La médecine libérale traditionnelle est une médecine de riches

lundi 16 mars 2015
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Un coup de gueule de notre camarade Michel Ciadella à l’adresse des médecins qui n’ont rien trouvé de mieux que de partir en guerre contre le tiers payant alors que 30% de la population renonce à des soins faute de moyens financiers.
Ils essayent de nous faire croire que c’est pour mieux s’occuper des patients.
En réalité le tiers payant va les « gêner » pour pratiquer les dépassements d’honoraires.

Lettre adressée aux syndicats CSMF, SML, MG France et à l’Ordre des Médecins.

Alors que 30% des citoyens renoncent à des soins par manque de moyens financiers, vous, qu’on ne voit jamais au côté de ceux qui luttent pour vivre dignement de leur travail, plus soucieux de vos dépassements d’honoraires que de la santé des patients, vous partez en guerre contre le tiers payant qui facilite l’accès aux soins des plus démunis.
Quelle Honte !
C’est là l’expression d’un mépris insupportable à notre égard. Sachez que nous sommes aussi responsable que vous !
Nous savons que la gratuité d’accès aux soins est financée par nos cotisations et par le travail. Mais nous savons aussi que c’est le moyen de l’égalité d’accès aux soins.
J’ai entendu que vos honoraires n’avaient pas été revalorisés depuis 2011 ... Moi ma retraite ne l’a pas été et cela depuis 2000 ! Et je n’ai pas la possibilité de dépassement de salaire.
Dès la création de la Sécurité Sociale en 1945, les médecins libéraux ont combattu le principe de conventionnement, ils voulaient conserver la « liberté » d’honoraires, comme si cette « liberté » avait un sens. Pour les malades c’est la liberté de ne pas se soigner. Vous êtes leurs dignes descendants.

Pierre Laroque qui fût directeur de la Sécurité Sociale écrivait en 1953 : « La médecine libérale traditionnelle est une médecine de riches ». [1] Peu vous importe le serment d’Hippocrate (hypocrite) qui stipule : « Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera. Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire ».

Je vous rappelle, à moins que je ne vous l’apprenne, en France le salaire médian est de 1600 euros mensuels, et plus de 8 millions de personnes vivent avec moins de 900 euros par mois ! Comment voulez-vous que ces personnes paient les dépassements de 500, 1000 euros et plus ? Cela ne semble pas vous poser de problème...

Je peux comprendre que des médecins ayant un haut niveau de qualification (ils ne sont pas les seuls) veuillent être payés correctement. Cela devrait passer par une convention négociée avec des tarifs opposables et avec le tiers payant pour favoriser l’accès de tous aux soins. Et puis il faudra bien sortir un jour du paiement à l’acte.

Il y a quelques années, des chirurgiens avaient organisé une grève et menacé de s’expatrier pour obtenir une aide parce qu’ils jugeaient leurs assurances trop chères (tiens donc !). Ils ont obtenu une aide de la sécurité sociale qui prend en charge la moitié de leur prime et cela peut atteindre 7 500 euros par an. Pas gênés, les libéraux ont accepté. Logiquement ils auraient dû s’en prendre aux compagnies d’assurance... mais semble-t-il, la logique n’est pas leur truc.

N’oubliez pas que vous avez pu devenir médecins en grande partie grâce au service public ! Cela vous donne des droits, mais aussi des devoirs.

Heureusement, tous les médecins ne sont pas comme cela. Dans un article paru sur Médiapart le 11 octobre 2012, un interne en santé publique et médecine sociale s’exprime ainsi « la revendication sur la rémunération ne peut être légitime que si elle n’entre pas en contradiction avec le principe de l’égalité d’accès aux soins ». Le même journal publie le 13 novembre 2012 ce que gagnent en moyenne les médecins. C’est très loin de la misère. Par exemple, un chirurgien gagne en moyenne 11 452 euros nets par mois avant impôts, toutes charges payées en 2011.

La DREES dans un document de travail indique qu’un omnipraticien a gagné en 2008 en moyenne 6 384 euros nets.

Certes, les médecins ont de longues journées, mais le tiers payant n’y est pour rien et le numérus clausus [2] pour beaucoup.

Je fais partie de ceux qui militent pour un système de santé dont l’accès serait totalement gratuit. En effet, non seulement cela permet l’accès de tous, mais en plus c’est plus économe par le fait que les patients n’attendent pas que leur santé se détériore pour se faire soigner.

Petit rappel :

Extrait du Serment d’Hippocrate propose par l’Ordre national des Médecins (révision 1996)

« Au moment d’être admis(e) à exercer la médecine, je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité. Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux. Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. J’interviendrai pour protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité ... »

Je ne vous salue pas.

Michel Ciadella

PS : Vous prétendez que « la médecine libérale est en danger ». Or s’il y a un exercice libéral de la médecine, il ne saurait y avoir de médecine libérale ! Il y a la médecine tout cours.

Transmis par la_peniche


[1« Réflexions sur le problème social » Éditions Sociales Françaises, 1953. Recueils d’écrits de Pierre Laroque.

[2Ce terme désigne le nombre fixe d’étudiants admis dans certains cursus chaque année, principalement dans les professions de santé (médecin, pharmacien, dentiste, sage-femme, infirmière, kiné…), qui sont réglementées. Il a été mis en place en France en 1971.



Commentaires

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lundi 16 mars 2015 à 16h51 - par  Linsay

Maintenant c’est le serment d’« hypocrites ».

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