L’opposition dans la tourmente judiciaire

dimanche 26 avril 2009
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Au Venezuela, les mois d´avril se suivent, mais ne se ressemblent pas. Le 11 avril est la commémoration du coup d´Etat de 2002 contre Chavez et le 13 est celle de la victoire du peuple de la révolution bolivarienne qui en 47 heures mit en fuite les putschistes. Avril 2009 est marqué par des décisions de la Justice et de la loi qui laissent à penser que l´opposition ne pourra plus continuer à faire n´importe quoi, n´importe comment. Ceci peut expliquer la nouvelle effervescence de ses médias et de ses internautes.

Le rôle des médias de l’opposition dans le coup d’Etat

Le verdict de la Justice pour les principaux responsables vient de tomber : jusqu’à 30 ans de prison pour certains.
Le coup d´Etat du 11 avril 2002 a déjà fait couler assez d´encre pour ne pas avoir à revenir sur ses aussi nombreux que sinistres détails. Seul l´essentiel passera à l´Histoire. Le 11 avril 2002, un rassemblement de l´opposition est transformé par ses leaders en une marche dirigée vers le palais présidentiel où se trouve déjà un groupe de partisans du président. Puis, les leaders d´opposition s´éclipsent vaillamment du cortège pour céder leur place à un véhicule blindé de la police métropolitaine qui dépend d´Alfredo Pena, maire d´opposition. C´est ainsi que les partisans du président voient débarquer sur l´avenue où ils se trouvent des policiers protégés par un blindé qui ouvrent la voie à une manifestation annoncée pourtant comme pacifique.

Soudain, les policiers n´ouvrent plus seulement la marche, ils ouvrent le feu ! En quelques minutes s’abat un déluge de balles et 19 manifestants trouvent la mort sans compter les nombreux blessés. Presque tous sont des partisans de la révolution bolivarienne. Étonnement, la plupart des victimes succombent à des balles reçues en pleine tête ou poitrine. On comprendra mieux ce fait étrange lorsqu’il sera démontré par la suite que ces manifestants sont aussi la cible de tireurs d´élites postés sur des toits d´immeubles. Ces mystérieux tireurs d´élites appréhendés sont rapidement libérés durant les 47 heures du coup d´Etat. Certains sont de nationalités étrangères et un autre fait démontre qu´en territoire vénézuélien opèrent également trois unités militaires étasuniennes de la marine et deux de ses hélicoptères.

Les médias d´opposition de leur côté sont particulièrement actifs, avant, pendant et après le coup d´Etat. Avant, par une campagne médiatique convoquant les manifestants et les incitant à la violence. Pendant, en diffusant une proclamation de l´opposition dénonçant la mort de manifestants dont elle responsabilise personnellement Chavez. Le témoignage, presque fortuit, d´un journaliste de CNN va permettre de découvrir qu´il s´agissait d´un vidéo montage préparé depuis la veille au domicile d´un journaliste de la chaîne Globovision. Ces médias sont actifs pendant aussi, puisque certains de leurs responsables, tels que ceux des chaînes Globovision et Radio Caracas Télévision ainsi que du quotidien El Nacional, sont présents durant la proclamation du président de facto, Pedro Carmona.

Et encore actifs pendant le coup d’Etat, lorsqu’ils appliquent un total « black-out » médiatique quand le peuple manifeste massivement dans les rues de Caracas pour exiger le retour de Chavez.
Pendant et après, en diffusant mille et une fois une vidéo prétendant que les victimes tombent sous le feu de bolivariens tirant sur la marche de l’opposition. Cette vidéo n’est en fait qu’un montage : d’une part, la manifestation de l’opposition est hors de portée des chavistes, d’autre part, ces derniers ne font que riposter avec de simples revolvers à l’attaque de policiers surarmés.

