Une longue tradition coloniale

dimanche 10 avril 2011
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Un cri de colère de Jay Janson* qui rappelle les crimes commis par la France au nom de l’humanisme et de la civilisation. Un cri juste et qui pour autant n’est pas un blanc-seing accordé au tyran libyen.

Les armes françaises de haute technologie qui tuent des Libyens par humanisme désintéressé, nous rappellent les massacres français perpétrés de 1954 à 1960 en Algérie, à une distance de seulement quelques kilomètres de l’endroit où les Français tuent depuis samedi dernier.

Le Mirage, ce magnifique avion de combat français aux lignes pures mais à la puissance mortelle qui largue des missiles pour imposer une « zone d’exclusion aérienne » à l’allure inoffensive, rappelle aux Arabes les avions meurtriers utilisés contre la population civile arabe du protectorat français de la Syrie.

Les Français qui bombardent fièrement « par mesure de protection » l’Afrique du Nord qu’ils ont jadis possédée et exploitée, nous rappellent le triple génocide en Indochine française. Le premier pendant l’occupation brutale et raciste du Vietnam, du Laos et du Cambodge ; le second quand l’armée coloniale de Vichy qui gérait les colonies de l’armée impériale japonaise a prêté son concours à la confiscation du riz pour l’exporter au Japon laissant un million de Vietnamiens mourir de faim ; le troisième, quand les troupes françaises, arrivées au Vietnam sur des navires étasuniens presque tout de suite après les joyeuses célébrations de la libération de l’occupation nazie dans les rues Paris, ont passé huit ans à assassiner des Vietnamiens.

On peut aussi se rendre compte du manque d’humanité passé de la France si on se rappelle la triste histoire des cinq génocides français perpétrés en Haïti. Le premier en réduisant les Africains à l’esclavage ; le second en les faisant travailler jusqu’à ce que mort s’ensuive en Haïti pour enrichir la France ; le troisième, en réprimant la rébellion des esclaves d’Haïti ; le quatrième en exigeant de Haïti des réparations financières qui ont coûté beaucoup de vies ; et le cinquième, en refusant de rendre à Haïti les sommes exorbitantes qui leur ont été extorquées alors que le pays a été détruit par un tremblement de terre, et souffre de la pauvreté, de l’exploitation des USA et de l’occupation étrangère.

La France opportuniste, CNN et la CIA ont encouragé et soutenu la rébellion de l’est de la Libye qui, jusqu’en 1951, a eu une histoire séparée sous le nom de Cyrénaïque et la France a amené d’autres parangons d’hégémonie politique vertueuse à brandir la démocratie comme étant le droit légitime de ceux qui se rebellent en Libye.

Mais la démocratie, et ce qui est plus important encore, la liberté, a été pendant des siècles refusée à la population non blanche du globe.

Les milliards d’être humains qui ne sont pas blancs, qui étaient autrefois occupés par un pouvoir colonial et sont aujourd’hui encore exploités par des puissances néocoloniales, se souviennent que les Français et les Anglais, tout en pratiquant orgueilleusement la démocratie parlementaire chez eux, refusaient à la pointe du fusil toute espèce de démocratie et de liberté aux millions de sujets qu’ils colonisaient.

Pour quasiment toute la planète, il est évident que ce sont les dépôts de pétrole de la Libye qui ont besoin d’être libérés du contrôle africain. Libérer l’Afrique de ses richesses, voilà ce qui a toujours motivé l’intervention armée des nations industrialisées et déshumanisées.

Contrôler leurs propre richesse pétrolifères a permis aux Libyens et à leurs voisins algériens, de jouir du plus haut niveau de vie de l’Afrique. (L’Afrique du Sud est plus riche mais les inégalités sont plus grandes).

Effectivement si Kadhafi s’attire les foudres des puissances impérialistes c’est bien parce que celles-ci ne lui ont jamais pardonné d’avoir nationalisé le pétrole libyen. C’est avant tout ce qui explique que les mêmes comportements dictatoriaux en Arabie Saoudite ou a Bahrein n’entraine pas le même comportement chez les puissances occidentales. [1]

Pour autant cette question de la répartition des richesses se pose dans tous les pays arabes et est à l’origine, au même titre que les libertés, des mouvements en cours en Algérie, en Libye et ailleurs. Dans ce dernier pays, si on en croit l’écrivain libyen Ramadan Jarbou, 1/10 de la population s’accapare 9/10 des richesses...NDR

Il n’y a pas grand monde que la France et les autres puissances néocoloniales actuelles (qui se trouvent toutes être blanches) parviennent à tromper aujourd’hui.

C’est le pétrole libyen qu’il faut libérer du contrôle africain. Et les objectifs humanitaires ne sont que le prétexte à cette « libération ».

Sur un territoire grand comme 3 fois la France, la Libye ou Jamahiriya fédère 3 grandes régions : la Cyrénaïque, la Tripolitaine et le Fezzan. En 1934, l’Italie a adopté le nom « Libye » (utilisé par les anciens Grecs pour toute l’Afrique du nord sauf l’Egypte) pour ses colonies de la Cyrénaïque italienne et de la Tripolitaine italienne, les deux ayant été dirigées par des gouverneurs italiens différents. L’Italie avait pris les deux aux Turcs ottomans en 1911. De 1943 à 1951, la Tripolitaine et la Cyrénaïque ont été administrées par les Britanniques pendant que les Français contrôlaient Fezzan et les USA détenaient la grande base aérienne de Wheelus.

Par Jay Janson le 05/04/2011

Paru sur Info-Palestine sous le titre : La France, boucher raciste de Haïti, du Vietnam, de la Syrie, de l’Algérie est le premier pays à bombarder la Libye

Traduction : D. Muselet

Transmis par Linsay


* Jay Janson a passé huit ans comme chef d’orchestre assistant de l’orchestre symphonique du Vietnam à Hanoi et a fait des tournées dans le pays, y compris avec Dan Tai-son qui répétait dans un abri anti-bombes.
L’orchestre a été fondé par Ho Chi Minh et il a donné la plupart de ses concerts à l’Opéra qui est une copie de l’Opéra de Paris en plus petit. En 1945 notre allié Ho, flanqué d’un major étasunien et d’un colonel anglais, a déclaré l’indépendance du Vietnam d’un balcon qui dominait la grande place. Tout le monde dans l’orchestre a perdu un membre de sa famille « tué par les américains » comme ils disent sobrement suivant l’habitude bouddhiste de ne pas porter d’accusation.


[1Mohamed Hassan spécialiste de la géopolitique et du monde arabe né à Addis Abeba (Ethiopie), auteur de plusieurs ouvrages et articles pour le site Investig’action, raconte que dans les années 50, une blague circulait à la Maison Blanche, au sein de l’administration Eisenhower qui se développa ensuite en véritable théorie politique sous Reagan. Comment distinguer les bons des mauvais Arabes ?

Un bon Arabe fait ce que les Etats-Unis lui disent.
En échange, il reçoit des avions, est autorisé à déposer son argent en Suisse, est invité à Washington, etc. Eisenhower et Reagan nommaient ces bons Arabes : les rois d’Arabie Saoudite et de Jordanie, les cheikhs et émirs du Koweït et du Golfe, le Shah d’Iran, le roi du Maroc et bien-sûr, le roi Idriss de Libye. Les mauvais Arabes ? Ceux qui n’obéissaient pas à Washington : Nasser, Kadhafi, Saddam plus tard…



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