A la plage avec les Fralib

lundi 16 avril 2012
par  Charles Hoareau
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Samedi 14 avril...

Rendez-vous 13h 30 Rond point du Prado
Pour un lieu de rendez vous c’était vraiment inhabituel. Les quelques fois que l’on se donne rendez-vous avec les fralibiens dans ces quartiers c’est un peu plus haut, Prado Périer pour aller secouer les puces de la DIRECCTE (ancienne Direction du Travail). Mais là, meeting du Front de gauche oblige, c’est le point de départ.

Dans les jours qui ont précédé le 14 avril, les hésitations et les contrordres n’ont pas manqué. Il y a eu l’épisode Gaudin voulant interdire le rassemblement, puis le Front de gauche qui avait riposté en disant on fera une manif, puis le rassemblement qui avait été autorisé mais pas la manif…les fralibiens eux n’ont pas hésité : « On manifestera » avaient-ils dit. Donc on a manifesté…

Au Rond Point on se cherche, je vois 4 tee-shirts blancs marqués de leur slogan bleu et que tout le monde connait ici. Nous voilà partis à remonter la foule qui commence à arriver pour rejoindre ceux qui sont devant avec leur banderole et leurs pancartes affichant un gros 565 jours que l’on repère de loin.
Comme à la Bastille les fralib sont en tête de manif.

Daniel, un ancien de La Ciotat que je n’avais plus vu depuis longtemps m’arrête avec un immense sourire : « ça fait du bien ! Il y a vraiment une dynamique ! On en avait besoin ». Embrassades rapides, on poursuit notre marche et on se retrouve au milieu de la forêt de pancartes et sous la pluie de gros confettis appelant au boycott de Lipton.

Peur d’être en retard ? Impatience ? Consignes de l’organisation ? En tous cas le Prado, cette avenue des banques et de la bourgeoisie qui d’ordinaire ne voit comme seule manif que la défilé du carnaval, est descendu à une vitesse qui nous fait plus penser à de la marche sportive qu’à une ballade de flâneurs…

Nous voilà arrivés à David, nom que l’on donne à ce carrefour entre le Prado et la corniche et dominé par une grande réplique de la statue de Michel Ange. Pour l’heure elle est décorée de rouge de la tête aux pieds, ce qui lui donne un air pudique !

Nous voilà enfin au pied de la scène. DVD, Tee shirts, tracts, pétitions, le stand Fralib nous attend.
Sur scène orchestre, vidéo sur la dette, Clémentine Autain, Pierre Laurent et Jean Luc Mélenchon se succèdent.

Quand Mélenchon entame son discours en parlant de cette Méditerranée que des hommes et des femmes ont été obligés pour survivre de traverser en laissant derrière eux et au prix de leurs souffrances leur famille, leurs amis, leur terre pour être ici si mal accueillis, quand il dit qu’il réfute le choc des civilisations ou déclare que la France n’est pas une nation occidentale à la remorque des Etats Unis, quand il dit qu’il n’y a pas d’avenir pour la France sans les arabes et les berbères, quand il parle des arabes qui au temps barbare des croisades ont protégé et développé la médecine, les mathématiques, la médecine, cela va droit au cœur des habitantes et habitants de cette porte de l’Afrique qu’a toujours été la cité phocéenne.

Le discours se poursuit et à intervalles réguliers les commentaires fusent. Il y a bien sûr les farceurs, (mais aussi empreints de fierté d’une reconnaissance enfin exprimée) du style de ceux de Omar ou Rim « Tu as vu les arabes tout ce qu’ils t’ont apporté ? Ecoute bien raciste !! » Il y a aussi, au fur et à mesure les commentaires qui vont bien au-delà du discours mais portent sur le mouvement en cours et ses suites.

Quand il parle du rôle déterminant de la classe ouvrière il en est pour souligner : « ces mots qui avaient disparu des discours et qui réapparaissent dans la bouche d’un socialiste ! ». Les échanges se poursuivent : « C’est sûr que pour nous la question de l’Europe c’est une question importante mais on les bougera sur ce point là. » Un autre « quel que soit le résultat il faudra continuer la lutte et pas que pour l’usine ». De temps à autre passe un manifestant qui vient acheter un des objets de soutien à la lutte ou s’inscrire au comité de surveillance.

On croise des compagnons et compagnes de combats et c’est chaque fois le mot lutte qui est au centre des débats. Comme si nous n’étions pas venus à un meeting électoral mais pour nous compter, nous rassembler nous qui sommes en « résistance » comme crie régulièrement la foule. Il est significatif d’ailleurs que c’est ce slogan et le fameux « tous ensemble » des manifs qui occupent l’espace et non Mélenchon président.

Les plus anciens évoquent 1981 et les désillusions qui s’en suivirent tout en prenant en compte qu’aujourd’hui cela n’est pas comparable car le peuple est mobilisé. D’autres méfiants font observer qu’il n’a pas prononcé le mot nationalisations.

Le discours est profondément politique et idéologique et ne cède pas à la facilité. Combien sommes-nous ? 100 000 ? Plus ? Moins ? C’est en tous cas le plus grand rassemblement politique qu’ait connu Marseille ces dernières années. Là encore les plus anciens se rappellent le meeting avec Georges Marchais dans un stade vélodrome plein comme un œuf.

La foule, autant que ce qu’on peut en juger est diverse et les jeunes y sont bien présents. Les syndicalistes aussi et très largement.

Le meeting s’achève. On se donne rendez-vous à la prochaine manif. Peut être avant le 1er mai avec cette lutte on ne sait jamais et en tous cas au 20, jour du rendu du jugement de référé sur le 3e plan social.

UNILEVER ne veut rien lâcher et ce matin la presse a confirmé le compromis de vente entre le propriétaire du site et SIBELL une entreprise de frites qui ne veut évidemment embaucher aucun des fralib mais déclare vouloir créer 30 emplois…alors qu’il y a quelques mois à peine elle déclarait être en difficultés financières : une manoeuvre de plus donc.

Raison de plus pour faire valoir un droit de préemption des usines par les travailleurs ce dont a parlé Mélenchon dans son discours en dénonçant la monarchie absolue à l’entreprise.

Un droit de réquisition dans lequel les salariés se reconnaissent puisque, sans attendre le vote ou la loi, ils l’utilisent depuis 565 jours.



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