la C.I.A. dans le collimateur du parlement européen

mercredi 10 mai 2006
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En janvier 2006, le Parlement européen a désigné les 46 membres de la commission d’enquête qui doit établir si la CIA est liée à des « remises extraordinaires de détenus fantômes qui sont gardés au secret sans bénéficier de droits légaux » et qui seraient soumis à des actes de torture. Autres missions de cette commission : la complicité éventuelle d’Etats européens avec la CIA, l’utilisation d’aéroports européens par les Etats-Unis pour le transfert de ces détenus.

La commission d’enquête, qui dispose d’un délai maximum d’un an pour répondre aux questions posées, a présenté un premier rapport d’étape après plusieurs rencontres et auditions d’organisation des droits de l’homme, d’ex-prisonniers et de responsables gouvernementaux. Ce rapport confirme pour l’essentiel ce que révélait déjà le 1er mars le secrétaire général du Conseil de l’Europe : « L’Europe est, dans sa quasi-totalité, un terrain de chasse libre pour les services de renseignements de sécurité étrangers ».

Pour le rapporteur de la commission d’enquête, le socialiste italien Giovanni Fava : « La CIA a été, à plusieurs reprises, clairement responsable de l’enlèvement et de la détention illégaux de terroristes allégués sur le territoire des Etats membres ainsi que des restitutions extraordinaires ». Par « restitutions extraordinaires », il faut entendre la livraison de prisonniers à des pays où la torture est utilisée pour tenter de leur soutirer des renseignements. C’est ainsi que M.El-Masri, de citoyenneté allemande, a été enlevé en décembre 2003, transféré un an plus tard en Afghanistan à bord d’un avion de la CIA pour y être détenu et torturé pendant quatre mois avant d’être relâché sans qu’aucune charge n’ait été retenue contre lui. Le rapporteur dénonce la complicité passive des Etats membres et juge « invraisemblable » que les gouvernements de ces Etats n’aient pas eu connaissance des activités de la CIA sur leur territoire, dans leur espace aérien ou leurs aéroports : « Quand un avion va de Kaboul à Guantanamo en passant par la Pologne, la Roumanie et le Maroc, ce qui n’est pas le trajet le plus court, il ne fait pas escale seulement pour s’approvisionner en carburant ! ». Des prisonniers ont été détenus dans des centres de torture en Europe ou dans des pays tiers ; quand il n’a plus été possible de les garder, ils ont été transférés vers la base de Guantanamo, une zone de non-droit étasunienne à Cuba.

Parallèlement à la mise en place de la commission d’enquête, le Parlement européen a adopté une résolution demandant la fermeture du centre de détention de Guantanamo et l’assurance que chaque prisonnier (ils sont plus de 500) sera traité conformément au droit humanitaire international et sera entendu sans délai, de manière équitable et publique, par un tribunal compétent, impartial et indépendant. Il a également condamné les tortures et traitements dégradants subis par les prisonniers en s’appuyant sur un rapport d’experts de la Commission des droits de l’homme des Nations-Unies qui dénonçait l’usage de la torture et demandait la fermeture du centre de détention ouvert en janvier 2002. En réponse à la résolution du Parlement européen, la Commission européenne et le conseil ont assuré qu’ils soulevaient régulièrement ces questions avec les Etats-Unis. Ils l’ont fait de façon si timide que les Etats-Unis n’en tiennent aucun compte !

DELORS SUPERSTAR........

Il fut un temps où les partis communistes du monde entier fêtaient les anniversaires de Joseph Staline avec force discours et cadeaux. Ce temps-là est heureusement révolu.....Serait-il remis au goût du jour par les socialistes ? Bien entendu, ce n’est pas pour fêter Staline ou ses émules mais c’est pour rendre hommage...à Jacques Delors qui vient d’avoir 80 ans. Le groupe socialiste du Parlement européen a fêté cet anniversaire, en présence de l’heureux octogénaire, avec des discours et des témoignages qui méritent d’être portés à la connaissance du public. C’est la glorification d’un nouveau « Père de l’Europe » ! La sociale-démocrate Evelyne Gebhardt, qui a préparé le compromis avec la droite sur la directive « Bolkestein », s’est exclamée : « Si seulement Jacques Delors était encore là, nous pourrions faire une ouverture des marchés des services avec une vraie approche européenne ». Le travailliste britannique Michael Cashman se souvient : « Lorsque j’étais acteur et je jouais Prospero dans »la Tempête de Shakespeare, j’ai rêvé de Jacques Delors (...). Il était un homme avec un rêve. Un rêve d’une Europe sociale qui comptait pour la vie quotidienne de ses citoyens (...). Il est resté ferme et son rêve s’est réalisé« . Le portugais Paolo Casaca évoque la station de train »Jacques Delors« dans le Nord du Portugal : »Tous les jours, il y a des Portugais qui pensent à toi (...), des ménagères qui font leurs courses et aussi beaucoup d’élèves« . La française Pervenche Bérès se rassure : »Dès que le doute est là, je me demande (...) que ferait, qu’en pense Jacques Delors ?" Elle avait dû oublier de se poser la question au moment du referendum sur la Constitution européenne puisque Jacques Delors s’était fermement engagé pour le oui.

