Dans la famille Guérini je choisis le frère…

Oui mais lequel ?
dimanche 6 mars 2011
par  Charles Hoareau
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Il fut un temps où le nom de Guérini évoquait à Marseille des liens troubles, entre deux frères (déjà !) Mémé et Antoine, parrains du milieu marseillais et le PS de Gaston Deferre.
Bien qu’il n’y ait parait-il [1] aucun lien de famille entre les frères truands de la période 1945/1970 et les actuels frères Guérini originaires du même village de Corse et qui défraient la chronique on peut se demander si l’histoire n’est pas en train de se répéter.

Les méthodes…

Jour après jour la presse tant nationale que locale n’en finit pas d’évoquer des méthodes de gestion curieusement peu commentées par les autres forces politiques qu’elles soient de droite ou de gauche.

Tour à tour sont évoqués dans un écheveau qui ne cesse d’enfler : des entreprises du BTP, les groupes Suez et Veolia, Eugène Caselli le président PS de la communauté urbaine marseillaise qui a connu récemment une garde à vue, Alain Belviso président ex-PCF de la communauté d’Aubagne qui vient de démissionner suite à sa garde à vue et sa mise en cause dans plusieurs affaires, une entreprise de traitement des déchets, des gérants de maisons de retraite, l’attribution de marchés publics, la gestion de l’office départemental de l’habitat et Jean François Noyes son président élu au Conseil Général et ancien chef de cabinet de Guérini, un truand marseillais, Bernard Barresi retrouvé après 18 ans de cavale et son frère (décidément on a le sens de la fraternité chez ces gens là) Jean Luc… ami de l’élu UMP Renaud Muselier !!

Le frère de Jean Noël le président du CG est en détention provisoire depuis le 2 décembre 2010 pour, (excusez du peu !), blanchiment, abus de biens sociaux, détournements de fonds et de biens publics, recels, corruption active et détention de munitions dans une affaire de fraudes présumées aux marchés publics.

En plus ces affaires viennent s’ajouter à une histoire d’attribution frauduleuse de subventions à des associations marseillaises plus fantômes que réelles et mettant en cause la députée PS Sylvie Andrieux ex conseillère régionale mise en examen [2] ainsi que 22 autres cadres de la région (dont certains placés en détention) et la condamnation à un an ferme pour corruption de Bernard Granié autre président PS d’une communauté de communes des Bouches du Rhône, …n’en jetez plus !

Népotisme, clientélisme, corruption, système mafieux la presse, pièces de l’instruction à l’appui, n’y va pas par 4 chemins et ne fait pas dans la dentelle. Et le président a beau tempêter et menacer de procès en diffamation tous ceux qui passent à sa portée, rien n’y fait.

A vrai dire ces révélations ne sont pas une surprise pour nombre de militants des Bouches du Rhône. Ici même à Rouge Midi nous avions rapporté au travers de l’affaire de la maison de retraite de La Marguerite ou de celle des salarié-e-s d’ADOMA [3] des pratiques de gestion, cautionnées par le Conseil Général, dont les salarié-e-s et le public faisaient les frais et dont le caractère illégal semblait avéré.

Ces méthodes commençaient à jeter le trouble jusque dans les rangs mêmes du PS marseillais. Un militant dans une lettre ouverte à Martine Aubry qualifiant même Guérini de « Ben Ali départemental » : bonjour l’ambiance !
Ce jeudi 3 mars, avec le rendu public du rapport « confidentiel » de Arnaud de Montebourg, [4] le trouble devient on ne peut plus grand. Le rapporteur évoque aussi un système de chantage à la subvention du conseil général choses que tout le monde sait ici et le rôle du cabinet du président du conseil général, "devenu le lieu de contrôle de la vie militante dont l’essentiel de l’activité consiste à s’assurer la fidélité aveugle des responsables de sections ou des cadres fédéraux de notre parti". Pour finir le député demande donc que le président soit démis de ses fonctions de direction…

