Edouard Courtial : l’oiseau migrateur.

lundi 12 décembre 2011
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Après David Douillet, le député de l’Oise devenu sous-ministre joue l’agent électoral de Sarko . Ce disciple d’Hortefeux part à la pêche aux voix des Français expatriés, mais, s’il prend beaucoup l’avion, il n’est pas très aérien.

Il rentre à peine de sa dernière virée en Amérique du Sud.

Du 30 novembre au 4 décembre, l’inconnu du gouvernement, Edouard Courtial, était en voyage officiel à Montevideo, Buenos Aires, Santiago du Chili...

Pour l’occasion, le secrétaire d’Etat a emmené dans ses bagages... sa femme Carole, qui l’accompagnait dans cette harassante visite des vignobles chiliens ou de la maison du poète Pablo Neruda.

Vol régulier en business class pour le couple, flanqué d’un officier de sécurité et de deux conseillers.

Mais , jure son cabinet au « Canard », le secrétaire d’Etat a payé « sur ses deniers » le billet de madame.

Il ne faudrait pas jouer totalement les touristes aux frais de l’Etat.

A vot’
bon coeur.

Depuis le 28 septembre, le poupin Courtial, 38 printemps, fait le tour du monde comme secrétaire d’Etat aux Français de l’étranger.

Un boulot sorti de nulle part, ou plutôt du ciboulot de Sarkozy, qui a eu cette grande idée au printemps : « représenter » les quelques 2,5 millions de Français expatriés pour ratisser leurs voix en vue des prochaines élections, présidentielle et législatives.

Car - autre idée de génie de Sarko - onze nouveaux députés représenteront ces Français de l’étranger.

Avec neuf circonscriptions quasi acquises à la droite...

Pour faire la retape, l’ovni David Douillet a d’abord occupé le poste pendant trois mois.

Puis notre tataministre est parti faire chauffer ses neurones aux Sports.

Pour le remplacer, Sarko a choisi un autre colosse de la politique :bébé Courtial mesure 1, 97 m au garrot.

Sûrement la hauteur de vue nécessaire à la fonction...

Ce poulain d’Hortefeux, député de l’Oise et benjamin de l’Assemblée en 2002, piallait depuis deux ans à la porte du gouvernement.

En cirant les sabots de Brice, « mon ministre préféré », et de Copé, « un manageur qui sait rassembler ».

Bombardé secrétaire aux fédérations à l’UMP, il y grenouille auprès de Sarko et décroche sa timbale gouvernementale.

Ou plutôt un bob d’agent électoral.

Sitôt nommé, Courtial file à l’Ile Maurice, où l’attend une incontournable commission de l’océan indien.

Puis enchaîne à la vitesse du coyote des dessins animés : Oslo, Berlin, Séoul, Singapour, Haïti, New York, Boston...

Une vingtaine d’escales en deux mois.

« Ce type-là va nous coûter 2 à 3 millions », estime le député PS René Dosière, qui prépare un livre sur le coût des ministères.

Un calcul à la louche, fondé sur le coût d’un secrétariat d’Etat à la Coopération, faute de mieux.

Dans les annexes (les « jaunes budgétaires ») de la loi de finances 2012, seul apparaît le total des salaires et indemnités versés à Courtial et à son cabinet :
770 000 euros.

S’y ajoutent les frais de fonctionnement, de chauffeur et les voyages en classe affaires. Mais ces menues dépenses sont savamment noyées dans le budget global du Quai d’Orsay. Car notre globe-trotter n’a pas d’administration propre.

Juste un décret d’attribution pour la galerie :

« M. Edouard Courtial connaît de toutes les affaires concernant les Français de l’étranger (sic) ».

Le PS s’en étrangle :
« Il fait uniquement campagne au frais de l’Etat », s’étouffe Dosière.

« Les consulats sont très embêtés, souffle un diplomate. D’un côté, on baisse les budgets des consulats de 30%. De l’autre, on voit débarquer ce type qui nous réclame d’organiser une réception pour les expatriés, qui sont très sensibles aux invitations à l’ambassade... ».

Campagne oblige, tournée mondiale de petits-fours !.

« C’est le mélange des genres total, raconte un conseiller qui a eu l’honneur d’accueillir Courtial lors de sa tournée américaine. A midi, c’était cocktail avec la communauté française, et, le soir, dîner dans un grand restaurant avec des relais UMP ».

A part ça, rien de « partisan » dans ces virées : « M. Courtial reste neutre dans ses discours », défend son cabinet.

A New York, le 15 novembre, il a juste vanté les mérites de Sarko, en toute neutralité :

« Sur le plan international, la libération de la Libye est un grand succès du président de la République ».

Avant de battre le rappel des troupes :

« Pour la première fois dans l’histoire de la République, vous, les 2 millions de Français vivant hors de France, pourrez élire 11 députés.C’est la réalisation d’une promesse de campagne du président de la République ». Merci qui ?.

L’Edouard dans le nez.

Le VRP Douillet avait fait encore plus fort.

En Italie, il avait emmené avec lui Valérie Hoffenberg, candidate UMP aux législatives pour la future circonscription... Italie-Grèce-Israël « C’est une rupture d’égalité inadmissible, bondit Arnaud Leroy, candidat PS dans la zone Espagne-Portugal. Comment faire le poids face à un secrétaire d’Etat qui voyage à l’oeil, balade ses candidats UMP et envoie des invitations floquées ?. »

A Kinshasa, les expat’ faisaient la queue pour être photographiés avec la star Douillet.

Le casting Courtial, lui, a été plus hasardeux...A l’Assemblée, le bébé député présidait le considérable groupe Jardins et horticulture. Sans trop labourer les travées : zéro rapport, zéro intervention en commission.

Juste une marotte : remplacer l’allocation de rentrée scolaire par un « bon d’achat » pour éviter que les familles ne s’en servent pour acheter « un écran plasma ».

« Même Morano trouve ça démago, c’est dire, soupire un député UMP. Courtial suit le sens du vent. Encore faut-il savoir le renifler... ».

N’écoutant que son pif, cet auditeur financier passé par Ernst & Young a cosigné, juste avant d’entrer au gouvernement une épatante proposition de loi visant à déchoir de leur nationalité.... « les citoyens installés fiscalement à l’étranger ».

Une déclaration de guerre à tous les expatriés !.

« Sarko n’aurait pas pu trouver pire », daube un élu UMP des Français de l’étranger.

Sitôt nommé, notre gaffeur a sorti l’encre magique et fait effacer- du jamais-vu ! - son nom de la proposition de loi. « Le secrétaire d’Etat que je suis désormais regrette que le député que j’étais (sic) ait signé cette proposition », répète aujourd’hui notre grand contrit.

Mais ce géant encore un peu vert reste droit dans ses bottes de maire d’Agnetz, 3 000 âmes, dans l’Oise.

Sur France 3 Région (26/3), le sagace Courtial, grand amateur de tête de veau, livrait sa profonde devise :

« Bien faire et laisser braire ».

Ou braire et laisser faire...

Par Isabelle Barré dans Le Canard enchaîné du 07/12/2011

Transmis par Linsay



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