Interview de Nadia Restouin

Vive les services publics !
mercredi 14 juin 2006
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Nadia est militante de la CGT ANPE dans l’action le 13 juin contre les projets gouvernementaux d’accentuation du flicage des chômeurs.

R.M : Depuis plus de 10 ans, dans l’ensemble du secteur public, le critère de rentabilité a peu à peu pris le pas sur l’objectif d’efficacité sociale qui prévalait à la mise en place des services publics à la Libération. Comment cela s’est-il traduit dans ton secteur d’activité ?

N.R : Cela est passé par plusieurs éléments, il y a eu la fin de la mise à disposition au service public de l’emploi (SPE) de moyens pour aider les chômeurs, pour autre chose que la recherche d’emploi.

Il faut bien comprendre qu’à côté de la recherche d’emploi il y a tout ce qu’on classe dans insertion et qui pèse négativement sur la recherche d’emploi (qualification, acquisition d’expérience, mobilité, garde d’enfants...).
On a perdu les moyens qu’on avait comme le financement du permis ou de formation.

Aujourd’hui les seules formations financées sont celles vers ce qu’ils appellent les métiers en tension c’est-à-dire les métiers censés offrir de meilleures possibilités d’emploi...ce qui est à vérifier.
De ce point de vue la suppression du fonds social de l’Assedic (en 97 sous la présidence de N. Notat et alors que Martine Aubry était ministre du travail N D L R) a été une catastrophe.

Il y a eu aussi la création du PARE sous le gouvernement Jospin qui constitue un sacré tournant.
A partir du PARE la gestion de la liste des demandeurs d’emploi a été confiée à l’Assedic.
Ce n’était plus le S P E qui était responsable des chômeurs, de leur accompagnement, mais l’organisme payeur avec des possibilités nouvelles de sanctions et de radiations sans avoir les moyens d’orienter professionnellement les chômeurs.

Enfin il y a eu en 2003 la réforme de notre statut, reforme évitée là encore par N. Guigou, sous le gouvernement précédent. Cela a été le début de la casse du service public, la fin par les agents ANPE de la possibilité d’appliquer la clause de conscience...

C’est une logique d’individualisation et de déresponsabilisation de l’état et particulièrement du ministère du travail. Ce n’est pas les chômeurs qui sont responsable de leur chômage on ne peut pas les obliger à faire n’importe quoi pour remédier à une situation dont ils ne sont pas responsables.

R.M : Quelles conséquences pour le service rendu ? Peut-on encore parler aujourd’hui de service public garant de l’égalité d’accès à un droit fondamental ( énergie, santé, transports, éducation, emploi, communication, logement...) ?

N.R : On met en concurrence les conseillers sur des objectifs. Ainsi des primes de résultats sont données sur la base de 5 critères : (sortie du chômage des DE, prescription « cache sexe », relation entreprise...), pour l’instant ces primes sont collectives.
Mais demain on peut imaginer la mise en place de primes individuelles au mérite...d’avoir bien radié !!

Quand je parle de prescription cache sexe, je fais allusion à tous ces pseudo stages surtout destinés à dégonfler les statistiques et enrichir les prestataires privés sans que cela ne soit d’une réelle utilité pour les chômeurs.
Pour en revenir à la question des primes, certaines sont individuelles et attribuées à la tète du client inutile de le dire que les syndicalistes ne les perçoivent pas.

L’ANPE, à travers ce qu’elle appelle un contrat de progrès, essaie de développer la fierté individuelle d’appartenance sur des critères à l’opposé du service public. Ainsi en parlant du suivi des chômeurs, on va parler de gestion du stock et du flux !

Elle veut faire croire que la modernisation ce serait la privatisation alors qu’en fait ce serait le retour aux loueurs d’hommes du début du siècle dernier...Quand il y a eu sur le changement de logo (qui a couté fort cher) la cérémonie a eu lieu pour notre département au Pasino d’Aix. Tout un symbole ! Le changement de statut du service de l’emploi dans une boite de jeu !!!

Nous on continue de dire que ce qui est moderne c’est le service public en réponse aux besoins des chômeurs et que les salariés n’ont pas à être en compétition entre eux.

R.M : Et les Maisons de l’emploi ?

N.R : Ca pourrait paraitre attrayant à priori, une maison où tous les services seraient regroupés ce qui éviterait aux chômeurs d’avoir à courir partout, la réalité est tout autre.
D’abord il n’y aura que 3 maisons par département ce qui limite immédiatement l’intérêt mais surtout il aura un dossier unique du DE ce qui est liberticide. Ces maisons ne sont pas faites pour un meilleur service public, mais pour renforcer les contrôles. C’est d’autant plus grave qu’auront accès aux renseignements privés outre les entreprises privées, les élus locaux qui siégeront obligatoirement dans les CA de ces maisons. On imagine sans peine les dérives que cela peut entrainer et l’usage qu’ils peuvent en faire. Enfin alors que les boites privées sont payées 3000ââ€Å¡¬ (!!!) par accompagnement, les salariés de ces maisons de l’emploi ne seront pas des salariés détachés du service public. Ce serait des précaires chargés de l’insertion durable !!

RM : Quelles conséquences pour les usagers ?

N.R : Mais ca provoque leur colère et cela se comprend



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