Un affrontement entre deux conceptions inconciliables

vendredi 19 février 2010
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Une expression des Rouges Vifs d’Ile de France. En document joint le tract au format PDF. Sur cette question on relira avec intérêt le rapport Friot qui n’a rien perdu de sa clairvoyance.
Cliquer sur le lien en fin d’article

Méthodiquement, le gouvernement poursuit la démolition de tout ce qui pourrait
entraver le profit capitaliste. Encouragé par l’effritement organisé du formidable
mouvement de début 2009, il veut franchir une nouvelle étape qu’il prétend déterminante
pour plusieurs décennies.

Le Capital n’a jamais admis d’avoir été obligé, sur l’injonction du Conseil
National de la Résistance, de rémunérer le Travail par une partie de salaire sous forme
socialisée permettant de financer la protection sociale dont les retraites.

Ses serviteurs
au pouvoir sont chargés d’en finir avec cette entrave à leur domination.
Tous les instruments idéologiques sont à l’oeuvre pour faire plier le Travail en
s’appuyant sur la situation vécue depuis les décrets Balladur de 1993 : le recul des droits
n’a pu être contré malgré des luttes massives.

C’est donc en toute conscience qu’il faut aborder ce nouveau rendez vous de
confrontation.
A partir de la situation d’aujourd’hui mais sans oublier que parmi les forces
politiques qui se sont succédées au pouvoir depuis les premières mises en cause en 1967,
toutes ont participé à l’accélération du processus.

Revendiquer le droit à la retraite, comme progrès de civilisation, peut prendre
toute sa force et conduire le monde du travail à construire son propre outil politique
conforme à sa place dans la société qui mette en cause frontalement le Capital. A
condition d’aller au fond des questions posées.

Il faut démonter les arguments fallacieux

1. « L’allongement de la durée de vie »

L’histoire des retraites dans notre pays démontre que le progrès de civilisation que
représente l’accroissement de la vie s’est déjà produit. « L’obstacle » des besoins de financement
supplémentaires a toujours été surmonté, et pour cause ! Si mathématiquement le poids des retraites
dans le PIB augmente de 2,5 % tous les vingt ans, on voudrait passer sous silence que ce même PIB
s’accroît de 40 à 50 % dans la même période. Chacun peut le vérifier en relevant le fameux chiffre
annuel de croissance.
Si les salariés n’ont pas fini de subir les conséquences de la crise capitaliste, chacun peut
aussi constater que « la croissance est revue à la hausse dès cette année ». Quand Nicolas Sarkozy
prétend vouloir « aller chercher un point de croissance », c’est pour l’orienter exclusivement vers la
rémunération de ses amis actionnaires.
De plus, les prévisions de catastrophe annoncée en 2040/2050 en matière de retraites ne
prennent pas en compte l’évolution du taux de natalité, la baisse malheureusement inéluctable du
nombre de retraités issus du « baby boom » et la hausse de la productivité qui fera que le salarié du
futur produira davantage de richesses que celui d’aujourd’hui. Qui a confisqué les gains de
productivité depuis la mise en place de la retraite par répartition en 1945 et se sont enrichis ? Ceux-là
mêmes qui refusent de nous augmenter actuellement et qui prétendent nous faire travailler plus
longtemps !

2. « Pas d’autre choix que de travailler plus longtemps pour financer les
retraites »

Le principe du financement des retraites dans notre pays provient de la cotisation sociale
basée sur le salaire. Son financement dépend donc mécaniquement du niveau des salaires. Or, ces
vingt dernières années, la part du salaire dans la masse des richesses créées au niveau national (PIB)
est passée de 71% à 58%. Cela représente plus de 160 milliards d’euros par an confisqués par le
capital. Ajoutons à cela les « exonérations de charges patronales », la politique systématique de bas
salaires, d’emplois précaires, les plans de licenciement entraînant un chômage massif : Le manque à
gagner pour les cotisations sociales se chiffre à près de 65 milliards d’euros par an. Elles sont là et
pas dans la durée du travail les raisons de la dégradation dont on parle.
Ces données escamotées par le pouvoir discréditent d’avance tout « constat partagé » !

3. « Sauver le système par répartition ? »

L’objectif du gouvernement est précisément d’en accroître les difficultés pour qu’il ne soit
plus en capacité de donner à chacun les moyens d’une vie après le travail subordonné. L’idée
poursuivie par tous les gouvernements depuis 1991 (mise en place de la CSG par Rocard) est de
l’étatiser complètement et d’en limiter la portée aux seuls minima sociaux.
Pour le complément, il faudra se tourner vers les banques et assurances avec la certitude que
cette épargne salariale servira à de nouvelles spéculations. La crise aura au moins montré cela :
personne ne peut plus nier l’évidente nocivité de ce système. La situation de millions de salariés
étasuniens, mais aussi de pays voisins de l’UE, qui ont tout perdu de leur « placement », est là pour
en attester.

4. « On pourrait compenser l’allongement de la durée du travail par la
reconnaissance de la pénibilité de certains métiers »

Dans le système capitaliste, il n’y a pas d’autres moyens pour subvenir à ses besoins
quotidiens que de louer sa force de produire contre un salaire. Sous cet aspect, tout travail est
contraint et subi et donc revêt un caractère pénible.

