Combien ça coûte des marqueurs ?

lundi 3 novembre 2008

Chaque année la campagne octobre rose se donne pour objectif de sensibiliser au cancer du sein...
Dans le cadre de celle-ci Lilou témoigne

Chaque fois qu’on lance des campagnes qui ont comme objectif de sauver des vies humaines, on ne peut dire que « Bravo ! » aux initiateurs, car une vie n’est pas une marchandise, une vie on n’en a qu’une, une vie détruite c’est non seulement un individu qui disparaît mais c’est aussi une famille déstabilisée.
Donc cette mobilisation pour l’information, le dépistage et la prévention est fondamentale.

Oui, plus le cancer est diagnostiqué tôt, plus les chances de vie sont grandes, cela ne fait l’ombre d’aucun doute . Merci à tous les médecins et chercheurs qui mettent en œuvre toutes leurs compétences dans la lutte contre cette maladie sournoise qui, apparemment, est en augmentation et en évolution.
Mais après le diagnostic et la découverte, restent la prise en charge et le suivi.

C’est par rapport à ce suivi que témoigner s’est imposé à moi à la fois comme une évidence et un devoir moral.
Je considère comme une chance d’être là aujourd’hui et cette chance je veux que d’autres l’aient aussi : le mot « chance » je ne l’utilise pas au hasard, car dans ce cas précis, j’ai eu le sentiment de l’avoir saisie par les cheveux…

Je m’explique : il y a 5 ans, grâce à une mammographie de dépistage, le diagnostic tombe : cancer du sein, mais celui dont la forme est la plus facile à soigner et la moins traumatisante : pas hormono-dépendant, pas invasif ; on ne parle pas d’ailleurs de « maladie ». Dans ce cas-là, on enlève la tumeur, on effectue une radiothérapie sans chimio ; c’est aussi celui où il y a le moins de probabilités de récidive après 5 ans.
Un suivi régulier, selon un protocole bien établi, et le soulagement chaque année quand on vous dit : « tout est parfait , à l’année prochaine. »

Sauf qu’en janvier 2008, ma fille, visiteuse médicale en gynécologie, me dit : « Tu devrais faire les marqueurs, on ne les a pas faits depuis l’opération » . Sur ses conseils insistants, j’en parle à mon médecin qui me répond : « Dans ton cas ça ne s’impose pas, mais si tu y tiens… »
Et là on se rend compte d’une légère augmentation ; à contrôler sur 3 mois ; l’augmentation se poursuit et en juin commencent des recherches plus approfondies pour essayer de comprendre ce qui se passe malgré l’absence de signes cliniques, à part 2 ganglions « qui roulent » sous l’aisselle à l’opposé du sein opéré et une très légère douleur au sternum quand je boucle la ceinture de sécurité de ma voiture.

Je vais donc passer une scintigraphie osseuse qui révèle une lésion secondaire sur le sternum, déjà bien avancée ; dans les ganglions on retrouve une cellule du cancer du sein ; et là tout se met très vite en place : une prise en charge par des équipes formidables, d’une écoute et d’une humanité qui font honneur à la profession, sachant trouver – en particulier celle du CHU Carrémeau de Nîmes – les mots pour nous placer, mon mari et moi, dans la position de vainqueurs potentiels et non de perdants d’avance, nous donnant ainsi le « moral » fondamental pour le combat.

Chimio donc, cette fois-ci on n’y coupe pas.

A ma question : « N’aurait-il pas mieux valu faire la chimio il y a 5 ans ? », la réponse est : « Non, car dans votre cas, sur les 100 femmes qui subiraient la chimio, pour 98 d’entre elles elle serait parfaitement inutile » Réponse de spécialiste que je comprends tout à fait ; je suis donc statistiquement dans la tranche des 2% restants.

