Fol est qui se fie à l’éthanol.

dimanche 7 octobre 2007
popularité : 4%

Les biocarburants, c’est de l’écologie pur jus, non ?
Pourtant, ils viennent d’être purement et simplement évacués du Grenelle de l’environnement. Pourquoi ?
Il y a du gaz dans le pétole vert ?

SOUVENEZ-VOUS, voilà tout juste un an le ministre Breton inaugurait une pompe de bioéthanol devant les caméras.

Une belle rigolade, puisque cette pompe était bidon, comme l’avait raconté « Le Canard » (18/10/06).

Mais c’était pour le symbole...

Une fois encore, la France montrait l’exemple : dans trois ans, promis-juré, 10% du carburant utilisé chez nous serait d’origine verte.

On allait couvrir la France de champs de colza, de tournesol, de maïs, etc.

Deux millions d’hectares, pas moins !

Ca, c’est du volontarisme...

Et voilà qu’aujourd’hui le groupe de travail n°4 du Grenelle, après avoir planché sur la question, décide de l’évacuer : constatant « un large désaccord quant à l’appréciation du bilan écologique » des biocarburants, il préconise la réalisation d’une étude par l’Ademe sous dix-huit mois.

En clair, il est urgent d’attendre...

D’attendre, ou de tout stopper ?

De plus en plus nombreuses sont les voix qui s’élèvent -chez les écolos, notamment - pour critiquer les biocarburants.

Voici leurs six principaux arguments.

— -1 Lobby

Ce n’est pas pour de nobles raisons environnementales que les biocarburants, connus depuis plus d’un siècle, sont devenus subitement à la mode.

En 1992, l’Europe, en pleine crise de surproduction, ne sait plus ou écouler ses surplus (lait, beurre, blé, huile de colza), et met 15% de ses terres agricoles en jachère.

Les grands céréaliers trouvent la parade : et si on fabriquait du carburant à partir d’huile de colza ?

Dès l’année suivante Renault et Elf entrent en piste, et même l’immense Alain Prost : pour frapper les esprits, un prototype de monoplace diesel roulant au Diester voit le jour.

Et les grands discours sur les biocarburants qui vont sauver la planète se mettent à pleuvoir.

— -2 Etude.

Les lobbys agricoles s’activent sous l’oeil bienveillant de l’Etat.

Tellement bienveillant que la seule et unique étude officielle sur le bilan énergétique des biocarburants, commandée par l’Ademe, n’a été publiée qu’en septembre 2002.

Comme le raconte le journaliste Fabrice Nicolino dans un livre enflammé (1), cette étude, confiée à une entreprise privée, PwC, spécialiste du conseil aux transnationales, a été réalisée sous la direction d’un comité de pilotage assez curieux.

Selon Patrick Sadones, ingénieur agronome, président d’une association écolo, plus des deux tiers des membres auraient eu partie liée avec l’industrie des biocarburants...

— -3. Polémique.

Or, il y a débat.

Et un débat très animé !

Accablantes, les études se succèdent : d’après le Nobel de chimie Paul Crutzen, les biocarburants sont une catastrophe écologique ((« Le Monde »,25/9) : les engrais industriels azotés nécessaires à leur culture produisent tellement de protoxyde d’azote (N2O) qu’ils réchauffent plus l’atmosphère que le pétrole !

D’après une autre étude, parue cet été dans « Science », le bilan écologique est tellement médiocre qu’il vaudrait mieux faire pousser des arbres que cultiver des céréales pour les bagnoles (Le Monde", 18/8).

Et, de son côté, la très libérale OCDE a pondu, en juin dernier, un rapport lui aussi accablant : non seulement « peu de biocarburants semblent effectivement offrir un apport réel en termes de sauvegarde du climat ou de l’indépendance énergétique », mais ils sont très coûteux et très voraces en subventions.

— -4. Flambée.

Sans compter qu’à peine lancés les biocarburants ont déjà fait exploser les prix mondiaux du maïs, du blé, des céréales, des huiles végétales et par conséquent du lait et de la viande.

Résultat : pour faire rouler les voitures des pays riches, on affame les pays pauvres !

— -5. Jachère.

Adieu jachères : un million d’hectares non cultivés, qui étaient devenus un vrai refuge pour la biodiversité, sont promis à la disparition dès l’année prochaine, toujours pour remplir les réservoirs.

Au moment même ou Grenelle prétend mettre des « programmes stratégiques » pour la biodiversité...

— -6. Amazonie.

L’or vert remplacera l’or noir !

Lula veut faire du Brésil la nouvelle Mecque de l’énergie.

Du coup, la déforestation à grande échelle de la jungle amazonienne (dont on sait l’importance vitale pour le climat mondial) a commencé.

Pour planter industriellement palmiers à huile, canne à sucre et soja, gourmands en engrais et pesticides...

Idem en Indonésie, au Cameroun, au Congo, en Patagonie, etc.

« La bagnole, notre belle bagnole rutilante, va achever ce qui reste des forêts tropicales et des pampas ici et ailleurs », dit Nicolino.

Lequel, soutenu notamment par le WWF, ne voit dans les biocarburants qu’une « mystification totale ».

Après les faucheurs d’OGM, les faucheurs de colza ?

Le Canard enchaîné du 03/10/2007

Transmis par Linsay


(1). « La faim, la bagnole, le blé et nous, une dénonciation des biocarburants », Fayard, 180 p, 17€.



Commentaires

Logo de Vladimir
jeudi 1er novembre 2007 à 19h47 - par  Vladimir
Logo de Vladimir
dimanche 14 octobre 2007 à 15h20 - par  Vladimir
Site web : Energie

Sites favoris


20 sites référencés dans ce secteur