Le Zimbabwe accablé par le choléra

jeudi 4 décembre 2008
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Pour ceux qui ne connaîtraient que la version médiatique récente de l’histoire du Zimbabwe et les jugements péremptoires qui en découlent, rappelons qu"il n’y a pas si longtemps (1979) ce pays s’appelait Rhodésie du Sud. Après un siècle de colonialisme britannique, s’y était installé un régime raciste, proche de l’apartheid d’Afrique du Sud, dirigé par un colon du nom de Ian Smith. Robert Mugabe, l’actuel président aujourd’hui contesté par une puissante opposition, a dirigé le mouvement de libération nationale et a été en 1980 le premier président du Zimbabwe indépendant.

L’épidémie de choléra au Zimbabwe est en train de progresser à une vitesse inquiétante. La maladie a déjà fait 565 morts, selon le dernier bilan de l’Organisation des Nations Unies. Ce chiffre officiel, arrêté au 2 décembre, est malheureusement provisoire. Une estimation très en dessous de la réalité selon les ONG tandis que l’OMS évalue le nombre total de cas suspects à 11 735. Malgré l’aide de l’ONU et des ONG, les autorités sont réduites à des expédients dramatiques. L’eau courante a été coupée dans la capitale pour faire face au manque de produits destinés à l’assainir.

En outre, l’anthrax a fait son apparition dans le nord du pays, faisant trois morts, dont deux enfants, dans la vallée de Zambezi, selon des informations de l’ONG Save the Children. L’organisation a signalé 32 cas d’anthrax chez l’homme dans le district de Binga. Cette maladie, d’origine animale, menace au moins 60 000 têtes de bétail dans le nord du Zimbabwe. L’homme est contaminé en mangeant de la viande avariée, a expliqué la porte-parole du Bureau de coordination des affaires de l’ONU. « Il arrive que des gens qui ont faim mangent les cadavres des bêtes malades ou que des boucheries non agréées vendent leur viande », a-t-elle expliqué. Cette épidémie galopante pourrait se révéler lourde de conséquences politiques pour le dictateur Robert Mugabe, au-delà des souffrances supplémentaires infligées à une population déjà à genoux. Le choléra s’accélère au moment où l’armée, principal soutien du régime, donne des signes d’impatience.

231 millions pour cent d’inflation

Lundi, pour la deuxième fois en une semaine, des soldats, désarmés, ont attaqué des bureaux de change au centre de la capitale Harare, pour protester contre le retard de versement de leur solde. Des civils les ont ensuite rejoints pour affronter la police antiémeute. Les Zimbabwéens sont à bout. La moitié d’entre eux, soit quelque 5 millions de personnes, aura besoin d’une aide alimentaire dans les prochaines semaines, selon les estimations de l’ONU. L’inflation atteint le taux démentiel de 231 millions pour cent, tandis que le chômage s’établit à 80 %, conséquences de l’isolement international du pays et du naufrage de l’économie.

Après une réforme agraire bâclée qui n’a pas remplacé les fermiers blancs expulsés, Mugabe, le héros de l’indépendance, s’est maintenu au pouvoir en lançant ses milices armées d’« anciens combattants » contre les dirigeants de l’opposition et une partie de la population qui la soutenait. Après une mascarade électorale en juin dernier, accompagnée de nouvelles violences, et le boycott de l’opposition, les efforts de réconciliation, parrainés par l’Afrique du Sud et la SADC (Communauté de développement de l’Afrique australe) ont échoué. Mugabe n’a pas appliqué l’accord passé en septembre, qui donnait le poste de premier ministre au leader de l’opposition Morgan Tsvangirai, le dotant de pouvoir élargis. Ce dernier a tiré les conclusions de l’échec en appelant l’Union africaine à remplacer la SADC. « La médiation de la SADC n’a pas réussi », a-t-il déclaré à Dakar, où il devait rencontrer le président Abdoulaye Wade.

Pierre Prier (avec AFP et AP) 03/12/2008

Transmis par Linsay



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