La vocation des sans papiers

mercredi 4 octobre 2006
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La coda de la circulaire du 13 juin qui fut un immense espoir pour ceux qui ont pris le risque de déposer 30 000 dossiers en préfecture est un refrain malheureusement connu et tragique !

Ce n’est pas la première fois qu’un ministre de l’intérieur propose de régulariser massivement avant d’expulser tous ceux qui se sont « auto dénoncés » en déposant des dossiers.

A la rentrée, les chaises vides d’Abdallah, Aminata D., Aminata S., celle de Khalid, de Mourad, de Vladislav, de Jeff, celles des enfants Nouridou, des enfants Mutischi... et tant d’autres, représentent autant d’expulsions brutales et injustes.

- A Chartres, la police est entrée dans une école maternelle pour récupérer un enfant de 2 ans et 1/2 dont les parents étaient en rétention.
- A Soissons, une famille malgache vit cachée après avoir été arrêtée.
- A Montereau, un père de famille, débouté de la circulaire, fait la grève de la faim.
- A Bagneux, à Cholet, à Paris, des enfants attendent le retour de leur père, expulsé pendant l’été.
- vendredi 29 septembre, à 14 h 45, des policiers se sont présentés dans l’école maternelle Jean Lolive à Pantin, pour y récupérer le petit Paul CHEN, un enfant de 4 ans, né à Aubervilliers. Cette tentative a heureusement échoué et l’enfant n’a pas été emmené.
- Et à Cachan, des dizaines de familles vivent dans des conditions inhumaines. Chaque jour sur le chemin de l’école, ces familles sont harcelées, bousculées, interpellées et malmenées par la police.

Cette sinistre liste s’allonge chaque jour et le ministre de l’intérieur se justifie par ces mots :
« Ceux qui n’ont pas de papiers ont vocation à être reconduits à la frontière ».
Le mot « vocation » résonne curieusement ne trouvez-vous pas ?
« Vocation » : appel de Dieu, attirance, goût, mission selon le dictionnaire.

Le ministre de l’intérieur veut sans doute dire que cela ne se discute pas, une « vocation », ça se respecte, ça ne s’explique pas : « Circulez, il n’y a rien à voir » ! Voilà ce qu’il dit à tous ceux qui se mobilisent pour demander la régularisation des sans papiers !

Mais voilà « on discute », on revendique, et même on pense chez ces gens-là, monsieur le ministre.
Écoutez plutôt cette lettre ouverte des grévistes de la faim de Cachan

« Monsieur le Président de la République Française,

Au nom de tous les peuples qui souffrent, nous nous adressons à vous et à travers vous au grand peuple français, solennellement.

Nous ne sommes, ni des criminels, ni des fainéants, ni des voleurs, ni des profiteurs. Nous sommes des hommes, des femmes, des enfants dans un monde sans oreilles, sans yeux, sans Raison, sans mains.

Un monde qui a oublié ou préfère oublier ses devoirs et sa raison d’être, pour l’homme, par l’homme et avec l’homme.

Nous venons de là-bas ! Afrique, Asie, Orient, Amériques...
Nous nous noyons dans l’Atlantique. Nous mourrons sur les fils barbelés des frontières aux quatre coins du monde. Nous subissons les coups des machettes, des fouets, des matraques. Nous sommes arrêtés, pourchassés, séparés, méprisés, divisés, “chartérisés”, hommes, femmes, enfants.

Et pourtant nous sommes là, encore là, toujours là parce que nous sommes votre reflet dans le miroir. On n’efface pas un reflet, il se présentera toujours à vous un jour ou l’autre.

Notre regard se tournera toujours vers ce grand peuple que vous représentez et qui représente historiquement l’espoir pour des millions d’hommes dans le monde. L’espoir, non pas d’un travail, d’un logement, d’une école, d’un mieux-être, mais l’espoir supérieur d’une voix, d’une parole, porteuses de Justice, de Respect, d’Intelligence, d’Equilibre, de Partage et d’Humanité à travers le monde.

Aujourd’hui...
Nous sommes vos frères et vous ne nous voyez pas.
Nous sommes vos soeurs et vous ne nous entendez pas.
Nous sommes vos enfants et vous ne nous tendez pas une main apaisante.

Monsieur le Président de la République, grand peuple français, si nous n’avons pas de papier, nous ne sommes pas du papier, ni des nombres sur du papier. Nous nous appelons Togola, Otman, Salim, Sékou, Boureima, Ramdame...
Nous ne sommes pas dangereux, nous sommes en danger !

Merci »

Je tiens à signaler que sur ces 6 grévistes de la faim du squat de Cachan qui en sont à leur 44 ème jour, deux ont été hospitalisés lundi 2 octobre au matin, dans un état très préoccupant.

"Nous leur expliquons les risques (qu’ils encourent) à travers un dialogue bi-quotidien. Ils sont très lucides et restent déterminés », a déclaré le médecin Patrice Muller.
Les laisser continuer dans ce chemin est de notre responsabilité à tous, il faut une réaction massive et claire à l’échelle du pays pour répondre à cette déclaration :

"Nous avons choisi la résistance pour réussir notre existence ; vivre avec dignité ou mourir en paix, c’est notre seul choix face à la brutalité de ce gouvernement".



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mercredi 11 avril 2007 à 18h00

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