Regards de juin 2008

mercredi 18 juin 2008
popularité : 3%

Le vote vient d’avoir lieu ce midi au Parlement européen. La proposition de la Commission (légèrement modifiée à la marge) a été adoptée

par 367 voix contre 206 et 109 abstentions.

L’amendement de rejet, déposé par les communistes et les Verts, n’ a obtenu que 114 voix, la grande majorité du groupe socialiste
ayant voté contre ....(sans doute au nom du libéralisme de gauche. NDR..
)

NON A L’EUROPE FORTERESSE XENOPHOBE

Au Conseil européen de Tampere en 1999, sous présidence finlandaise, les Etats membres de l’Union européenne avaient adopté les principes de base d’une politique commune en matière d’immigration avec le soutien du gouvernement français de l’époque. Après avoir soumis au débat des communications, un Livre vert et un programme d’action, la Commission européenne a proposé en septembre 2005 une « directive sur les normes et procédures communes applicables au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ». Comme le souligne l’agence « Europolitique » du 19 mai 2008, cette proposition « s’inscrit dans la droite ligne de l’approche convenue en 1999 à Tampere ».

Cette directive, dite « retour » dans les instances communautaires, a été nommée « directive de la honte » par les associations des droits de l’homme qui se mobilisent pour son retrait (manifestations, pétitions, interventions). Effectivement, cette directive réduit encore les garanties et les protections de personnes ; elle vise à stigmatiser les étrangers assimilés à des délinquants, à empêcher leur accès au territoire européen et à expulser massivement les sans-papiers. Elle prévoit notamment une détention avant expulsion pouvant atteindre dix-huit mois (trente-deux jours actuellement en France) pour des personnes dont le seul délit est d’avoir voulu vivre et travailler en Europe après avoir fui les guerres, la misère ou les catastrophes naturelles. Un accord a été conclu le 5 juin sous présidence slovène entre les 27 au Conseil Justice et Affaires intérieures. Il entérine la durée maximale de détention de dix-huit mois dans des centres fermés, confirme les cinq ans d’interdiction d’entrée sur le territoire européen pour les personnes expulsées, prône le rapatriement des migrants vers des pays de transit (où seraient prévue l’installation de camps) et autorise, sous certaines conditions, la détention et l’expulsion de mineurs non accompagnés.

Cette directive, qui harmonise vers le bas les législations nationales existantes, doit être adoptée par le Parlement européen (procédure de codécision) pour entrer en application en 2010. La discussion et le vote sont prévus à la session plénière du 16 au 19 juin à Strasbourg à partir du rapport du député démocrate-chrétien allemand Manfred Weber qui approuve la directive. Les interventions doivent se multiplier auprès des parlementaires européens pour obtenir son rejet.

Le gouvernement français en pointe

Que ce soit par la voix du ministre des affaires étrangères, Bernard Kouchner, ou du secrétaire d’Etat aux affaires européenne, Jean-Pierre Jouvet, le gouvernement français n’a trouvé rien à redire à la « directive de la honte ». Bien au contraire ! Il vient de soumettre aux autres Etats membres ses propositions pour un « pacte européen sur l’immigration » qui intègre la directive « retour » et vise à « durcir la politique européenne d’immigration » (agence « Europe » du 29 mai). C’est une priorité de Nicolas Sarkozy au cours de la présidence française au deuxième semestre 2008 qui veut obtenir un alignement de l’Union européenne sur sa politique d’expulsions et d’immigration « choisie » en fonction des besoins du patronat. Il préconise notamment : l’obligation de visas biométriques à partir de 2011, le renforcement de l’agence Frontex chargée de coordonner l’action des polices aux frontières, l’interdiction par les Etats de régularisations massives de sans-papiers sans l’autorisation des autres Etats membres, l’imposition d’un contrat d’intégration aux nouveaux arrivants rendant obligatoire l’apprentissage « de la langue nationale, des identités nationales et des valeurs européennes », l’expulsion des migrants en situation irrégulière avec le recours à des « vols de retour conjoints » et la conclusion d’accords de réadmission avec les pays d’origine et de transit pour rendre les mesures d’expulsion plus efficaces. Le ministre de l’immigration et de l’identité nationale, Brice Hortefeux, fait actuellement un tour d’Europe des capitales européennes pour faire avaliser ce « pacte européen » qui serait soumis à la décision du Conseil européen d’octobre 2008.

Quel que soit le résultat obtenu contre la « directive de la honte », la mobilisation soit se poursuivre dans les Etats membres et sur le plan européen pour faire échec aux propositions Sarkozy-Hortefeux de « pacte européen sur l’immigration ».

LA PEUR DU MOUVEMENT SOCIAL

Dans de nombreux pays dans le monde, des révoltes populaires éclatent contre la flambée des prix des produits alimentaires. Ces « émeutes de la faim », souvent violemment réprimées (plus de cent morts au Cameroun), constituent le cri d’alarme des « damnés de la terre » victimes de la spéculation et des plans d’ajustement structurel appliqués au forceps par la Banque mondiale et le FMI. Le récent Sommet des chefs d’Etat à Rome sur l’alimentation a dû reconnaître la gravité de la situation mais sans remettre en cause les politiques qui sont justement responsables de cette crise, notamment la libéralisation des marchés internationaux au profit des spéculateurs et des multinationales. Quelques mesures ont été annoncées mais elles sont loin de répondre à l’ampleur des besoins. Sur le plan international, la lutte devra se poursuivre contre les politiques impérialistes, pour l’annulation de la dette et pour faire de l’alimentation un véritable droit.

