Sida, santé et mondialisation

vendredi 12 août 2005
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Le 9 août s’est tenu dans notre local une assemblée sur ce thème. Dominique Blanc qui revenait de Rio où s’est déroulée la 3e conférence internationale de l’IAS (Société Internationale sur le Sida) a animé cette réunion. Impossible de faire un compte rendu in extenso de cette initiative sans doute à prolonger à l’automne en particulier dans la perspective du prochain congrès de l’OMC, néanmoins ci-après le texte introductif riche d’enseignements sur un sujet dont on sait beaucoup moins de choses que ce que l’on croit.

INTRO

L’épidémie est au sud (voir carte en document joint), les médicaments (accès étendu et gratuité), le suivi, les soins et la prise en charge sociale sont au nord....

En France, environ 80% des personnes sont suivies et traitées si besoin

Au sud, malgré le programme 3X5 des nations unies et de l’OMS, environ 1 million de personnes est traité !

CONSEQUENCES :

Morts (3 M par an), maladie, perte de la force vive des travailleurs du sud a conduit à un recul dans l’espérance de vie (de 10 à 15 ans selon les pays) et à un recul du développement (peut-être jusqu’à 40 ans selon la banque mondiale dans certains pays), augmentation croissante du nombre d’orphelins abandonnés à eux-mêmes (grands parents, enfants chefs de famille, hordes d’enfants des rues...)

POURQUOI ????

*Manque de prise en compte des pays du sud de leur épidémie (exceptions : Brésil, Thaïlande, Ouganda, Botswana, Inde, Cuba)

*Focalisation exclusive pendant des années sur la prévention (programme ABC) et maintenant manque d’accès coordonné à la prévention et aux soins

*Négation de la possibilité de mettre en place une prise en charge des personnes touchées au sud : problèmes de développement et de priorité, d’infrastructures, de ressources humaines, de financements.

*Manque de coordination des programmes, anarchie, rivalité, corruption, détournement...

*Effondrement du nombre de soignants dans les pays touchés

*Négation des droits humains dans de nombreux pays, particulièrement droit des femmes, persécution et exclusion des Usagers de drogues, des homosexuels, des travailleurs du sexe, ségrégation des personnes touchées ;

*Faiblesse de la solidarité internationale (annulation de la dette, financement des pays riches), fausses annonces...

*Manque d’engagement politique sérieux de la communauté internationale jusqu’à 2001, (création du fonds mondial) malgré l’existence de l’ONUSIDA depuis 1996 et c’est seulement au dernier sommet du G8 à « Glen Eagles » en 2005 qu’un communiqué a été signé sur l’accès universel au traitement en 2010 ( c’est à dire traiter au moins 10 M de gens)

*Effroyable forcing du lobby pharmaceutique international, et plus précisément étatsunien, au travers de l’OMC pour empêcher dans un premier temps la baisse des prix des médicaments, puis la fabrication de génériques par les pays du sud, puis la vente des pays génériqueurs de médicaments à des pays du sud tiers

Mondialisme libéral et négation des droits humains font le lit de l’épidémie et de ses morts.

EXPOSE

Le nombre de personnes VIH+ a doublé dans le monde en 10 ans (de 20 à 40 millions)
Fin 2004 : 40 millions dont 5 millions infectés dans l’année, 3 millions de morts, plus de 2 millions d’enfants infectés...

Rio 2005 du 24 au 27 juillet, conférence organisée par l’IAS.

Il s’agit d’une conférence qui se tient tous les 2 ans et qui aborde des problèmes scientifiques, médicaux, politiques et sociaux liés à l’épidémie de VIH dans le monde.
Plus de 5000 participants de plus de 100 pays différents. Plus de 3000 résumés de travaux ont été envoyés à la conférence, avec une très forte participation des pays du sud, particulièrement du Brésil !

Le Brésil, modèle pour les pays du sud

 :

Non seulement le Brésil était le pays organisateur, mais de plus il est un modèle pour la prise en charge du VIH. Les traitements y sont disponibles depuis qu’ils existent, la prise en charge globale est la règle incluant suivi, traitement et prévention, et tout ceci gratuitement. Comme le rappelait le ministre de la santé, Saraiva Felipe, le droit à la santé est inscrit dans la constitution brésilienne, et ceci s’est concrètement traduit dans la prise en charge des personnes séropositives ; si certaines inégalités de territoire perdurent aujourd’hui devant l’accès aux soins, pour rappel, cela est aussi le cas en France, un des meilleurs pays de prise en charge du VIH !