Il est vrai que certains métiers sont plus porteurs de contraintes, de risques et génèrent une
espérance de vie plus courte. C’est d’abord en terme d’améliorations de conditions de travail (durée
journalière et hebdomadaire réduite, limitation du travail de nuit aux seules nécessités sociales, …)
qu’ils doivent être traités et non sous le seul angle d’un aménagement du départ en retraite. C’est
l’exploitation capitaliste qui est à l’origine d’une mortalité précoce.
On ne peut en accepter le
principe en échange de mesures déjà annoncées en 2003 et que le MEDEF n’a, de toute façon, pas
l’intention de mettre en oeuvre. Il ne peut y avoir de compromis « allongement de la durée du
travail pour le plus grand nombre contre quelques départs avancés ».
Certes, les mêmes arguments fallacieux ont déjà été utilisés lors des attaques
précédentes les plus marquantes (1993, 2003, 2007, 2008). Profitant de la résignation,
voire de l’adhésion idéologique à ces affirmations mensongères, le pouvoir prétend
cette fois-ci en faire une étape décisive pour garantir l’expansion permanente de la
part du Capital dans le PIB jusqu’au milieu du siècle.
La décision récente du gouvernement social-démocrate espagnol ou grec de
repousser l’âge légal de la retraite démontre la cohérence qui émerge en ce sens au
sein de toute l’Union Européenne, instrument politique élaboré dans l’unique intérêt
du Capital.
Pour la France, c’est début 2002 à Barcelone que Chirac et Jospin ont
conjointement donné leur aval à cette régression. Les mises en cause d’aujourd’hui ne
sont que la suite logique de cette concession.

Le Capital veut remettre en cause les fondements de
la répartition :

- Parce que c’est un marché potentiellement juteux
- Parce que c’est un exemple de modèle économique qui existe et vit sous nos yeux,
alternatif au capitalisme présenté comme indépassable
- Parce que la part patronale de la cotisation retraite est une contrainte qui limite le
profit capitaliste

La retraite par répartition a permis de limiter la crise dans notre pays

De par le nombre de retraités qui, malgré des pensions continuellement en baisse, a
contribué à soutenir la consommation des ménages.
Mais aussi de par leur statut, méconnu dans la société, de travailleurs libres,
débarrassés de leur subordination à un patron et des horaires imposés, leur permettant ainsi
de participer, sous de nombreux aspects, à la croissance des richesses créées et à la réponse
aux besoins sociaux.
Enfin, le budget des retraites, de par le principe de la répartition, est libéré des
contraintes quotidiennes du Capital et échappe ainsi à la spéculation qui est à l’origine de la
crise.

Pour financer les retraites, faire reculer la voracité du Capital

Pour cela, il faut que le Travail reprenne confiance dans sa force mais surtout dans sa
légitimité à pousser en avant ses revendications. Légitimité car seul le Travail est créateur
de richesses
contrairement à l’actionnariat et au grand patronat. Sa revalorisation par une
forte augmentation générale des salaires doit être à l’ordre du jour et surtout ne pas être
déconnectée de la question des retraites.
Dans le salaire, la cotisation employeur doit être augmentée pour compenser la
confiscation permanente des gains de productivité. Toutes les exonérations doivent cesser.
Exiger l’arrêt des plans de licenciements et la mise en oeuvre d’une politique de
plein emploi,
combattant la précarité et le temps partiel non choisi est aussi un impératif.
Mais le débat doit être poussé plus loin pour surmonter les divisions entre salariés
que veut attiser le pouvoir. La retraite est une part du salaire, alors les budgets dégagés
doivent être gérés par les propriétaires de cette partie de salaire : les salariés !
Il faut revenir à l’élection directe des administrateurs des caisses de la Sécurité
Sociale dont la CNAV. Pourquoi ne pas en profiter pour ramener, dans un premier temps, la
participation des employeurs à celle prévue par les fondateurs du système, à savoir 25 % du
Conseil d’Administration ? Si l’Etat doit y siéger, c’est en tant que patron. Il ne peut être
juge et partie ! Ne met-il pas en difficulté le régime de la Fonction Publique en proclamant
sa volonté de supprimer un fonctionnaire sur deux ?
Travaillons aussi aux convergences entre toutes les catégories de travailleurs, entre
toutes les professions et avec les privés d’emploi en développant l’aspiration à
l’harmonisation sur la base des meilleures prestations. Pourquoi ne pas débattre d’une
revendication d’un âge de départ possible pour tous ceux qui le souhaitent à 55 ans avec un
niveau de pension d’au moins 75 % du meilleur salaire ?
En parallèle, la question des moyens politiques nécessaires à de tels objectifs doit être
posée pour que ce point de vue, que nous qualifions de révolutionnaire, se fasse entendre
dans le champ politique et affirme qu’aucun consensus n’est possible entre le Capital et
le Travail.

La représentation politique du Travail est un enjeu dont l’avenir dépend des travailleurs :

Soit son développement et l’affirmation de son caractère majoritaire et primordial sur
toute la société
Soit son dévoiement, sa confiscation dans une délégation de pouvoir au sein des
institutions actuelles et au final, de nouveaux abandons idéologiques et politiques qui
encouragent le gouvernement à aller toujours plus loin.

Choisir le premier terme de l’alternative implique dès lors de refuser de se caler
sur le calendrier imposé par Sarkozy et de contre attaquer sans attendre.
Face à une telle politique de classe, la première des perspectives politiques est de
définir des exigences sociales claires et offensives et de favoriser leur expression dans
la rue.

Cela doit conduire aussi à multiplier les contacts entre tous ceux qui veulent
travailler à la convergence et à la victoire de la lutte indispensable qui s’annonce.
Avec tous les travailleurs, les militants, les organisations qui le souhaitent,
ROUGES VIFS IDF est disponible pour contribuer à construire la riposte politique du
Travail.

Le 14 février 2010.

Le rapport Friot



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