L’ALBA grandit...

vendredi 9 février 2007
popularité : 4%

Un aspect encore assez peu connu des avancées de la gauche en Amérique latine est l’Alternative bolivarienne pour les Amériques, ou ALBA (qui signifie « aube » en espagnol). Ce projet de régionalisation a été lancé en 14 décembre 2004 à La Havane par les présidents Hugo Chávez et Fidel Castro. L’adhésion de la Bolivie, officialisée le 29 avril 2006 dans la capitale cubaine par la signature de l’accord par le président Evo Morales, élargit l’alliance. Ces trois pays viennent tout récemment d’être rejoints, le 11 janvier 2007, par le Nicaragua du Président Daniel Ortega.

L’ALBA est plus qu’une contre-attaque réussie face à l’ALCA, la Zone de Libre-Échange des Amériques, ce projet de régionalisation sponsorisé par les Etats-Unis de George W. Bush. Elle permet surtout aux pays les plus radicaux du continent de passer à l’offensive, en mettant en Å“uvre une alternative aux régionalisations conçues comme des courroies de transmission de la mondialisation néo-libérale.

L’ALCA entendait établir entre les pays d’Amérique -à l’exception de Cuba- une zone de libre-échange, dont l’objectif est de libéraliser la circulation des capitaux et des marchandises et fournir un cadre légal au pillage impérialiste du continent par les transnationales. Il s’agissait du volet économique de la stratégie globale de réorganisation de l’hégémonie des États-Unis sur le système mondial, où le contrôle de l’hémisphère occidental est primordial.

L’ALBA est tout le contraire : une régionalisation destinée à renforcer l’autonomie des peuples d’Amérique latine et à contribuer à la construction d’un monde multipolaire. Elle est porteuse de très profondes transformations à l’échelle du continent, en jetant les bases d’une forme nouvelle d’intégration, fondée non pas sur les valeurs capitalistes de profit et de pillage par les transnationales, mais sur celles de solidarité, de coopération et de complémentarité.

La promotion d’un développement placé au service des peuples, grâce à la diversification économique, à la conquête de la souveraineté alimentaire et à l’essor des secteurs sociaux de santé et d’éducation, vise à améliorer les conditions de vie des plus pauvres et à construire une aire débarrassée de ses maux actuels (misère, malnutrition, analphabétisme, chômage...). Cela implique nécessairement le dépassement du capitalisme.

Ajouté à ceci, les négociations continuent d’avancer pour intégrer en une seule entreprise continentalisée, PétroAmérica, les activités des compagnies pétrolières publiques de la région, en particulier celles du Venezuela, de Cuba, de Bolivie, l’Équateur, du Brésil et d’Argentine. Dans le domaine des médias, le lancement de Telesur, chaîne de télévision par satellite créée le 24 juillet 2005 et associant le Venezuela, l’Argentine, l’Uruguay et Cuba, a permis de rompre le monopole états-unien et de donner accès à des informations alternatives.

La voie est ouverte pour la constitution d’un bloc régional susceptible de faire contrepoids à l’hégémonie états-unienne, en faisant respecter le droit à l’auto-détermination des États-nations signataires. Comment ne pas concevoir cette intégration comme l’un des vecteurs de la transition au socialisme du XXIe siècle ?

Rémy HERRERA
est chercheur au CNRS



Commentaires

Sites favoris


20 sites référencés dans ce secteur