La HALDE épingle le RSA

vendredi 24 octobre 2008
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La Haute autorité de lutte contre les discriminations (Halde) met Martin Hirsch en difficulté. Alors que le haut-commissaire présente actuellement son projet de loi devant le Sénat, la Halde pointe deux problèmes majeurs soulevés par le RSA (revenu de solidarité active) que le Gisti (Groupe de soutien et d’information aux étrangers) lui avait demandé d’examiner. Ci-après un article de Michaël Hajdenberg pour Mediapart.fr

Le premier porte sur le droit des étrangers. Le projet de loi exige, pour jouir du RSA d’« être titulaire depuis au moins cinq ans d’un titre de séjour autorisant à travailler », saut s’il s’agit de réfugiés, d’apatrides, de titulaires d’une carte de résident ou de familles monoparentales. Ce qui laisse tout de même exclus du RSA tous les étrangers non-européens qui ont un titre de séjour n’autorisant pas à travailler et ceux qui disposent d’un tel titre depuis moins de cinq ans. La situation se pose ainsi pour des milliers de familles, par exemple les 6.000 régularisées à l’été 2006.

Ceux-là n’auront le droit ni à l’aide financière, ni à l’accompagnement social procuré par le RSA, alors que beaucoup d’étrangers sont confrontés notamment au temps partiel et aux salaires faibles.

Pour beaucoup, le RSA va se traduire par une perte de revenus. Prenons l’exemple d’un couple marié, lui français, elle étrangère non communautaire, depuis trois ans en France avec des titres de séjour de 1 an reconduits chaque année. Auparavant, cette femme comptait dans le calcul du RMI familial. Maintenant, elle ne comptera plus plus, et le RSA du foyer sera donc moins fort que l’ancien RMI.

Selon la Halde, tout ce dispositif constitue une discrimination entre étrangers et Français, mais aussi entre étrangers eux-mêmes, et cette mesure est contraire à de nombreux textes internationaux (Convention 118 de l’OIT, Charte sociale européenne du Conseil de l’Europe, Convention européenne des Droits de l’Homme, etc.).

Par ailleurs, la Halde s’interroge sur le fait que les moins de 25 ans ne puissent bénéficier du RSA. En effet, le Comité européen des droits sociaux du Conseil de l’Europe a déjà épinglé la France par le passé et estimé que « l’exclusion des personnes de moins de 25 ans du Rmi et l’insuffisance des autres mesures d’assistance sociale prévues pour ces personnes ne sont pas conformes à la la Charte sociale ».

Mais la Halde va plus loin. Selon l’institution présidée par Louis Schweitzer, « la condition d’âge, qui existait pour le RMI, pouvait paraître adaptée au but visé, lequel consistait à éviter de faire du RMI "une trappe à inactivité" susceptible de dissuader les jeunes de moins de 25 ans de se former ou de travailler. Or la finalité du RSA paraît sensiblement différente du RMI », puisqu’il bénéficiera aussi à des travailleurs pauvres.

Le collège de la Haute autorité « constate l’existence d’une différence de traitement fondée sur l’âge des personnes actives. Or une telle différence de traitement n’est licite que si elle est justifiée de façon objective et raisonnable, c’est-à-dire si elle poursuit un but légitime et qu’il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé ».

La Halde a interrogé Martin Hirsch à ce sujet. Il n’aurait pas répondu. La Halde demande donc à ce que soit réalisée une étude sur les conséquences de la condition d’âge fixée pour les bénéficiaires du RSA. Martin Hirsch doit justement présenter ces jours-ci au Sénat un amendement (le consulter dans l’onglet Prolonger) visant à créer un fonds de 10 millions d’euros pour les 18-25 ans qui sont sans emploi ni formation. Cela suffira-t-il à convaincre les sénateurs ? Dans tous les cas, après cet avis de la Halde, une saisine du conseil constitutionnel paraît assez probable.


Sur le même sujet, voir l’article précédemment mis en ligne « Non, 7 fois non au RSA » de Charles Hoareau et Dominique Carpentier



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