Juillet donc, les faits et les images sont là, première chimio avec des examens complémentaires de routine, en l’occurrence un scanner cérébral qui révèle une tumeur au cerveau dont on ne peut avec certitude déterminer la nature, mais dans le contexte existant, il faut agir. Bien conseillés, nous filons sur Marseille Hôpital La Timone ; opération prévue sans retard pour le 23 septembre.

Il a fallu se rendre à l’évidence : les trois médecins qui me suivent au centre de cancérologie de Montpellier, à Nîmes et à Marseille sont unanimes : sans ces marqueurs en janvier, pas de prise en charge et dans 6 mois ou 1 an, je me retrouvais dans un tout autre cas de figure avec des chances de vie d’un tout autre ordre.

Alors je pose une question évidente : « Pourquoi cette analyse des marqueurs n’est-elle pas systématique dans la surveillance, y compris dans le cas où la guérison est considérée comme acquise puisqu’il y a cette fameuse tranche des 2% ?

Cette question, je l’ai posée et la réponse est tombée : Directives et politique nationales : ça reviendrait trop cher.
Le 3 septembre 2008, Le Monde, sous la plume de J.Y. NAU, publiait un article : « Mortalité par cancer : les inégalités sociales ont augmenté en France. »

Or des mesures qui ne tendent pas à gommer ces inégalités ne contribuent-elles pas à les aggraver ?

Interloquée d’abord, je suis à présent indignée et révoltée : on sait ce qu’il faut faire, et les médecins en sont empêchés pour raisons financières ? Dans quel monde vivons-nous ??
Et plus encore que par cette politique de comptable, je suis scandalisée par la remarque d’un des médecins avec qui nous discutions samedi soir : « Malheureusement, - dit-il pour tempérer ses propos (et bien sûr parce que ça n’est pas un souhait de sa part), si quelqu’un de très connu ou de très important avait ce type de problème, lundi matin les marqueurs feraient partie du protocole. »

Ce qui est tout de même l’expression d’un désarroi effrayant et signe le constat d’une faillite éthique et morale.

Je refuse l’idée que ce soit la seule solution pour faire avancer les choses et donc donner à chacune et à chacun d’entre nous le droit le plus incontesté : celui de VIVRE. Je refuse que demain nos petites filles, vos petites filles soient victimes de cette politique inhumaine où une vie est un chiffre dans une case.

Hier soir, lors d’un débat dans le cadre de cette campagne, les médecins intervenants nous disaient ne pas refuser « les marqueurs » si les patientes le demandaient : mais combien de femmes savent leur existence et leur utilité ?

Ils disaient aussi espérer que les scanners et les petscans fassent bientôt partie intégrante du suivi car ils sont plus efficaces que les marqueurs. Certes, mais dans combien d’années ? Et en attendant, combien de vies perdues ?

Alors n’est-ce pas aujourd’hui, dès maintenant qu’il faut agir ? Vous l’aurez compris, c’est le sens de mon témoignage qui se veut un message que vous aurez à cœur d’entendre et de relayer si vous le partagez.

Merci de m’avoir lue jusqu’au bout et ensemble agissons et mobilisons-nous.

Puisque « intelligere » c’est comprendre, montrons-nous intelligents, c’est à dire capables de tirer tous les enseignements des affaires douloureuses aux conséquences désastreuses que nous avons tous en mémoire, afin de ne pas les répéter.

La vie humaine n’est pas un marché, c’est un capital à préserver à tout prix.

Lilou Nîmes

PS : info dernière : Prix de ces fameux marqueurs « si chers » : 18,50 euros !!! chaque 6 mois ou 1 an. Quelle économie !!! Je laisse chacun libre de ses commentaires.



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Combien ça coûte des marqueurs?

0 16 avril 2012 Ã  15h54
par anonyme
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Combien ça coûte des marqueurs?

0 7 novembre 2008 Ã  14h07
par Docteur Jacques Lacaze 62750 LOOS EN GOHELLE
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Combien ça coûte des marqueurs?

1 7 novembre 2008 Ã  13h52
par vieilledame
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