Interview de Dominique IDIR

vendredi 12 mai 2006
par  Charles Hoareau
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Ancienne Trapéziste du Cirque Bidon et fondatrice d’Artriballes, Dominique est à l’origine de l’initiative du 13 mai sur le quartier Noailles (voir rubrique Rendez-vous). Elle s’y bat au quotidien pour le droit au logement et à la dignité.

Pourquoi travailler dans ce quartier ?

Parce que c’est un quartier où il y a des gens de tous les pays du monde et j’avais l’impression de continuer de voyager. Grâce à eux j’étais moins sédentaire. Et en vivant dans ce quartier ça m’a ouvert les yeux sur ce qui ce passait sur la planète et particulièrement à Marseille.

Je voulais travailler avec les enfants à Noailles, j’avais envie de transmettre ce que je savais faire aux enfants, de monter des spectacles, de les régulariser aux cours, de les valoriser. Ils sont très inventifs et créatifs. Artriballes c’est un lieu de vie pour certains enfants du quartier, ils viennent au cours de cirque mais aussi au Hip Hop, aux ateliers d’arts plastiques, ou juste pour discuter.

Que ressens-tu après 10 années de travail dans le quartier ?

Je trouve que la vie devient de plus en plus dure pour les gens. Que la pauvreté s’est accentuée, je remarque une détérioration de la qualité de vie des habitants. Et que la politique de réhabilitation telle qu’elle est menée est en grande partie responsable de la fragilisation de gens sur le quartier. Ils ont peur de la hausse du prix du loyer.
Je revendique le fait de faire de la politique au sens premier du terme, c’est à dire que je m’intéresse aux affaires de la cité et donc je m’engage.

D’où est venue l’idée du spectacle Cordes Vocales ?

Depuis 4 ans je m’investis sur le problème du logement, d’abord avec « Un Centre Ville Pour Tous » pendant 3 ans où j’ai suivi une bonne formation juridique, puis devant l’ampleur des problèmes que j’ai découvert, j’ai rejoint la Commission logement du Comité Chômeurs CGT, pensant qu’on ne pouvait en rester à la seule application de la loi. Il fallait passer à l’action quite à sortir du cadre légal.

Les lois c’est eux [ceux qui gouvernent NDLR] qui les font à leur manière et qui les changent ou ne les respectent pas quand ça les arrange. Qui c’est qui est légitime ? Ceux qui laissent dormir des gens dehors dans la rue ou nous qui appliquons nous mêmes la loi de réquisition ? Après tout De Gaulle en 40 quand il a lancé son appel il était dans l’illégalité...

Rencontrer des familles entières qui vivent, dans des garages, des voitures, des appartements sur-occupés avec des problèmes d’insalubrité, rats, peinture au plomb, effondrement des plafonds, des planchers, est inadmissible en France au 21e siècle.
C’est d’autant plus inadmissible quand on sait qu’il y a 33000 logements vides à Marseille !

J’ai même vu des gens qui avaient de très beaux appartements (rue de la république) à qui on demandait de partir pour réhabiliter leur quartier. Constatant la complicité de certain des élus avec les multinationales et les n°1 de l’immobilier, je ne pouvais me taire. Et mon expression c’est l’écriture avec le trapèze et le travail sur le quartier.

Pourquoi inviter des associations et des organisations syndicales ?

Parce que plus on est nombreux et plus on est fort.
Et que sans un mouvement citoyen de grande ampleur, il sera très difficile de faire bouger les choses. Normalement dans les opérations de rénovation urbaine l’intérêt général doit primer sur l’intérêt particulier, mais là on a l’impression que quelques particuliers défendent leurs intérêts contre la population !

Cette question de la rénovation du logement à Marseille pose aussi la question du racisme avec les propos inadmissibles et répétés de la mairie...

Les enfants des anciennes colonies sont des français. Ils sont les forces vives de notre pays et la classe politique actuelle en a peur, il s’agit simplement de constater leur non représentation dans les partis politiques et les structures de la société.

Quand les dirigeants politiques parlent de l’immigration ils l’associent à l’insécurité.
Mais l’insécurité est provoquée par les problèmes de logement, de chômage, de santé...aujourd’hui les pauvres sont soi disant des fraudeurs que l’on réprime : radiation RMI, radiation CAF, radiation fiscale des chibanis...

La répression est un manque d’imagination politique, on réprime lorsque l’on est plus capable de proposer autre chose !



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