...les choix…

Si la presse fait aujourd’hui ses choux gras de cette affaire à rebondissements elle parle peu des choix politiques du Conseil Général…si ce n’est pour les défendre allant même jusqu’à parler d’un rôle de « bouclier social » [5] de cette institution. Drôle de formule pour une collectivité dont le syndicat CGT majoritaire parmi les personnels dénonce au contraire le fait que « Depuis deux ans, le recul de la mission de service public n’a fait que s’accélérer au Conseil Général des Bouches du Rhône, servi par une réorganisation de la DGAS (Direction Générale Adjointe de la Solidarité) qui mutualise les manques, organise la pénurie, attaque nos qualifications, privatise nos missions, redéploie le personnel et les tâches.
La politique médico-sociale est sacrifiée à l’introduction de fonctionnements territoriaux autonomes, ne garantissant plus à l’usager une égalité de traitement, aux professionnels une mise en oeuvre commune des missions et une égalité d’application des règles internes de notre collectivité. Les conséquences humaines des choix politiques opérés par la majorité départementale sont désastreuses sur le plan de la prise en charge des enfants et des personnes vulnérables. »

Et le syndicat de rappeler que par un mouvement de grève, le 8 octobre dernier, les personnels « ont à nouveau dénoncé une politique départementale qui ressemble à s’y méprendre à celle du gouvernement, gangrénée par l’obsession de la réduction des coûts sur un des budgets les plus emblématiques du Service Public départemental, celui de la Protection de l’Enfance et des personnes vulnérables. Plus grave, les personnels ont fait part de méthodes de "management" plus que préoccupantes et indignes des valeurs jusqu’alors véhiculées par nos missions. Notre organisation syndicale lutte aujourd’hui contre la déshumanisation des relations employeurs employés, les atteintes fréquentes aux compétences et qualifications, la mise en danger volontaire des agents dans l’exercice de leur mission (protection de l’enfance), la mise en place d’un climat répressif à l’égard des agents avec, paradoxalement, des contrôles accrus de l’activité au plus fort moment de pénurie de personnel, les atteintes aux acquis, à l’activité syndicale, au règlement RTT, et, pour finir, dénonce une pression exercée volontairement sur les personnels précaires. La souffrance au travail n’a jamais été aussi forte dans notre Institution ! »
 [6]

Le syndicat dénonce - et nous partageons son opinion - les 305 précaires des collèges, les délégations de services publics et la sous-traitance de nombre de services (nettoyage, sécurité…), une réduction continue des emplois, un budget opération de communication supérieur au budget d’aide aux associations, les millions dépensés pour la couverture du stade vélodrome ou le tournoi de tennis OPEN13 [7] alors que tant de moyens manquent pour l’aide sociale…

Vous avez dit « bouclier social » ?

Comment dans ces conditions défendre l’idée que la gestion du département des Bouches du Rhône serait aujourd’hui un « bouclier social » pour ses habitant-e-s les plus dans le besoin ?
-  Un bouclier social l’objectif affiché de radiation de 30% de rmistes ?
-  Un bouclier social la mise en place du RSA demandée par ce département, le 1er de France, avant même que la loi ne sorte, et qui a pour conséquence comme nous l’avons montré, tout à la fois de peser négativement sur les salaires, de représenter pour les allocataires une baisse mensuelle de revenus pouvant aller jusqu’à plus de 300€ et de faire porter au contribuable, vous et moi, le poids d’un chômage dont gouvernement et MEDEF sont les seuls responsables ?
-  Un bouclier social cette gestion opaque (c’est le cas de le dire) du logement social où la moitié des appartements sont attribués directement par des élus sans que les locataires ou leurs représentants puissent avoir un droit de regard ?
-  Un bouclier social cette aide alimentaire distribuée, comme le dénonce justement la CGT du Conseil Général, dans des conditions qui ne respectent ni le public dans sa dignité, ni la notion de service public social ?

Que le Conseil Général commence déjà par embaucher les plus de 70 personnels manquants (dont 43 assistantes sociales), titulariser les précaires et inverser ses choix et nous reparlerons ensuite de ce bouclier !

