Emeutes de Los Angeles : vingt ans après, rien n’a changé

lundi 14 mai 2012
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Vendredi soir à Marseille avait lieu la rencontre débats avec la fille de Frantz FANON, celle de MalcomX et le fils de Steve BIKO. Dans cette rencontre sur laquelle nous reviendrons, les 3 intervenants ont insisté sur l’actualité du combat de leur père respectif.

Cet article prouve, s’il en était besoin, la justesse de cette appréciation.

Avril 1992 : Los Angeles est submergée par une vague d’émeutes raciales après l’acquittement des policiers qui avaient passé à tabac Rodney King, un Africain-Américain. Celui-ci revient aujourd’hui sur son histoire ; il y voit une sombre correspondance avec le meurtre de Trayvon Martin.

La colère est un sentiment auquel Rodney King préfère ne pas se laisser aller. A 47 ans, la victime de l’affaire de violence policière la plus célèbre des Etats-Unis a tourné la page de l’événement qui a changé le cours de sa vie, ainsi que celui de tant d’autres, le 3 mai 1991. Roué de coups par des agents de police qui l’avaient arrêté pour excès de vitesse et conduite dangereuse, King devint l’emblème des pires émeutes raciales de l’histoire des Etats-Unis. Son passage à tabac – filmé par un passant – et les réactions qu’il a suscitées ont laissé des traces profondes encore visibles aujourd’hui.

Les quatre agents filmés en train de tabasser King seront déclarés non coupables [le 29 avril 1992]. La nouvelle de l’acquittement des policiers déclenche les émeutes d’avril 1992, qui coûtent la vie à plus de 50 personnes et causent plus de 1 milliard de dollars de dégâts à Los Angeles.

« Bien sûr que je pense encore à cette nuit-là », explique King. « J’ai de sévères migraines à cause des coups que j’ai reçus. Mais je ne laisse pas la colère me dominer quand j’ai mal. C’est inutile. » King souffre également de dommages cérébraux qui lui font régulièrement perdre le fil de la conversation. C’est l’une des conséquences de son interpellation. S’il a pu pardonner aux quatre officiers de police qui l’ont battu à coups de pied et de matraque, c’est grâce aux enseignements religieux de sa mère, estime-t-il. Deux autres conducteurs avaient été arrêtés en même temps que lui et un passant avait filmé la scène. Cette vidéo avait créé un terrible choc dans tout le pays.

King, lui, a dû suivre une rééducation pendant des années pour réparer les dommages causés à son cerveau. Il a également suivi une psychothérapie pour l’aider à gérer son nouveau statut d’icône nationale. « Je me souviens qu’un des agents qui me frappait à la tête n’arrêtait pas de répéter : ’Sale Nègre !’ » raconte King. « C’est quelque chose qu’on n’oublie pas, surtout aujourd’hui, alors que ce genre de scène semble se répéter si souvent. »

King vient de finir d’écrire ses mémoires, The Riot Within : My Journey From Rebellion to Redemption [Au cœur de la révolte : mon parcours de la rebéllion à la rédemption]. « J’ai écrit ce livre pour mes enfants qui n’ont pas connu toute cette histoire. Ils savent à peu près ce qui m’est arrivé, mais pas tout. J’ai l’impression que c’est aussi vrai pour le reste du pays », explique King. L’homme ne cherche pas à faire l’impasse sur ses ennuis judiciaires – aussi bien avant qu’après l’affaire. Arrêté pour vol en 1989, il a de nouveau été interpellé en 1993 pour conduite en état d’ivresse.

Vingt ans après, King se dit toujours déçu par l’état des relations entre communautés. « Les Noirs n’ont pas la vie facile. Mon père venait du Sud et il m’a raconté comment c’était là-bas, à son époque. Je ne peux pas dire que ça ait beaucoup changé mais il faut rester positif », explique-t-il. Pour lui, la récente mort de Trayvon Martin [abattu par un vigile le 26 février dans un lotissement privé et surveillé de Sanford, en Floride] n’est qu’une preuve supplémentaire des souffrances et du traumatisme que connaissent les jeunes Africains-Américains. Il a récemment déclaré que les cris de Martin la nuit où il est mort lui ont rappelé ses propres cris vingt ans plus tôt. (Pour les forces de police de Floride, il est encore impossible de déterminer à qui appartient la voix que l’on entend sur l’enregistrement.)

Critiqué pour avoir établi un parallèle avec son histoire personnelle, il hésite à présent à faire davantage de commentaires sur cette affaire. Alors que King avait bu et commis un excès de vitesse cette nuit-là, le jeune Martin n’avait apparemment enfreint aucune loi lorsqu’il est entré dans cet ensemble résidentiel fermé avec un paquet de bonbons à la main. « Je ne veux pas dire de bêtises », explique King. « On m’a demandé ce que je pensais de ce jeune qui s’est fait tuer et j’ai dit que ça me rappelait ma situation et les injustices que les Noirs subissent tous les jours. J’en ai assez de ça. Quoi que j’aie fait, je ne méritais pas d’être passé à tabac comme ça, et ce jeune garçon ne méritait pas de mourir pour rien. C’est mal, point barre. »

Par Allison Samuels source The Daily Beast le 27/04/2012

Transmis par Linsay



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