L’affaire Guérini sur Mediapart

mercredi 9 mars 2011
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L’évolution de l’affaire Guérini est suivie de près par Mediapart, qui lui a consacré plusieurs articles. Dans l’édition du 8 mars 20011, sous le titre « L’affaire Guérini empoisonne la gauche jusqu’à son Front », Stéphane Alliès nous livre, une analyse qui ne manquera pas d’intérêt pour nos lecteurs.

La rue de Solférino pensait pouvoir continuer de regarder ailleurs dans l’affaire Guérini. Las, l’attitude à observer semble désormais empoisonner toute la gauche. Au PS, après les dénégations initiales de la direction socialiste qui ont suivi la publication du rapport d’Arnaud Montebourg, le ton est dorénavant à la prise de position pour le moins embarrassée. Tout comme au Front de
gauche.

Durant le week-end, plusieurs ténors socialistes sont (enfin) sortis de leur mutisme, pour demander que lumière soit faite autour de la gouvernance de la fédération PS des Bouches-du-Rhône. Ainsi l’eurodéputé Stéphane Le Foll (ancien directeur de cabinet de François Hollande, à la tête d’un PS largement soutenu par Guérini en son temps) ou Ségolène Royal, qui a su profiter des
suffrages bucco-rhodaniens lors de la primaire socialiste de 2006
ou du dernier congrès de Reims en 2008, ont exprimé leurs inquiétudes
face au contenu du rapport. De son côté, le président du groupe PS à l’Assemblée nationale, Jean-Marc Ayrault, a demandé la nomination d’un « collège indépendant » pour enquêter sur les accusations de Montebourg (et les recouper), qui demande la mise sous tutelle de la fédération.

Dès lundi au petit matin, le député de Saône-et-Loire et candidat à la primaire socialiste a publié sur son blog une lettre ouverte à Martine Aubry, où il maintient, voire durcit, ses dires, se faisant
plus critique encore vis-à-vis des réactions de « collaborateurs zélés
 » de la première secrétaire (François Lamy sur Mediapart ou
Harlem Désir sur RTL, par exemple). Peu après, le porte-parole
du PS Benoît Hamon a annoncé, lors de son point presse hebdomadaire,
la création d’une commission d’enquête qui se rendra
dans les Bouches-du-Rhône et communiquera ses conclusions
« avant l’été » . Une commission mise en place... à la demande de
Jean-Noël Guérini.

Dans le même temps, lors d’une conférence de presse du Front de
gauche, l’ancien socialiste Jean-Luc Mélenchon (qui ne cache pas
que Jean-Noël Guérini était « un bon copain » au Sénat) exprimait
déjà ses doutes sur ladite commission : « On sait déjà ce qui va se
passer, ils vont inspecter leur fédé, et on découvrira que tout est
en ordre, car d’ici là tout sera fait pour que tout soit en ordre ? »

Connaisseur du socialisme des Bouches-du-Rhône, comme tout
leader du PS durant ces dix dernières années, le héraut du « Qu’ils
s’en aillent tous ! »
semble pourtant et étonnamment plus mesuré
sur le sujet.

Les communistes voteront-ils Guérini ?

Interrogé par Mediapart sur le « sujet Guérini » à la fin de leur
conférence de presse, les deux leaders du Front de gauche n’ont
pas fait preuve d’une franche témérité. « Ça ne fait les affaires de
personne et, ajouté au procès Chirac, ça va faire un maximum de
dégâts ,
redoute Mélenchon. Dans cette histoire, nous allons de
stupeur en stupeur, en regardant des imputations entre socialistes
qui se frappent entre eux. On va les laisser se débrouiller avec ça,
ce n’est pas notre problème. »

Mais en off, le même Mélenchon s’avère intarissable et confirme
par moult anecdotes et imitations les accusations de Montebourg,
notamment celles sur les menaces physiques et le clientélisme à
haute échelle. Malgré nos relances insistantes, il se contente de lâcher : « Si jamais nous avons un élu du Parti de gauche au conseil
général, croyez-bien qu’il se tiendra à distance de tout ça et qu’il
ne votera pas Guérini. »
Car le problème est là, et Mélenchon
en est bien conscient : dans la majorité de Guérini, on retrouve
ses alliés communistes. Et ces derniers pourraient sans rechigner
glisser un bulletin Guérini dans l’urne, au moment de réélire le
président du conseil général des Bouches-du-Rhône, une fois les
cantonales passées.

Il n’y a même pas besoin d’évoquer la récente démission du PCF
Alain Belviso de la présidence de la communauté d’agglomération
d’Aubagne, alors qu’il est inquiété par l’enquête judiciaire
sur Alexandre Guérini), pour voir le secrétaire national du
PCF, Pierre Laurent, abandonner son habituelle placidité. Après
avoir esquivé la question, il finit par lâcher : « Ce sont des règlements
de comptes en tous sens. Que la justice fasse son travail !
Montebourg, comme Vichnievsky, sont des chevaliers blancs qui
alimentent le ?tous pourris ?, et tout ça fait le jeu du Front national. »

A la question du vote des élus PCF locaux pour réélire
Guérini, Laurent tourne les talons et disparaît.

De leur côté, les écologistes ont choisi le camp de la dénonciation
sans états d’âme du système Guérini. Eva Joly et Laurence Vichnievsky
ont ainsi appelé, lors d’un meeting jeudi à Marseille, le
PS à « faire le ménage dès maintenant » . Mais l’éthique en politique
ne semble pas pour l’instant en mesure d’être l’un des piliers
d’un éventuel programme commun de la gauche à la future présidentielle.

Stéphane Alliès
Mediapart 8 mars 2011



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