…et le positionnement politique

Nous avons dénoncé ici même, pour ne prendre que deux exemples récents les attaques du président du Conseil Général et d’un certain nombre de barons du PS contre les portuaires en grève et la manifestation anti roms à l’automne 2009.
De même la CGT d’Air France dénonce à juste titre les 7 millions d’euros versés par le CG pour l’aérogare MP2 construite pour les vols low-coast, qui, sous des apparences de trajets à prix attractifs, sont tout à la fois des outils de casse du service public, de remise en cause du droit du travail...et des pompes à subventions d’argent public.

Le Conseil Général n’étant pas une île déserte la question de ses relations avec l’extérieur est posée. A maintes reprises des exemples de la collusion Gaudin/Guérini et de leur accord sur l’essentiel des choix concernant la ville et le département, qu’il s’agisse du programme de rénovation urbaine, d’Euroméditerranée…sont apparues clairement, nous n’y reviendrons donc pas.

Reste la question du positionnement international du conseil général et des élus socialistes locaux. Jocelyn Zeitoun conseiller général et régional, celui-là même qui expliqua un jour à l’Express qu’il était élu pour « défendre en priorité les intérêts de sa communauté » (sans se faire traiter de communautariste lui !) et déclara [8] "Tsahal n’est pas une armée d’occupation, mais un instrument à disposition de la démocratie" est le président de l’ABSI, l’association pour le bien être du soldat israélien. Il n’est pas seul. Marseille est une des rares villes de France, peut être même la seule, à avoir eu le triste privilège d’une manifestation de soutien à Israël, emmenée par les élus socialistes locaux, en pleins massacres de Gaza. Encore récemment Jean Noël Guérini s’est rendu en Israël, (à peu de temps d’intervalle d’élus d’extrême droite européens !) pour dire tout son soutien à cet état.

Et on pourrait parler du Maghreb. Vincent Geisser, [9] rappelle que « les collectivités locales, que ce soit la région, le conseil général des Bouches-du-Rhône ou la mairie de Marseille, collaboraient très étroitement avec la Tunisie. (…) Le président du conseil général Jean-Noël Guérini avait lui insisté pour que le parti quasi-unique de Ben Ali ne soit pas exclu de l’Internationale socialiste. »

La question qui est posée pour le conseil général des Bouches du Rhône n’est pas de savoir si les Guérini auraient un autre frère ou membre de leur famille aux méthodes plus acceptables, mais d’avoir d’autres choix que ceux de la majorité départementale actuelle.
C’est ce qui fait dire – et ils sont les seuls – aux candidats que Rouge Vif 13 présente à Marseille dans le canton de St Barthélémy : « communistes nous ne rejoindrons pas la majorité départementale. »

Dans la famille Guérini ils ne choisissent personne.


[1du moins c’est ce que Jean Noël et Alex jurent par leurs grands dieux

[2Déjà lors des législatives de 2002 où Rouge Vif 13 se présentait nous avions dénoncé des pratiques clientélistes en direction d’associations clairement identifiées

[3une plainte au pénal est d’ailleurs en cours d’instruction dans cette affaire et le brigade financière a été saisie de faits mêlant là aussi institutions, entreprises, pouvoir politique et attribution de marchés publics

[4et le rappel du rapport Bodin.

[5l’Humanité reprenant d’ailleurs par là un thème mis en avant par nombre de candidats Front de Gauche

[6Journal CGT de décembre 2010

[7où le directeur du tournoi, l’ancien joueur de tennis Jean François Caujolle, mis en garde à vue en avril 2010 et poursuivi lui pour irrégularités fiscales, a trouvé du travail dans ce fameux tournoi à sa femme, ses deux filles et son frère : encore un qui a le sens de la famille…

[804/03/04 dans une interview à L’Humanité

[9politologue et sociologue à l’Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et musulman à Aix-Marseille I



Documents joints

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Rapport Montebourg
Rapport Bodin

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lundi 7 mars 2011 à 01h11 - par  Charles Hoareau
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lundi 7 mars 2011 à 00h52 - par  Vincent

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