Toujours actifs après, ces médias ont le toupet de présenter ce montage vidéo pour obtenir un prix à la presse décerné par le Prince d´Asturies. Informée de la supercherie, la royauté espagnole ne jugera jamais nécessaire de retirer son prix « pour ne pas envenimer la situation ». Il s’agit en fait de rester discret vis-à-vis du chef de gouvernement espagnol, José Maria Aznar, qui avait été préalablement informé du coup d´Etat. Lorsque bien sûr le gouvernement ne reconduit pas pour le spectre national de télécommunication la licence arrivée á échéance de Radio Caracas Télévision, les médias d´opposition présenteront cette décision comme la fermeture d´une chaîne et une atteinte à la liberté d´expression. Pourtant, Radio Caracas Télévision continue depuis à diffuser normalement sur les divers câbles.

Enfin, les médias d’opposition ont continué à être actifs depuis 2002 jusqu´à ce jour, en diffusant par une campagne constante, toutes les versions mensongères possibles destinées à confondre l’opinion publique et en particulier l’opinion internationale.

« Ceux qui meurent pour la vie ne peuvent pas être appelés morts »

« Ceux qui meurent pour la vie ne peuvent pas être appelés morts » disait dès les années 60-70, Ali Primera, poète et chanteur révolutionnaire vénézuélien. Les révolutionnaires bolivariens ont repris sa pensée et adopté aussi le slogan qu’’il n’existe pas de 11 sans 13 » en souvenir du coup d´Etat. Un avertissement clair aux toujours permanentes tentatives de déstabilisation de l’opposition.

Ce mois d´avril 2009, 3 des 19 victimes du 11 avril 2002 qui ont payé de leurs vies la défense de leur idéal sont à nouveau bien présentes, tout comme leurs familles et plusieurs des blessés. Représentés par ASOVIC, l´association des victimes du 11 avril, ils ont pu assister au verdict du tribunal. Après l´étude de milliers de photos, vidéos et témoignages versés au dossier, le tribunal prononça une sentence de 30 ans pour les principaux responsables de leurs assassinats, particulièrement pour les ex-commissaires Lazaro Forero, Henry Vivas et Ivan Simonovis.
Le maire Alfredo Peña lui n´a pas encore été jugé, et pour cause : après avoir dicté ses ordres, il a abandonné ses commissaires à leur triste sort et se trouve depuis en fuite à l´étranger.

Ainsi, la Justice a enfin commencé à se prononcer sur les auteurs matériels. Reste maintenant à attendre le jugement des auteurs intellectuels qui laisse prévoir de nouvelles manipulations médiatiques pour transformer, comme à l’habitude, une sentence judiciaire en preuve de persécution.

Si l´image est facile à projeter à l´étranger pour une audience sciemment désinformée, elle l´est moins pour tromper le peuple vénézuélien qui sait faire la différence entre un « prisonnier politique » et un « politique emprisonné » pour délit. La différence est que ce peuple s´informe des délits objets des jugements.

Si la plupart des responsables du coup d´Etat sont en fuite, bien évidemment surtout à Miami, les médias eux sont toujours là et doivent commencer à se faire sérieusement du souci quant à leur avenir car tôt ou tard ils devront répondre de leurs actes devant la Justice. Leurs grossières manipulations et diffamations médiatiques sont démontrées depuis belle lurette. Reste maintenant à attendre que la Justice se prononce. Tôt ou tard, ces médias devront présenter les preuves de leurs accusations proférées sans cesse contre Chavez : assassin, tyran, dictateur, responsable de massacre et traître de la patrie. Il est maintenant facile de prévoir que, plus que jamais, ces médias vont redoubler de manipulations pour se poser en victimes, mais plus pour tenter de sauver leur peau que de la faire à Chavez.

Le bal des scorpions

Les sympathisants de l´opposition vénézuélienne se distinguent par une agressivité presque maladive à l´encontre de Chavez et de la révolution bolivarienne. Certains observateurs l´attribuent bien sûr à des différences d´idéologie, de classes sociales, parfois sur fond de racisme, et à une peur insensée pour leurs patrimoines face au nouveau système socialiste. Mais des spécialistes l´attribuent à une dissociation psychologique produite par les manipulations médiatiques incessantes. De leur côté, les dirigeants de l´opposition s´ils sont unanimes dans leur objectif de se débarrasser de Chavez pour récupérer leurs privilèges politiques passés, se livrent cependant entre eux à ce que l´un d´eux a défini très sérieusement comme un « bal de scorpions ».

