Pire que tout

dimanche 24 novembre 2013
par  Charles Hoareau
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Personne (ou presque) ne se faisait d’illusion sur la politique que mènerait François Hollande une fois au pouvoir. Disons que nombre de celles et ceux qui ont voté pour lui l’ont fait pour se débarrasser de l’autre, le fascisant mégalo au mépris affiché de la classe ouvrière et de ses organisations (« quand il y a une grève personne ne s’en aperçoit ») et à la volonté affirmée de fouler aux pieds des décennies d’accords sociaux durement conquis allant jusqu’à les brocarder sans vergogne en tous lieux

Personne ne se faisait d’illusion mais pouvait-on imaginer que le pouvoir actuel irait aussi loin dans ses renoncements aux promesses de campagne et l’accompagnement de la volonté du grand patronat ? La retraite, les concessions incessantes à la réaction dès qu’elle lève une oreille (ce qui bien sûr ne la rendra pas progressiste mais encore plus exigeante), la fermeté qui vire à la surdité face aux millions de travailleurs en lutte pour leur emploi et les refus de s’attaquer aux multinationales qui licencient…Les exemples foisonnent. Même l’élection aux conseils de prud’hommes se trouve maintenant menacée…Ce faisant ce pouvoir n’en finit pas de tuer l’espoir qu’un jour un gouvernement se réclamant du peuple apportera le progrès social…

Mais ces choix de régression ne concernent pas que la politique intérieure. Dans le domaine de la politique internationale et de la paix (Jaurès doit se retourner dans sa tombe), ce gouvernement aussi bat des records. Après la Lybie, le Mali, la Syrie, l’actualité nous donne deux nouveaux exemples brûlants : l’Iran et la Palestine.

Avoir sur le nucléaire iranien (alors que la France est parmi les pays au monde qui a les plus fortes capacités tant civiles que militaires) et sur la Palestine une position encore plus impérialiste et réactionnaire que les USA, ça il fallait le faire !

Sur l’Iran d’abord

Le coup d’éclat de Fabius a provoqué des réactions hostiles y compris chez des gouvernements que l’on ne peut taxer de pro iraniens. Pierre Barbancey cite dans l’humanité du 10 novembre un des négociateurs de Genève :
« Les Américains, l’Union européenne et les Iraniens travaillent intensivement depuis des mois sur ce processus et il ne s’agit rien de plus que d’une tentative de Fabius de se donner une importance tardivement ».
Le journaliste explique que la position du gouvernement s’explique par sa volonté de « ménager et complaire à deux de ses alliés : Israël et l’Arabie saoudite » et de rappeler ce qu’a martelé Fabius :« Il faut prendre pleinement en compte les soucis de sécurité d’Israël et de la région ». On comprend que dans ces conditions Netanyahou ait déroulé le « tapis rouge » pour accueillir François Hollande.
Etre accueilli de la sorte par le gouvernement le plus droitier et colonisateur qu’ait connu Israël est tout sauf un motif de fierté pour qui prétend défendre les droits de l’homme. De son côté Ryad, (encore un modèle de reconnaissance des droits humains), qui a suspendu sa participation au Conseil de sécurité de l’Onu en arguant de l’impasse syrienne et du rapprochement avec l’Iran, rappelle les nombreux contrats passés avec la France et la commission mixte franco-saoudienne sur le nucléaire …
On a les amis qu’on choisit…

Sur la Palestine

Hollande s’est prévalu d’une position d’équilibre. Quel équilibre peut-il y avoir entre un occupant et un peuple occupé ? Comme le dit Alain Gresh dans le Diplo : « Imaginons un moment un président de la République français affirmant sa position équilibrée entre le gouvernement sud-africain et le Congrès national africain (ANC) durant la période de l’apartheid. »
Cette position est d’autant moins tenable pour un gouvernement qui vient de rapatrier une diplomate accusée d’avoir aidé des palestiniens dont les maisons avaient été détruites , qu’elle est presque a contrario de la position américaine exprimée par John Kerry qui « avait mis en garde l’Etat juif contre le déclenchement d’une nouvelle Intifada et un isolement croissant sur la scène internationale. »

Un isolement dans lequel François Hollande ne craint pas de plonger la France « On est dans une logique différente de Kerry, souligne un membre de son entourage. C’est une visite d’Etat solennelle, probablement la seule du quinquennat. On ne va pas jeter un pétard au milieu des discussions israélo-palestiniennes. On veut peser positivement. » D’autant que l’UE a accordé à Israël un statut de quasi membre aux privilèges exorbitants.

Une telle position déséquilibrée ou plutôt de soutien affiché à la colonisation tranche avec un passé où la France joua un rôle dans le sens de la paix en concourant par exemple à ce que l’OLP soit reconnu comme le représentant des Palestiniens. Elle rappelle les intrigues de Guy Mollet (encore un « socialiste ») aidant, en 1956, l’état d’Israël à acquérir la bombe atomique et amène Chems Eddine Chitour à regretter sur son blog où il fait un intéressant rappel historique un De gaulle faisant cesser cette aide en 1961.

Soyons justes.
Dans un moment où Hind Khoury [1] déclare :«  Jérusalem n’existe plus comme une ville palestinienne, la vie y est devenue insupportable ! Vous avez parlé de la souffrance du peuple juif ? Nous avons besoin d’entendre parler de la souffrance du peuple palestinien ! », Hollande a eu un mot pour les colonisés.
Il a fait appel au bon coeur de Netanyahu : « Le président français François Hollande a par ailleurs déclaré qu’il attendait des « gestes » d’Israël sur la colonisation des territoires occupés pour contribuer au processus de paix. » Des gestes sans même une menace de sanction ?

Décidément, oui, ce gouvernement dans bien des domaines est pire que tout.


Merci à Linsay pour son aide sur cet article


[1ancienne déléguée générale de la Palestine en France



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dimanche 24 novembre 2013 à 11h19 - par  RICHARD PALAO