SOS Racisme. Mouvement antiraciste ou pro de l’événementiel ?

mercredi 12 août 2015
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La lutte contre le racisme est une question trop importante pour supporter en son nom la moindre instrumentalisation. Si les divisions des mouvements qui se réclament du camp du progrès ne sont surtout pas à cultiver cela n’enlève en rien la nécessité de clarifier qui est qui et qui fait quoi. Cet article paru dans l’Humanité dimanche et relayé par Romain y contribue.

Depuis sa création, SOS racisme soulève des questionnements tant sur sa stratégie que sur ses orientations, voire son utilité. Malgré un budget conséquent et des appuis politiques forts jusqu’au sommet de l’État, l’association semble aujourd’hui à bout de souffle.

À quoi sert encore SOS Racisme ? La question se trouve reposée au lendemain de l’affaire dite du « bikini », qui a vu s’opposer plusieurs jeunes femmes dans un parc rémois. Selon l’Union de Reims, journal local peu regardant sur la véracité des faits, l’agression aurait eu un caractère religieux imputable à un groupe de musulmanes. L’enquête a, depuis, confirmé le caractère non religieux de l’altercation, mais trop tard pour Sos Racisme, qui avait aussitôt appelé à une manifestation avant que son président ne présente ses excuses penaudes. « Ce qui s’est passé est parfaitement révélateur de l’état d’esprit de cette association », assure Sihame Assbague, militante antiraciste. « Cette précipitation à condamner les musulmans correspond à un positionnement politique très clair. C’est celui du pouvoir socialiste, qui n’a aucune volonté de lutter contre l’islamophobie. »

Ici en 1989, Harlem Désir, alors président de SOS racisme, entouré de Bernard Kouchner et de Bernard-Henri Levy. Un triplette de virtuoses de la girouette. Photo J-P Muller

BRISER LA MARCHE DES BEURS

Née en 1984, dans la foulée de la Marche des beurs, SOS Racisme a toujours attiré des critiques plus ou moins véhémentes. Outil de récupération piloté par le Parti socialiste pour les uns, officine et pompe à fric dévoyant la cause antiraciste pour d’autres. Ou encore, coquille vide reine de l’événementiel, comme le suggère Amal Bentounsi, une autre militante antiraciste, elle aussi signataire d’un appel à une Marche de la dignité, ce 31 octobre à Paris.
« L’État se devait de briser (la Marche des beurs). Il mit alors tout en œuvre pour saboter cette autoorganisation en médiatisant à outrance certaines officines pseudoantiracistes », dénonce-t-elle.
« Celles-ci s’employèrent de tous leurs moyens financiers à étouffer la Marche pour l’égalité sous les milliers de décibels de concerts gratuits et leur antiracisme de pacotille. » Les moyens mis à la disposition de l’association sont effectivement conséquents. Selon les données collectées par l’Humanité Dimanche, c’est entre 800 000 et 850 000 euros de subventions publiques qui tombent, chaque année, dans l’escarcelle de l’ancienne association de Julien Dray et Harlem Désir. « Avec une telle organisation et de tels moyens, ils devraient avoir une action de terrain », s’étonne Sihame Assbague. « Mais non, ils n’en sont pas capables. Du coup, ils n’ont aucune légitimité à demeurer. Que l’on donne l’argent aux associations qui luttent vraiment contre le racisme. » Samia Messaoudi connaît bien, elle aussi, le militantisme antiraciste. Ancienne « marcheuse », cette journaliste est aussi la coauteure de l’ouvrage de réflexion Vivons ensemble [1]. « Il faudrait, en lieu et place de SOS Racisme, un vrai mouvement antiraciste avec un positionnement clair », assure-t-elle.

800 000 euros par an de subventions publiques et presque pas d’actions de terrain. Est-ce bien normal ?

UN POSITIONNEMENT FLOU ET AMBIGU

De positionnement clair, il n’est effectivement pas ou plus question.
Au nom du combat (a priori légitime) contre l’islamisme, l’association s’affiche aux côtés de personnages sulfureux, tel Mohamed Sifaoui, journaliste algérien, notamment soutenu par le philosophe autoproclamé Alain Finkielkraut, qui n’hésite pas à inonder les réseaux sociaux de propos ouvertement racistes : « Il est vrai que contrairement aux salafistes, les Portugaises se sont bien intégrées en France. Très vite, elles ont appris à se raser », écrit-il entre autres douceurs. Et entre deux concerts, actions devenues, au fil des ans, la marque de fabrique de l’association. Y compris sur des sujets aussi sensibles et politiques que les prélèvements ADN pour les seuls étrangers, mesure contenue dans la loi Hortefeux de 2007.
Contactée par l’Humanité Dimanche, Sos Racisme n’a pas souhaité donner suite.

Joseph Korda
L’Humanité Dimanche, 7 août 2015

Transmis par RT



[1Vivons ensemble, de Mustapha Harzoune et Samia Messaoudi, illustration Hervé Pinel. Éditions Albin Michel, 288 pages, 19,90 euros.



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samedi 15 août 2015 à 23h25 - par  chb

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