Luc Ferry . La morale dans les chaussettes.

samedi 11 juin 2011
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Après ses sorties inconsidérées sur un ex-ministre qui « se serait fait poisser avec des petits garçons à Marrakech », le philosophe est de très mauvaise rumeur

Il a appelé Raffarin le jeudi de l’Ascension, quatre jours après sa grande tirade sur Canal Plus :

« Désolé que ça te retombe dessus. »

A part ça, pas de regrets.

Luc Ferry ne retire rien de son flamboyant témoignage sur l’homme qui aurait entendu l’homme qui aurait vu « un ancien ministre » se faire « poisser avec des petits garçons à Marrakech ».

Histoire que lui aurait racontée au moins sept ans plus tôt un « ancien Premier ministre » -Raffarin, donc, ou un autre.

Chez Ferry, la précision, les preuves et les noms ne sont pas une spécialité maison.

Mais pas de regrets.

"C’est son côté entêté.

Il était déjà comme ça quand il était ministre", soupire le député UMP Jean-François Lamour, ancien ministre des Sports de Raffarin.

« C’est son côté prof, dit un autre, il veut toujours avoir raison ».

Car Luc Ferry est prof de fac.

Rémunéré 4 500 euros net par l’université Paris-VII, il n’y met jamais les pieds .

Il a plus lucratif à faire.

Des bouquins, notamment.

Beaucoup sont des best-sellers, à part le dernier, son « autobiographie intellectuelle » (sic), qui n’a bizarrement intéressé que 6 000 acheteurs.

Ferry y raconte son enfance bohème et sans un rond, auprès d’un père mécano de génie et coureur automobile et d’une mère toujours un bouquin à la main.

Mais les choses de l’esprit ne nourrissent pas son homme, surtout quand il a une Jaguar à décapoter et une Marie-Caroline née Becq de Fouquières comme épouse.

Luc Ferry sera donc philosophe, mais célèbre et avec des pépettes.

Heidegger dans une main, le carnet mondain dans l’autre : Villepin, le couple Orban, Marek Halter...et les frères Bogdanoff, avec qui le couple Ferry passe chaque Nouvel An.

« Ils sont très sympas et désintéressés », assure notre prix de vertu.

Avant de moraliser à la télé , Ferry a parfait son enseignement à Heidelberg, la Sorbonne allemande.

Débuts brillants : il passe l’agrégation de philo, traduit par Kant.

Dézingue la pensée soixante-huitarde.

Se fait traîter de « petit con » par Bourdieu.

La gloire.

Son dernier succès en date, « La Révolution de l’amour », s’est vendu à 46 000 exemplaires, un complément de salaire.

La vedette Ferry chronique aussi dans « Le Figaro » - près de 1 500 euros l’article - et sur LCI.

Et multiplie les conférences.

Car, si notre grand philosophe oublie de disserter à la fac, il répand ses lumières un peu partout ailleurs, dans des temples de la pensée comme la chambre de commerce du Havre ou le Royal-Thalasso de La Baule.

Tarif : « 6 500 euros net pour lui », raconte un organisateur qui l’a invité en février à Chambéry.

Et, pour les vacances, il y a « les croisières philosophiques » du voyagiste Intermèdes, qui balade en Méditerranée tout ce que la philosophie compte de vedettes vues à la télé, de Comte-Sponville à Pascal Bruckner.

Croisières gratos en échange d’une conférence dopée aux UV.

« Normalement, l’invité vient juste avec son conjoint, mais Ferry, lui, débarque avec toute sa smala : sa femme, sa fille, sa belle-soeur, les enfants de sa belle-soeur. Ils sont sept ou huit ! » rigole un habitué.

C’est beau comme un raisonnement philosophique :

« Plus il passe à la télé, plus ses bouquins se vendent et plus il peut donner des conférences », explique une de ses anciennes éditrices.

« Mais à force de faire le malin sur les plateaux il a dérapé et s’est cru dans son salon ».

Chirac, déjà, le traitait de « salopard » et ne pouvait pas le piffer.

En 1993, Bayrou le nomme président du Conseil national des programmes.

Ferry y reste au chaud jusqu’en 2002, quand Raffarin le bombarde ministre de l’Education :

« C’était son Jack Lang à lui, ça lui donnait un vernis intellectuel et mondain », susurre un ancien ministre.

Ambiance pipole et bling-bling avant l’heure.

Au ministère, Marie-Caroline, « Matao » pour les intimes, fait installer une salle de fitness, gronde le directeur de cabinet comme un petit garçon, raconte chez Drucker que son mari mange des amandes au lit.

A Matignon, on frémit :

« C’était toujours vaguement ridicule », se souvient un conseiller de Raffarin.

Le ministre Ferry est à peine moins gaffeur.

En pleine loi sur le voile à l’école, il suggère aux sikhs de remplacer leur turban par un discret « filet invisible ».

Balance à l’Assemblée que le port du bandana ou de la barbe pourrait bien tomber « sous le coup de la loi ».

Poilade générale.

Chirac se frappe le front :

« Ce type a le sens politique d’une huître ».

Ejectée du gouvernement, l’huître est recasée au Conseil d’analyse de la société, un machin qui dépend de Matignon et pond des rapports.

Ferry le préside toujours, pour 1 800 euros par mois.

Placard trop étroit pour notre grand penseur :

« Il ne s’est pas remis d’avoir été éjecté des sommets, daube un ancien ministre. du coup,il n’en finit pas de la ramener sur son passage au gouvernement ».

En décembre, pendant l’émission d’Anne Roumanoff sur Europe 1, Ferry se marrait en racontant qu’en Conseil des ministres « on ne fait rien, on regarde les mouches voler ».

Provoc à deux sous, coupée au montage.

« Le grand journal », lui, était en direct...

Par Isabelle Barré dans Le Canard enchaîné du 08/06/2011

Transmis par Linsay



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