Le Brésil est aussi exemplaire dans sa réponse aux grandes compagnies pharmaceutiques du nord : son budget ne lui permettant pas d’acheter les médicaments au prix forts de ces firmes, il est devenu un des grands pays producteurs de génériques pour les anti-VIH. Ceci est un droit international de santé publique, n’empêche qu’il est évidemment contesté par l’industrie pharmaceutique. Le Brésil tient bon, mais il a besoin de soutien...
Enfin, le Brésil entretient des relations en réseau avec de nombreux pays du sud, et offre un soutien technique à ceux qui le souhaitent

Zéro pointé à la politique de santé publique en Eurasie

Alors qu’en France il n’y a pratiquement pas de nouveaux cas de VIH chez les UD (usagers de drogues) injecteurs, dans d’autres parties du monde l’épidémie explose sur les chemins de trafic des opiacés...Seulement 10% des injecteurs dans cette région du monde ont accès à du matériel d’injection adapté ; de plus, la méthadone (produit de substitution des opiacés) est encore illégale dans de nombreux pays, et la politique de répression de l’usage ainsi que l’exclusion des injecteurs des programmes d’accès aux anti-rétroviraux sont responsables de l’expansion dramatique de l’épidémie.

La répression augmente le risque de propagation de l’épidémie puisqu’en étant incarcéré, on a 10 x plus de risque de contracter le VIH dans ces pays !

Le programme 3X5 des nations unies visaient à mettre sous traitement anti-VIH 3 millions de personnes au sud fin 2005 : un peu plus d’un million y seront. Succès relatif donc, avec néanmoins des aspects très positifs : évidence de la possibilité de soigner au sud, de l’adhésion de la population, de la coordination des soins, prise de conscience des gouvernements, mobilisation de la communauté internationale, baisse des prix des médicaments de marque depuis 2000...

Mais, tant que les règles de l’OMC ne seront pas en faveur des pays du sud et permettent clairement la fabrication de génériques par l’ensemble des pays les plus avancés du sud (Brésil, Inde, Thaïlande, Afrique du sud, Chine....) et la vente de ces produits aux pays moins avancés à des prix très bas, le but du traitement pour tous ceux qui en ont besoin restera un mythe.

L’interdiction de la vente entre pays du sud prive ceux qui en ont le plus besoin et vise à limiter la capacité de production des grands pays génériqueurs pour éviter leur concurrence.

Des solutions existent

- L’urgence mondiale de santé publique doit faire sauter les lois de l’OMC sur la propriété intellectuelle et les brevets n(ADPIC-TRIPS)

- Capacité démontrée des pays génériqueurs à fabriquer des produits de qualité ET en quantité

- Les essais cliniques doivent être menés pour démontrer la bio-équivalence des génériques, condition pour être inscrit comme médicament essentiel par l’OMS

- Vente sud-sud aisément traçable

- « manque à gagner » des compagnies pharmaceutiques qui empêche leur investissement en RD si le sud achète surtout des génériques un mensonge éhonté

- moins de 7% du chiffre dans les pays du sud, 1.3% en Afrique

- refuse d’investir dans les maladies exclusives au sud comme le palu (preuve que d’elles-mêmes, les firmes considèrent que le marché du sud n’est pas rentable...)

- industrie pharma la plus rentable du monde sur 12 années consécutives (>40% de retour sur investissement, secteur bancaire, 2e avec « seulement » 16%)

- investit en fait seulement 1/4 en Recherche Développement et 3/4 en marketing

- fait la pluie et le beau temps aux US (et par voie de conséquences sur l’OMC) car a massivement soutenu la campagne de Bush

Besoin de réaction FORTE de la communauté internationale (143 pays se laissent mener par UN)

Besoin de compagnies pharmaceutiques de génériques nationalisées comme c’est le cas au Brésil.



Documents joints

carte mondiale du sida
Article du Nouvel obs sur ce sujet

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