Victoire !

lundi 5 décembre 2005
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Le licenciement de Momo est refusé !!

Rouge Midi : Momo, on vient d’apprendre le refus de ton licenciement par le ministre du travail, que ressens-tu ?

Momo : C’est d’abord un ouf de soulagement ! Et l’envie de dire bravo à tous les camarades qui se sont mobilisés non pas pour mes beaux yeux mais d’abord contre l’injustice. Cela a été une expérience enrichissante, pour tous les militants qui se sont rencontrés sur ce piquet de grève alors que beaucoup ne se connaissaient pas. Justement grâce à cette bataille, il y a eu par la suite des contacts qui ont permis de converger. Des gens de tous bords, même les gens des quartiers avoisinants, qui habitent là depuis toujours, c’est à dire depuis l’ouverture du magasin en 76. Des gens qui ne travaillent pas forcément, qui sont au chômage, se sont sentis solidaires et se sont impliqués dans cette lutte à leur façon. Et c’est surtout à ces gens là que je tire mon chapeau...C’est leur lutte aussi, contre cette multinationale qui ne veut pas les embaucher en prétextant des motifs hasardeux.

La direction de Carrefour a voulu profiter de ce moment qu’elle croyait opportun pour disloquer l’équipe de la CGT, bien au contraire elle nous a rendu service car on a tout de suite compris que la seule issue c’était de rester solidaires, plus que jamais. Notre victoire est d’autant plus grande que nous avons beaucoup appris dans ce conflit. Nous n’oublierons pas dans cette lutte les responsables de notre syndicat, l’UD, l’UL qui nous ont aidé à gérer ce conflit tant au niveau de la stratégie que de la logistique. Cela a aussi pesé et la direction le sait.

Rouge Midi : Et tes collègues de travail que disent ils ?

Momo : Ils disent tout simplement qu’après avoir vécu cette histoire, ils n’en reviennent pas d’avoir fait plier une multinationale. Souvent ils entendaient des cadres du magasin leur dire avec un air provocateur : « c’est pas la peine de vous battre, votre Momo on va le détruire. » Ce qui les a poussé à continuer le combat c’est qu’en dehors de Momo il y avait d’autres militants CGT dans le magasin qui n’ont jamais baissé les bras, de par leur activité syndicale constante. Des visites régulières étaient faites par des dirigeants de la CGT de l’UD et de l’UL. Ils se sont malgré tout aperçu que la définition d’une victoire dans la lutte c’est l’affrontement dans une bataille.

Rouge Midi : Quel souvenir fort gardes-tu ?

Momo : De la prison j’ai suivi ce conflit. J’avais des renseignements par le beau frère d’une caissière qui travaillait à la prison ! La première fois que je suis sorti en promenade j’entendais mon nom à travers les barreaux « Momo mais qu’est ce que tu as fait ? » Les gars qui étaient là m’ont fait passer du linge et de la nourriture, d’instinct ils ont compris que j’avais subi une injustice. A chaque flash d’information à la télé ils se précipitaient et criaient aux barreaux : « Libérez Momo ! ». J’ai eu droit à la douche tous les jours...Je ne me suis jamais senti seul...

Quand il est venu le ministre de la justice à Marseille c’est la première fois que je voyais un tel rassemblement pour un militant. Je me disais « tout ça pour moi ! » j’en avais les larmes aux yeux...
En plus le syndicalisme dans les grandes surfaces ils veulent le tuer dans l’Å“uf et là de simples caissières remuaient tout le département...
A ma sortie de prison je suis directement allé sur le piquet de grève pour leur dire bravo et merci. C’était la moindre des choses. J’ai mesuré l’ampleur...

La direction, elle, n’a pas lâché.

En appel la peine a été confirmée et 3 jours après j’étais convoqué pour mon licenciement : on était 300 dans le magasin !

La direction a du se dire « ils vont pas lâcher » Ils m’ont mis en mise à pied conservatoire et je me suis retrouvé sans salaire alors que je suis père de 3 enfants...Une fois de plus la solidarité a joué et ça m’a permis de tenir...
Dans le même temps la direction m’a proposé 10 000ââ€Å¡¬, puis 50 000ââ€Å¡¬ avec une formation de paysagiste ( ?), puis 180 000 euros avec un reclassement chez un prestataire. J’ai refusé.

Pourquoi ?

Je me disais c’est pas possible que ça finisse comme ça. Tous ces gens qui se sont impliqués je pouvais pas tout lâcher. Ils avaient fait annoncer à l’avance dans le magasin que j’avais accepté l’arrangement. Bien sûr il m’est arrivé de douter, j’étais seul dans ma décision parce que les camarades ne pouvaient pas décider à ma place. Ils me disaient « On n’est pas là pour accompagner quelqu’un dans la tombe, on respectera ta décision quelle qu’elle soit. »

Et puis il y avait tous ces camarades extérieurs au magasin qui pendant des mois ont collé des affiches aux alentours et ont peint sur les ponts et sur les murs des quartiers avoisinants : "Momo : on ne lâchera pas !"

Le gouvernement a certainement eu peur du rapport de forces puisque dans le même temps le même ministre a accepté le licenciement d’une autre déléguée du commerce dans le même département.



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