Kyoto : l’opposition canadienne dénonce les « mensonges » du gouvernement

lundi 19 décembre 2011
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« Mensonge », « mauvaise foi », « condamnation à mort », ou encore « permis de polluer ». L’annonce par le ministre de l’environnement Peter Kent de la sortie du Canada du protocole de Kyoto suscite de très vives réactions du côté de l’opposition canadienne, comme de celui des associations environnementales du pays.

Ainsi selon le quotidien Le Devoir, la députée Megan Leslie, porte-parole du Nouveau Parti démocratique, chargé de l’environnement, a assuré que « ce qui se passe en réalité, c’est que notre gouvernement se soustrait à ses obligations internationales. Nous sommes comme un enfant qui ne réussit pas en classe, et qui préfère abandonner l’école avant que les mauvaises notes n’arrivent ». Cette dernière fait référence au risque de lourdes pénalités, autour de 14 milliards de dollars, invoqué par Peter Kent pour justifier sa décision.

« J’ai l’impression que les conservateurs ont fait cette annonce avec jubilation, en se frottant les mains. C’est quelque chose qu’ils voulaient faire depuis des années, mais ils ne le pouvaient pas en contexte de gouvernement minoritaire. Maintenant qu’ils ont une majorité, ils peuvent, mais ils n’ont pas battu campagne là-dessus (...). Cela ne faisait pas partie du contrat quand les électeurs sont allés aux urnes », a-t-elle poursuivi.

14 MILLIARDS, UN CHIFFRE CONTROVERSÉ

La critique se fait encore plus violente dans la bouche de la dirigeante du Parti vert, Elizabeth May qui dénonce elle aussi les arguments financiers de M. Kent. Le chiffre de 14 milliards de dollars de pénalité est « un grand mensonge », explique-t-elle. « C’est tragique. Quand je pense à quel point dure a été la lutte pour faire ratifier Kyoto, ce que cela signifiait. Quand je pense ce que cela a pris à la Chambre des communes pour ignorer les objections de l’Alberta, ignorer les objections de George W. Bush. Que le Canada ratifie Kyoto, c’était énorme. »

Selon le quotidien Le Devoir, qui a fait ses propres calculs, si le Canada était resté dans le protocole de Kyoto, et compte tenu des prévisions d’émissions supplémentaires de gaz à effet de serre, le pays aurait eu à payer « des pénalités financières oscillant de 10,3 à 18,7 milliards de dollars ».

Critiqué par Peter Kent pour avoir signé le protocole de Kyoto en 1997, le Parti libéral a réagi par la voix de l’ancien ministre de l’environnement Stéphane Dion sur Radio Canada : « C’est une blague totale ! Un pays qui manque sa cible n’a aucune pénalité financière sous Kyoto. Il doit simplement renégocier une cible en conséquence. C’est ce que prévoit le protocole. » C’est d’ailleurs, à peu de mots près, le propos d’un professeur de la School Business d’Alberta, Andrew Leach, cité par le Globe and Mail. Le député fédéral a ajouté que « le gouvernement Harper manque de bonne foi envers le monde, autant qu’il a manqué de bonne foi envers les Canadiens. Il aurait dû annoncer la couleur avant d’aller à Durban. Il le fait après. C’est doublement insultant. »

Pour d’autres, la décision du gouvernement canadien revient à donner un permis de polluer aux industriels. Le député néo-démocrate Alexandre Boulerice déplore ainsi dans La Presse que « M. Kent vient d’acheter du temps pour les pollueurs du Canada et pour les grandes compagnies pétrolières des sables bitumineux de l’Ouest ». L’exploitation de ces réserves de pétrole est régulièrement dénoncée par les associations écologistes qui y voient, à l’instar de Greenpeace Canada, une « catastrophe écologique mondiale ».

LE CANADA « RETARDATAIRECIDIVISTE »

Du côté des associations, la déception est aussi très grande. « En sortant de Kyoto, le gouvernement Harper vient de condamner à mort les populations les plus vulnérables du monde », a ainsi réagi Mike Hudema, de Greenpeace Canada, dans le quotidien The Star. « La décision de quitter Kyoto déstabilise la promesse d’une action contre le changement climatique. C’est la preuve que ce gouvernement préfère protéger les pollueurs plutôt que les populations. »

Equiterre, une ONG québecoise de défense de l’environnement, déplore pour sa part l’attitude négative du gouvernement canadien. « C’est navrant de constater la mauvaise foi avec laquelle le gouvernement conservateur a participé dans les dernières rencontres internationales sur le climat, visant toujours à faire dérailler une reconduite du protocole de Kyoto », a ainsi regretté un porte-parole de l’ONG, Steven Guilbeault, dans une déclaration reprise par La Presse.

Cité par Le Devoir, la présidente nationale de l’association citoyenne du Conseil des Canadiens, Maude Barlow, a elle aussi critiqué cette décision. Selon elle,« le gouvernement Harper a transformé le Canada en retardataire récidiviste sur le problème le plus pressant de notre époque, la lutte contre le changement climatique. Cela ne peut que nuire gravement à notre réputation internationale ».

Source Le Monde.fr le 13/12/2011

Transmis par Linsay



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