Les victoires chtis

mercredi 7 février 2007
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Ils ont donc gagné les 117 dockers intermittents victimes de l’amiante !

Au 24° jour de grève de la faim de 6 d’entre eux, [1] l’assemblée générale a voté l’acceptation du compromis samedi matin 3 février.

Ils en ont pourtant connu des manoeuvres pour leur faire lâcher prise et ce jusqu’à la veille de l’accord : mais ils n’ont pas cédé. Le texte proposé la veille comportait des blancs d’autant plus inacceptables que chacun avait en tête ici le protocole d’accord signé par le directeur de cabinet du médiateur de la République à l’issue de la grève de la faim de mai 2005, piétiné , l’encre à peine sèche, par les services de l’Etat

Les "calculettes" ont donc tourné vendredi et samedi, l’AG a eu les "blancs comblés".

Certes ce n’est pas la victoire totale, mais c’est un succès incontestable.
La grève de la faim des six camarades, porteurs de la revendication commune, a donc pris fin.
Ce succès a vu le jour avec l’aide de tous les soutiens qui se sont mobilisés autour des ex-dockers victimes de l’amiante. Si les dockers ne peuvent les citer tous ils ont tenu à remercier en particulier les Sans Papiers du CSP59.

De quoi s’agissait-il ?

Il faut remonter à mai 1992 pour comprendre le conflit. Le gouvernement de l’époque met un terme au statut d’intermittent des ouvriers dockers organisé par la loi de 1947. Dans l’ensemble des ports français, la corporation se bat pour garder son statut. A Dunkerque, la puissante Chambre syndicale des ouvriers du port mène sa dernière bataille. En vain. Le port de Dunkerque se targuera d’être le premier à appliquer la réforme. Une page se tourne.

Les 200 dockers qui refusent le nouveau régime quittent la profession et obtiennent des indemnités. Mais dans le patronat portuaire la vengeance est un plat que l’on mange aussi quand il est froid. Lorsque éclate l’affaire de l’amiante, quelques années plus tard, c’est l’heure de la dégustation.

Normalement un ensemble de textes prévoit une indemnisation des salariés touchés par ce fléau. Les ex-dockers concernés pensent être indemnisés comme les autres victimes. La circulaire ministérielle du 28 mars 1999, concernant l’activité discontinue qui dit que l’allocation doit être calculée sur les 365 derniers jours travaillés et non sur l’année civile leur donne raison. Mais la caisse de compensation des congés payés de Dunkerque,elle, se base sur un décret du 30 janvier 2001 et fait son calcul sur... les douze derniers mois. Evidemment pour un salarié,cela change tout et s’il est intermittent n’en parlons pas.

Comme l’explique l’Association nationale des victimes de l’amiante (Andeva)le mode de calcul de la caisse de compensation a pour effet d’effacer "les 52 dimanches d’une année". Cela ramène les jours travaillés à 313, et provoque un manque à gagner d’environ 200 euros par mois pour les intéressés. Une paille !

Avec Louis Monteyne (CGT des ports et docks) nombre d’élus et d’associations de la région sont persuadés que ses camarades et lui sont aujourd’hui "victimes d’un règlement de comptes". [2]

Une Stèle sinon rien

Si tout le monde est d’accord de pleurer sur le sort des vitimes, les responsables et coupables peinent à reconnaître leurs responsabilités et traînent des pieds dès qu’il s’agit de reconnaitre la réalité des faits ou d’indemniser les victimes de ce qui restera comme l’un des plus grands scandales du travail. Ainsi comment ne pas avoir un sentiment de révolte quand devant 500 personnes, dont de nombreuses veuves de l’amiante et des malades exposés pendant des années a été inaugurée le dimanche 17 décembre 2006 à Dunkerque une stèle à la mémoire des victimes de l’amiante, portant l’inscription : "nous avons travaillé pour gagner notre vie, pas pour la perdre. Ayons une pensée pour toutes les victimes de l’amiante".

Pour les stèles, les inaugurations, les cérémonies pompeuses en face ils sont forts, pour l’argent aussi ! Cela fait penser au cortège d’hypocrites devant la dépouille mortelle de l’abbé Pierre de ceux qui sont coupables du mal logement

Lors de cette cérémonie Pierre Pluta, président de l’association régionale de défense des victimes de l’amiante, a rappelé que dans les vingt prochaines années quelque 100 000 morts de l’amiante sont programmées.