Tant bien que mal, l´opposition présente à tour de rôle des candidats supposés capables de vaincre Chavez. Mais après une succession de défaites électorales, elle a misé sur des candidats capables d´accéder au pouvoir par des méthodes pas forcément très démocratiques.

L´un des derniers en dates, Manuel Rosales, semblait pourtant prometteur pour l´opposition et fut projeté à la une comme une nouvelle espérance avec tous les qualificatifs de rigueur inclus : miraculeux, courageux et démocrate.

Vieux routard de la politique, ancien gouverneur de l´Etat de Zulia et récemment élu maire de la ville de Maracaibo, cet emblématique Rosales s´est retrouvé confronté à des accusations de corruption. Sa réaction fut aussi immédiate que violente. Il multiplia ses menaces en conférences de presse entouré des médias d´opposition pour accuser Chavez de persécution et pour le défier à « le vaincre sur tous les terrains ».

Les fanfaronnades de Rosales seront de courte durée. Après avoir juré ses grands dieux qu´il démontrerait son innocence, il abandonna son poste de maire et disparut dans la nature lorsque furent dévoilés à l´opinion publique les chefs d´accusations : comment l´instituteur Rosales, issu d´une famille humble et avec ses salaires de maire et de gouverneur peut-il justifier plusieurs haciendas et une villa de 1.5 millions de dollars à Maracaibo ? De plus, Rosales, des membres de sa famille et des proches possèdent en Floride plusieurs sociétés, un centre commercial et deux villas de 300 et 790 mille dollars.

Il est probable que Rosales aura un autre souci. La Floride des démocrates d´Obama n´est peut-être plus la Floride des républicains de Bush. Il n’est donc pas exclu que les autorités étasuniennes demandent à Rosales la provenance des fonds de son immense fortune sur leur territoire.

Et de nouveau, nous assistons à un show médiatique présentant comme une victime de persécution politique quelqu’un qui, de fait, n´est pour l´instant qu´accusé de corruption.

Même si les médias d´opposition prétendent encore s´octroyer le rôle de juges, ce sera à la Justice d’établir si Rosales présentera ou pas des preuves acceptables sur l´origine de ses biens. Pour l´instant, il doit se présenter le 20 avril prochain devant un tribunal et la Justice, l´opinion publique et même bon nombre de ses sympathisants sont curieux de savoir s´il le fera.

La lourde tâche de l´opposition de transformer la corruption en persécution politique

Comme dans le cas de Rosales l´opposition s´était trouvé en le Général Isaias Baduel un autre chef de file, après l´avoir dénigré durant des années.

Le général Baduel, très proche et ami personnel de Chavez, a été l´un des principaux acteurs de la déroute du coup d´Etat d´avril 2002. Commandant d´une unité de parachutistes, il a été l´un des premiers officiers à se prononcer publiquement comme fidèle à la défense de la Constitution.

Par la suite, il occupa les postes de chef d´état-major de l´armée de terre puis de ministre de la défense, poste qu´il reçut en public de Chavez en personne et lui fit verser des larmes d´émotion.

L´amitié qu´il partageait avec Chavez faisait qu´ils se dénommaient mutuellement « papa » et que dans une bibliographie sur Chavez, un chapitre lui étant consacré s´intitule « Personne ne pourra jamais dire que Baduel a trahi Chavez ».

Pourtant, assez inexplicablement, Baduel qui avait été tant critiqué par l´opposition devint l´un de ses nouveaux leaders lorsqu’il se déclara un beau jour adversaire de Chavez. Mais comme pour Rosales apparut le spectre de la corruption. Peu mentionnée dans les médias, l´affaire explosera lorsqu´en début de ce même mois d´avril un tribunal militaire ordonne la détention préventive du général Baduel accusé de corruption. Il est à penser que pour avoir ordonné cette détention, le tribunal militaire doit d´ores et déjà posséder pas mal de preuves.

