qui a désormais perdu toute crédibilité.

Dans ce pays mené par un gouvernement allié de longue date de Washington, l’opposition égyptienne souhaite plus de liberté et de démocratie mais selon sa propre conception : en harmonisant davantage les opinions du peuple et la politique de ceux qui le gouvernent. Des élections libres en Egypte laisseraient peu de chances à un parti favorable à l’Amérique.

Trouvé sur le site aloufok.net



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