Le président du groupe socialiste, l’allemand Martin Schulz, lui a remis un recueil de 80 témoignages, bien sûr tous élogieux. Pas un ne rappelle que c’était le ministre Jacques Delors qui avait fait prendre à François Mitterrand le tournant de la rigueur ou que c’était le commissaire Jacques Delors, à la tête de la Commission de 1985 à 1995, qui avait instauré le marché unique fondé sur la libre concurrence et fait aboutir le Traité de Maastricht. Quant à « l’Europe sociale » qui lui servait de référence dans ses discours, on attend toujours ! En réalité, il avait surtout l’art d’enrober de « social » les mesures les plus libérales.

VERS UN ACCORD DE LIBRE-ECHANGE UNION EUROPEENNE-ETATS-UNIS ?

En Amérique Latine, nombreux sont les pays, comme le Venezuela, qui essaient de se dégager de la domination étasunienne en dénonçant les accords de libre-échange imposés à des gouvernements vassaux. Là où ces accords ont été mis en oeuvre, comme au Mexique, ils se sont traduits par l’aggravation de la situation économique et sociale des populations au seul profit des multinationales. Rompant avec ces accords de domination, les pays d’Amérique Latine engagés dans un processus de changement radical cherchent à renforcer leur coopération et leur solidarité avec leurs voisins dans le cadre d’une véritable intégration régionale profitable à tous les peuples.

L’Union européenne a pris le chemin inverse. Dans ses relations avec les pays tiers, qu’ils soient à l’Est ou au Sud, elle cherche à imposer des accords d’association fondés pour l’essentiel sur le libre-échange. Son véritable objectif est d’ouvrir de nouveaux marchés à ses firmes exportatrices et non de contribuer au développement de ces pays. Dans ses relations avec les Etats-Unis, la défense de ses intérêts économiques et commerciaux a quelquefois amené l’Union européenne à une certaine résistance face aux pressions étasuniennes, comme dans le secteur aéronautique. Au nom de la libéralisation des échanges dans le cadre de l’OMC, la commission pour le commerce international du Parlement européen veut briser rapidement tous les freins et obstacles à la libre concurrence dans les relations transatlantiques. Elle vient en effet d’adopter le 18 avril un rapport de la socialiste allemande Erika Mann qui demande au prochain Sommet UE-Etats-Unis de juin prochain le lancement de négociations en vue d’un nouvel accord de partenariat devant mener à l’instauration d’un marché transatlantique libre de toute entrave aux échanges commerciaux d’ici 2015. Pour les services financiers et les marchés des capitaux, cet objectif devrait déjà être atteint d’ici 2010.

Cette zone de libre-échange avait déjà été proposée dans les années 1990 par le commissaire Leon Brittan mais elle avait rencontré une forte opposition qui avait empêché son application. Les groupes de droite et socialiste se sont unis pour accélérer le processus de libéralisation sur le plan mondial, notamment dans les relations avec les Etats-Unis. L’instauration d’une telle zone de libre-échange constituerait une grave menace pour les droits sociaux, environnementaux et culturels dans toute l’Union européenne. Elle entraînerait un alignement vers le bas de toutes les législations.

Cette nouvelle offensive néolibérale est menée moins d’un an après le referendum sur la constitution européenne au cours duquel certains dirigeants politiques et syndicaux ont essayé de faire croire que l’Union européenne pouvait être un rempart contre la mondialisation libérale. Alors qu’elle en est le moteur principal avec les Etats-Unis.



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