Et là encore, comme pour Rosales, nous assistons à un nouveau show médiatique présentant Baduel comme une victime de persécution politique qui de fait n´est pour l´instant qu´inculpé pour corruption. Et là encore, ce sera à la Justice de juger si le général Baduel présentera des preuves tangibles pour être jugé innocent ou condamné, non pour des motifs idéologiques mais bien pour une histoire de gros sous.

L´éveil de la Justice et de la loi

L´opposition se plaît à accuser Chavez d´avoir la mainmise sur tous les pouvoirs, y compris la Justice. Pourtant, à la suite du coup d´Etat de 2002, alors que Chavez avait été arrêté, emprisonné puis déporté, un tribunal n´hésita pas à émettre une sentence définissant les événements comme « un vide de pouvoir ». C´est ainsi que ne furent pas inquiétés par exemple un gouverneur ayant fait retirer de l´antenne la chaîne publique de télévision, un maire ayant exigé de violer un territoire d´ambassade, un autre maire ayant bloqué une autoroute, ces deux derniers ayant participé personnellement à l´arrestation du ministre de l´Intérieur en son domicile, le soumettant volontairement à des agressions physiques d´opposants exaltés.

Le coup d´Etat de 2002 n´avait donc pas sa réelle figure juridique de délit constitutionnel et tous ses acteurs pouvaient vivre en toute tranquillité et en toute impunité, bien que la plupart d´entre eux se soient rapidement éclipsés.

Par contre, le récent verdict rendu à l´encontre des policiers a cette fois juridiquement défini les événements d´avril 2002 comme un coup d´ Etat.

Aux dernières élections l´opposition gagna démocratiquement quelques nouveaux gouverneurs et maires. Un peu moins démocratiquement, elle limogea massivement des employés de ses institutions. Des centres de santé, d´éducation, d´alimentation, de communication ou d´asiles de personnes âgées furent fermés ou saccagés, avec notamment des tentatives d´incendies.

Le nouveau maire d´opposition de la mairie métropolitaine de Caracas, Antonio Ledezma, n´échappa pas à la règle et fit preuve d’un zèle particulier. Élu surtout grâce aux votes de secteurs privilégiés de Caracas il était cependant loin d´avoir obtenu la majorité dans les secteurs populaires. Dès lors, l´affrontement avec le peuple devint inévitable et s´accentua à la suite du limogeage de plus de 7.000 employés de sa mairie, l´exclusion des sapeurs-pompiers s’affichant comme fidèles au gouvernement, ainsi que ses prétentions de diriger la mairie en marge de son rôle réel de coordinatrice des cinq municipalité de Caracas. Le nouvel élu entendait se poser comme autorité supérieure et autonome.

Ce mois d´avril, l´assemblée nationale a donc voté par majorité absolue des parlementaires la loi organique du district capital de Caracas, district qui sera dirigé par un chef de gouvernement désigné par le président de la république.

Ledezma doit pourtant comprendre facilement cette réorganisation administrative de Caracas puisque lui-même a été par le passé gouverneur de Caracas nommé par le président d´alors.

Ledezma qui, à l´image de Rosales, multiplia ses défis et menaces contre Chavez en conférences de presse, se voit donc replacé par la loi à son rôle de maire de métropole. Le district de la capitale assume désormais la charge des hôpitaux, des centres d´éducation publique, du corps des sapeurs-pompiers et de leurs budgets. Ledezma doit également céder l´hôtel de ville ou il n´a d’ailleurs jamais pu siéger confronté aux manifestations des habitants du centre ville. Il avait alors dû se réfugier dans des bureaux de la chambre de commerce du secteur privé.

Le jugement des policiers coupables des assassinats du coup d´Etat, la fuite de Rosales et la détention de Baduel soupçonnés de corruption ainsi que l´échec de Ledezma à prétendre diriger sa mairie en autocrate confirment qu´au Venezuela d´avril 2009, la Justice et la loi sortent du silence malgré les multiples shows médiatiques de l´opposition.

Si l´opposition prétend vaincre Chavez, c´est sur le terrain démocratique et dans le cadre de la loi qu´elle devra désormais jouer ses cartes en oubliant ses manipulations médiatiques habituelles.

Par Jean Araud site Michel Collon le 20/04/2009

Transmis par Linsay


En médaillon Antonio Ledezma



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