Que notre conscience devienne lutte !

Traduction par Eleni
mardi 23 novembre 2010
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Les médias ont arrêté de parler de ce pays, maintenant c’est l’Irlande en ligne de mire.
Maintenant ce sont eux qui vont faire « plonger » l’Europe. Et les rapaces, banquiers, FMI, des haut- commissaires et des contrôleurs de l’Europe, viennent « au secours » de ce pays pour le faire socialement sombrer à son tour. Et puis à qui le tour ? au Portugal, à l’Espagne, à l’Italie, à la France…
Ils sont naïfs quand même de penser que les pays capitulent. Que les consciences se taisent. Que tout n’est que du fric qui se ballade et que les peuples ne sont que des troupeaux de moutons qui s’agitent pendant les manifs mais capitulent au moment de la tonte, du pillage, de l’abattage.
J’ai traduit le texte ci-dessous qui m’a été envoyé par une amie professeur de collège. Les grecs n’ont pas capitulé. Dans les rues, derrière les murs, la foule grogne, la colère monte. Nous ne paierons pas leur crise. Pas un centime pour le capital. Que l’injustice devienne lutte…

Ville de Patras, 28 octobre 2010 (fête nationale de la résistance grecque -1940)
Prêche d’un professeur de théologie de collège –ville de Patras- qui a été lu dans l’église et tout le public est resté bouche bée.

" Soixante dix ans plus tard.

Tu fêtes la résistance de notre peuple, tu chantes « les femmes de l’Epire », tu brandis des drapeaux
avec un air réservé, tu danses par habitude sur les places publiques. Mais cette année tu éprouves de la difficulté à dire le NON [1]. Tu n’es pas certain, tu doutes. Tu appréhendes des malentendus et des interprétations. Tu trembles par peur des conséquences.

Pendant des années tu répétais de façon cérémoniale et monotone le NON de ton grand père. Tu admirais son sacrifice, tu criais « gloire » sans limites pour les acquis et l’héroïsme de sa génération. Pourtant pendant les décennies qui ont suivi, tu as dilapidé indolemment la liberté qu’elle t’a offerte. Tu as construit ta vie.

Enfin ta propre maison, et puis, ta propre maison secondaire. Tu as fait des voyages lointains, onéreux, vers des destinations exotiques. Tu as acheté la première et puis la seconde voiture. Tu as emprunté des sommes faramineuses, des prêts et des cartes que les banques t’offraient sans scrupule. Tu as gavé tes enfants de cours privés et de cours de soutien, pour qu’ils étudient des métiers qui rapportent, pour qu’ils deviennent des hauts cadres d’entreprises.

Tu as exploité de toutes tes possibilités les immigrés qui avaient besoin de toi pour ramasser tes olives, construire et nettoyer ta maison, garder tes enfants.

Tu as joué à la bourse ce que tu as hérité de tes parents et tu as acheté le « vent » que les vautours du marché libre t’ont vendu. Tu as trafiqué avec ce pouvoir pourri, des dessous de table - oh combien de fois-, même toi tu as perdu le compte : pour le service militaire de ton fils, pour l’arrangement de tes impôts, la bâtisse sans permis au bord de mer, ta place de fonctionnaire dans l’entreprise de prestige, ta priorité à la liste d’attente de l’hôpital.

Tu dépensais ton ennui en broutant tranquille aux pâtures de la télé en répondant à la propagande et au modèle de chaque incongru. Tu as déshonoré ton vote plusieurs fois pour un service, pour servir les guignols des partis, les professionnels et les héritiers de la politique.

Mais cette année les choses ne sont plus comme dans le passé. La fête n’est plus une fête. La grandeur des mots n’existe plus. Ta dignité nationale est timide et flasque, elle est déguisée, elle fait semblant de faire la fête sous l’œil austère de la surveillance. Tout est oppressant. Chez nous, autour de nous, partout. « L’impasse du pays se trouve dans les cœurs de ses habitants ». Un pays soumis et dépendant.

Un pays « champs de tir bon marché ». Un pays soumis à l’avidité des spéculateurs, des puissants du fric, des emprunteurs qui réclament leur argent. Ils te sous-évaluent pauvre pays, aujourd’hui pour te racheter gratuitement demain.

« Je suis un pays qui meurt ». Tu entends la voix ? Tu vois le mal qui nous est arrivé ? « Celui qui n’a pas vu des gens mourir par un coup de marteau invisible, ne peut pas comprendre ce que signifie la mort d’un pays. »

Patrie, occupation et résistance : si les mots se sont vidés de leur sens au fils des années, ce n’est pas la faute des mots, nos propres vies sont désertées. Avant que les mots foutent le camp, c’est le courage des gens qui fout le camp, la volonté des peuples de rester libres.

Il ne faut pas jouer avec les mots !

Qui peut parler aujourd’hui pendant cette fête de la patrie, de l’occupation, de la résistance ? Ceux qui ont vendu le pays et à chaque fois, au moment critique signaient des conventions avec l’occupant ? Ou peut être les élites politiques et financières qui abandonnaient le pays et le peuple au moment de la bataille, pour revenir par la suite en tant que libérateurs et sauveurs de la nation.
« C’est qui donc le patriote ? »
Arès Velouhiotis [2]ce symbole tragique de la résistance du peuple, lui il a quelque chose à nous dire : « Qui est le soldat ? Eux, ou nous ? Le capital n’a pas de patrie et court chercher du profit aux pays où cela peut se faire. C’est pour ça qu’il ne se soucie pas de frontières. Nous ici, la seule chose qu’on possède, ce sont nos huttes, et nos bancs de pierre. Nous, contrairement au capital qui court au profit, nous ne pouvons bouger et restons là où on habite. »
Qui alors s’intéressera le mieux à son pays ? Ceux qui évacuent leurs capitaux où nous qui restons ici avec nos pavés ?
Ici on restera tous, personne ne partira. Capitaine traqué par tous ! Ici on gardera les bancs de pierre dont on a hérités. On partagera notre pauvreté, nos besoins, notre colère ; mais on ne capitulera pas.

C’est ainsi que :
« Je brûle mes bateaux / je ne bougerai pas.
Même si tu n’as jamais su /m’offrir une caresse / je roderai toujours là
De persévérance et de folie/ je vivrai dans ce pays/ jusqu’à trouver de l’eau
Parce que je viens d’ici/
Pays crucifié, j’ai vu /dans tes yeux la lumière /de la résurrection »

(Je brûle mes bateaux – N. Portokaloglou)

Patra – octobre 2010
Giorgos Malfas professeur de théologie"


[1Le NON emblématique prononcé par le chef de l’Etat grec le 28 octobre 1940, vers l’Italie, signifie le refus du pays de capituler.

[2Arès Velouhiotis (en médaillon),
Personnalité incontournable de l’histoire grecque de la résistance contre l’occupation fasciste. Fondateur du ELAS – armée de libération, membre du EAM (Front grec de libération)- et du KKE (parti communiste grec), il n’a jamais capitulé, et a conduit le maquis en refusant de rendre les armes.



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