Et pendant ce temps nos anciens dockers dunkerquois, victimes de l’amiante, attendent le re-calcul de leurs pensions.

Pendant ce temps aussi les salariés et anciens salariés de l’usine Ascométal de Lefrinckoucke près de Dunkerque, demandent en vain que leur usine soit reconnue comme site amianté. Si un désamiantage est en cours depuis plusieurs années, la reconnaissance officielle fait défaut.L’Advasud (association de défense des victimes de l’amiante de l’usine des Dunes) et l’union locale Cgt dénoncent cette situation, qui prive quelques 320 salariés (sur 800 personnes employés dans cette usine) touchés par l’amiante du droit à une préretraite, et les oblige à continuer à travailler bien que malades

Que dit l’accord du 1er février ?

Les dockers ont obtenu pour 117 d’entre eux, l’engagement écrit de la
révision du calcul de leur allocation avec effet rétroactif sur 5 ans. Pour ceux qui
étaient les plus pénalisés par le mode de calcul antérieur, cela se traduira par des
augmentations de 250 à 300 euros par mois

Par ailleurs les dockers ayant saisi le tribunal des affaires de la sécurité sociale (Tass) celui-ci devait se prononcer le 5 décembre. Après un deux reports dus à la CRAM [3] le procès aura néanmoins lieu : RDV donc le 15 février devant le tribunal d’instance de Lille, Av du Peuple Belge pour soutenir les camarades dans leur lutte.

Un bonheur ne venant jamais seul on apprenait le même jour
que les conducteurs des transports urbains de Maubeuge (SEMITIB) en lutte depuis trois semaines contre la mise en cause de leurs conditions de travail et en particulier leur grille horaire ont eu gain de cause.
Après l’injonction faite à la direction par le tribunal d’Avesnes de
respecter l’accord de juin 2004, les négociations d’hier ont permis la signature d’un
accord de fin de conflit avec retour aux anciennes grilles horaires.

Comme le dit la CGT :
« Dans les deux cas, on ne peut que constater l’irresponsabilité des employeurs,
patronat portuaire d’un côté, présidence et direction de la SEMITIB de l’autre. Ils ont
sciemment laissé traîner en longueur ces conflits pendant plus de trois semaines, en
espérant ainsi briser la résistance des salariés concernés et les solidarités créées
entre eux et autour d’eux. Ils en espéraient le pourrissement et le rejet par la
population des formes d’action décidées par ces salariés...Ces deux victoires surviennent après le succès remporté par les salariés de Québécor
qui, refusant la perspective de fermeture de leur site à Hellemmes, ont maintenu leur
mobilisation pendant de longues semaines tout en travaillant à des solutions
alternatives, pour en définitive obtenir d’un repreneur le maintien d’activités et d’une
centaine d’emplois.
 »

Dans le Nord le printemps des victoires est en avance...et ce n’est pas du au réchauffement climatique...

Rouge Midi d’après des infos transmises par Patrick Bardet


[1âgés de 58 à 60 ans, ils s’étaient installés dans l’église Saint-Eloi de Dunkerque (Nord). Malades de l’amiante, ces anciens dockers observaient une grève de la faim depuis le 11 janvier

[2Précisions : le « médiateur », nommé pour ce conflit Bruno Vergobbi, est l’ex-directeur du port autonome de Dunkerque. Entre autres exploits, c’est lui qui a mis fin au statut des dockers et réduit les effectifs en 1992 (100 jours de grève très dure, il garde une haine tenance envers la CGT).

Bruno Vergobbi a été aussi directeur de la SNCM (2004-2006), chargé de sa privatisation. Opération dont l’un des premiers bénéficiaires devait être Corsica Ferries qui touche la subvention de continuité territoriale sans en avoir toutes les obligations ( une enquête parlementaire, demandée par la CGT et appuyée par les députés communistes n’a jamais eu lieu) et bafoue le droit du travail français.

Actuellement, Bruno Vergobbi est délégué général de l’Union des ports autonomes et des chambres de commerce et d’Industrie maritimes (Upaccim - Les ports français , dont St Nazaire)

[3Le TASS n’a pas reçu les conclusions du juriste de la caisse régionale d’assurance maladie



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