Les pays occidentaux, dits riches, ne sont pas épargnés par la vie chère. Sauf une minorité de privilégiés de la fortune, toutes les couches de la population sont concernées. Avec une relance de l’inflation, la hausse vertigineuse des produits alimentaires et des carburants, l’augmentation du pouvoir d’achat devient la revendication prioritaire. Les actions pour une revalorisation des salaires se multiplient dans toute l’Europe, la revendication de l’échelle mobile des salaires a même refait surface. Ces manifestations contre la vie chère et pour le pouvoir d’achat font craindre aux gouvernements et au patronat une montée en puissance du mouvement social qui pourrait aller jusqu’à remettre en cause leur politique. A l’instar du gouvernement Sarkozy, certains utilisent la manière forte en essayant de casser les acquis sociaux des luttes (retraites, durée du travail, protection sociale) tout en faisant de nouveaux cadeaux aux firmes et aux fortunés. Avec le risque de réanimer les braises d’un mouvement social qui avait réussi à faire reculer le CPE.

Craignant justement la montée de ce mouvement social, d’autres choisissent une autre stratégie en essayant d’éviter l’affrontement direct. Ils essaient de diviser en opposant les pauvres au plus pauvres, fustigent les mauvais capitalistes dits « voyous » en les opposant aux capitalistes « vertueux », critiquent les patrons qui bénéficient de trop de privilèges. C’est ainsi qu’une campagne s’est développée dans la dernière période, en France et sur le plan européen, pour dénoncer les parachutes dorés de certains patrons du CAC 40, leurs stock-options et autres avantages fiscaux ou de fonction. Les articles se suivent dans la presse économique ou généraliste, des chiffres sont publiés, des noms cités. Le président luxembourgeois du groupe de l’euro, Jean-Claude Juncker, s’est indigné récemment des abus du monde financier. Au cours d’une conférence de presse le 13 mai, il a tenu des propos très durs pour les rémunérations abusives que les grands patrons de la finance et de l’industrie s’attribuent parfois ; il a parlé de « dérapages proprement scandaleux » et même d’un véritable « fléau social ». Son indignation vertueuse ne l’a pas amené à préparer des actions mais il a montré le bout de l’oreille en déclarant : « Nous courons le risque de ne plus être compris par nos citoyens si nous lançons des appels à la modération salariale (NDLR : un leitmotiv de la Banque centrale européenne) alors que les chefs d’entreprise font l’inverse ».

En d’autres termes, Jean-Claude Juncker met en garde patronat et gouvernements devant les risques d’un mécontentement grandissant des populations qui se traduirait par des mobilisations.

Il ne faudrait pas que l’arbre des abus de quelques patrons cache la forêt des dégâts des politiques économiques et sociales mises en œuvre qui continuent de favoriser le capital au détriment du travail. C’est contre ces politique qu’il faut lutter, en recherchant des coopération et des solidarités avec les forces sociales, syndicales et politiques d’autres pays en Europe et dans le monde, pour arracher une augmentation des salaires et du pouvoir d’achat, une progression des conditions de vie et de travail, une amélioration de la protection sociale, de nouveaux droits pour les travailleurs.

L’EUROPE EN BREF.........

. Les Français persistent et signent : Peu de médias ont commenté le sondage « Opinionway » réalisé trois ans après le rejet du Traité constitutionnel par 54,6% le 29 mai 2005...sans doute pour ne pas « troubler » le référendum du 12 juin en Irlande : 61% des Français estiment en effet que l’adoption par les parlementaires du nouveau traité européen constitue une « remise en cause du vote des Français lors du référendum de 2005 ».

. Le Parlement européen veut la libéralisation en 2014 du cabotage dans le transport routier international de fret après avoir contribué à accélérer la libéralisation dans les transports ferroviaires, que ce soit pour le fret ou les voyageurs.

. La Bulgarie dans le collimateur : Depuis qu’elle a été admise dans l’Union européenne, la Bulgarie est sous la surveillance étroite de la Commission européenne ; jugeant que les mesures de lutte contre la corruption sont insuffisantes, Bruxelles menace de suspendre le versement des fonds structurels.

. La baisse de l’aide au développement : Le Conseil des ministres des 27 a réitéré sa promesse d’augmenter le niveau de l’aide au développement jusqu’à 0,7% du PNB d’ici à 2015 mais certains pays, comme la France et l’Allemagne, se sont opposés à un engagement annuel contraignant. En 2007, le niveau de l’aide européenne au développement a déjà baissé pour n’atteindre que 0,38% du PNB. Un recul historique !

. Sommet Union européenne-Amérique Latine : Les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne, d’Amérique latine et des Caraïbes ont adopté le 17 mai la déclaration de Lima centrée sur deux thèmes prioritaires : lutte contre la pauvreté, les inégalités et l’exclusion sociale ; protection de l’environnement, développement durable et politique énergétique. Le prochain Sommet aura lieu en Espagne en 2010.

. Le coût de la main d’œuvre, en moyenne de 20,35 euros de l’heure en 2006, varie de 32,16 euros en Suède à 1,65 euro en Bulgarie (France : 30,31 euros).

. L’interdiction internationale des armes à uranium appauvri a été demandée le 22 mai par le Parlement européen ; les Etats membres et le Conseil sont priés de contribuer à l’élaboration d’un traité international sur l’interdiction de la fabrication, du stockage, de la diffusion, des essais et de l’emploi d’armes contenant de l’uranium.



Commentaires

Sites favoris


20 sites référencés dans ce secteur