La Bolivie sur la bonne voie

samedi 16 septembre 2006
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Le nouveau président de la Bolivie, Evo Morales, n’avait pas hésité à profiter du 4e Sommet Union européenne- Amérique Latine, qui s’est tenu le 12 mai 2006 à Vienne, pour confirmer la nationalisation des compagnies d’hydrocarbures de son pays. Il respectait ainsi ses promesses électorales et montrait que le gouvernement d’un Etat pouvait procéder à des « nationalisations »,...mot devenu tabou dans notre pays tout autant que « renationalisations ».

A ce Sommet, il a pu bénéficier du soutien du Venezuela. Il en avait bien besoin face au déchaînement des Etats-Unis, de la finance internationale et des grands médias contre l’axe Caracas-La Paz. Les dirigeants de l’Union européenne (notamment le gouvernement socialiste espagnol qui défendait la multinationale Repsol ) l’ont même sommé de s’expliquer. Il leur a tranquillement répondu :« Nous n’avons pas à négocier, dialoguer ou discuter lorsqu’il s’agit d’une politique qui implique la décision d’un Etat souverain ». Les gouvernements de l’Union européenne ont pu constater que le flambeau de la souveraineté nationale brandi par des opposants au Traité constitutionnel était également porté dans d’autres parties du monde...

Evo Morales ne s’est pas arrêté en chemin. Il a annoncé que les nationalisations concerneraient également les mines et les forêts pour permettre à son pays de récupérer ses ressources naturelles exploitées depuis des siècles par des sociétés privées aux mains de quelques familles ou de compagnies étrangères.

Le 2 août, jour de célébration de la terre, Evo Morales a lancé le projet de révolution agraire qui devrait se traduire par une redistribution des terres à des communautés autochtones et à des organisations sociales en tirant les leçons de l’échec de la réforme agraire de 1953 qui n’avait profité finalement qu’à quelques familles (actuellement 87% des terres cultivables sont entre les mains de 7% des Boliviens).

Cette redistribution des terres serait accompagnée d’un renforcement des échanges agricoles, notamment avec Cuba et le Venezuela. Mais ce projet de révolution agraire doit encore être approuvé par le Congrès où les représentants des grands propriétaires feront tout pour le bloquer. Certains d’entre eux n’hésitent pas s’armer à l’exemple des latifundiaires brésiliens qui financent de véritables milices. Il faudra toute la volonté du gouvernement bolivien et la mobilisation des syndicats paysans pour aboutir enfin à ce que la terre appartienne à ceux qui la travaillent.

Pour que tous ces changements puissent perdurer et être inscrits dans le marbre, l’Assemblée constituante élue le 2 juillet 2006 a été chargée de rédiger une nouvelle constitution. Elle devrait préparer un projet, conçu comme une véritable refondation, avant le 15 août 2007.

L’annonce de ce projet de nouvelle constitution après la décision de nationaliser les hydrocarbures a entraîné une violente réaction des organisations patronales, des multinationales pétrolières et des grands propriétaires terriens appuyés par l’opposition de droite. Ils ont déclenché le 8 septembre un mouvement de grève avec des blocages de routes dans les régions les plus prospères autour de Santa Cruz.

Même si leur offensive, fortement inspirée par la grève des « camionneurs » au Chili qui avait contribué au renversement de Salvador Allende, a pour le moment échoué, elle risque de se renouveler avec l’appui des Etats-Unis. L’oligarchie bolivienne ne se contente pas de contester les réformes proposées par le gouvernement, elle a des visées scissionnistes dans le cadre d’une autonomie renforcée des régions.

Pour le président Evo Morales, ce mouvement de grève exprime« la haine et le mépris des plus riches envers le mouvement indigène ». La ministre de l’Intérieur Alicia Munoz a été encore plus directe :« L’appel à la grève s’inscrit dans un mouvement de conspiration de ceux qui ne se résignent pas à être gouvernés par un président indien et à perdre leurs privilèges et leur pouvoir ».

Pour mener à bien cette politique, la Bolivie peut compter sur le soutien de Cuba et du Venezuela avec lesquels elle a signé « un traité de commerce entre les peuples ». Cet accord n’est pas fondé sur la concurrence et le libre-échange (comme le prévoient les règles de l’OMC ou les accords conclus par l’Union européenne) qui constituent les fondements des projets et des politiques de nature néo-libérale dont « l’application a contribué à propager et à renforcer la dépendance, la pauvreté, le pillage de nos ressources naturelles et l’inégalité sociale » (déclaration d’Evo Morales à la signature de l’accord).

Cet accord s’appuie sur les principes de coopération et de solidarité dans le cadre d’une véritable intégration « solidaire, complémentaire et humaine entre nos pays et nos peuples » et vise à créer des emplois, lutter contre la pauvreté, assurer la sécurité et la souveraineté alimentaires, protéger l’environnement.

Le gouvernement bolivien, les forces progressistes de Bolivie doivent également compter sur le soutien des forces progressistes dans le monde qui auront tout à gagner au succès du processus révolutionnaire.



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mardi 19 septembre 2006 à 10h30

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