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Ce qui s’est passé le week-end du 13 et 14 novembre.

lundi 15 novembre 2010, par Charles Hoareau

Il y a des moments où, un évènement s’impose dans l’actualité, au point d’écraser tous les autres dont pourtant il faudrait parler. C’est ce qui s’est encore passé ce week-end.

Ainsi donc, dans ce que la presse nomme un foyer « pour travailleurs immigré-e-s » pour ne pas dire un foyer ADOMA et comme si le sinistre était moins grave et plus fatal parce qu’il s’agissait « d’immigrés », le feu a pris tuant au moins sept personnes [1] dans la nuit de samedi à dimanche : un résident, qui a sauté du sixième étage, six autres personnes asphyxiées par une épaisse fumée brûlante. Le bilan pourrait s’alourdir car 11 personnes sont encore dans un état grave, dont trois enfants en réanimation et 8 personnes mises dans des caissons ¬hyperbares.

Le feu a tué et la seule vision de l’immeuble fait comprendre comment à partir de poubelles situées à l’extérieur d’un bâtiment et adossées à celui-ci, le piège mortel peut se refermer sur les résidents. Le foyer de Dijon, comme celui de Félix Pyat à Marseille, comme tant d’autres foyers en France est un entassement sur plusieurs étages de cubes dont on ne peut sortir qu’en franchissant un long couloir étroit et bas de plafond, puis en descendant un escalier pas large non plus, espaces rapidement envahis par la fumée toxique en pareille circonstance.

7 morts, 11 blessés et la direction d’ADOMA dit que les systèmes de sécurité ont fonctionné…Mais alors ça veut dire quoi « fonctionner » ? Moi je croyais naïvement que ça voulait dire zéro mort, zéro blessé…Il y aurait un nombre de morts acceptable ?

C’est une question de technologie ? La faute à pas de chance ?

Les hasards de l’actualité font que l’on parle ces jours-ci de l’Opéra-Comique de Paris bâtiment inauguré il y a plus de 100 ans dont on a su préserver la décoration initiale tout en l’équipant de matériaux ignifugés. Ce qui a été possible pour un lieu de culture ne le serait pas pour un lieu d’habitation ? Ne peut-on pas prévoir des logements bien plus sécurisés que ceux de ces foyers-là  ? Comme par hasard c’est une insécurité dont on ne parle jamais…et qui tue.

L’autre élément qui rend encore plus insoutenable un tel évènement et que l’on redoutait dès son annonce, c’est que plus l’enquête avance, plus la thèse de l’incendie volontaire semble se confirmer : le racisme aurait-il donc à nouveau tué ? Des « immigrés » et des français un peu trop noirs, un peu trop pauvres ?...

Sur des forums dont le Net regorge, y compris d’ailleurs ceux de la presse dite respectable et citée comme telle dans les revues de presses de nos médias matinaux, des anonymes s’en donnent à cœur joie sur le parallèle entre le nombre de chômeurs et le nombre « d’étrangers », sur la France qui n’a pas les moyens d’accueillir…etc… vous connaissez. Certains messages semblent même se réjouir et sous entendent que cela ne va pas s’arrêter là . Des menaces à ne pas sous-estimer ?

Curieusement la presse électronique de ce lundi soir est déjà très largement passée à autre chose que ce « fait divers » qui a de toute façon bien moins mobilisé les médias que les ennuis de santé de Johnny Hallyday ou les déboires de l’équipe de France de foot [2] : question d’échelle des valeurs…

Pourtant n’y aurait-il pas, à partir de ce dramatique évènement, des questions à se poser sur la place de l’homme dans notre société ? Sur le rôle des pouvoirs publics qui viennent de privatiser ADOMA ? Sur les conséquences de la politique du bouc émissaire ? Sur les conditions de logement de nombre de travailleurs pauvres parce que surexploités ?
Une Une de journal n’y suffirait pas…

Il faudrait parler aussi, si on avait encore de la place en Une, de la multitude des endroits où des gens de tous horizons ont, encore ce week-end, conjugué à leur manière dans la rue ou ailleurs le « On lâche rien ! » des manifs de cette rentrée, initiatives qui ont mobilisé des milliers de salarié-e-s, de retraité-e-s, de chômeurs…et dont la presse parle si peu en ce lundi pluvieux.

En serrant un peu on pourrait parler des grévistes de Marseille 02 qui, soutenus par la population, refusent encore et toujours dans une grève totale qui a dépassé son 1er mois, une réforme que La Poste veut leur imposer.

On pourrait aussi parler de la rencontre internationaliste de Vénissieux, la 3ème du genre, qui a réuni dans une ambiance de réelle fraternité plus de 150 personnes venus écouter et débattre avec des représentants des partis communistes d’Espagne, d’Irak , de Cuba, du Bénin, de Grèce, du Nicaragua…dans une journée qui a soulevé l’enthousiasme des participant-e-s.

On pourrait aussi parler des conséquences graves de la loi sur les retraites sur les comptes de l’assurance chômage…

Oui vraiment, si on avait la place en Une on devrait parler de tous ces évènements qui se sont produits ce week-end.

A part ça je ne vois vraiment pas de quoi on pourrait parler d’autre…et qui occupe tant la presse « respectable » [3]


[1dont 3 français…moins français que d’autres ?

[2sur Google actualité plus de 1000 articles sur la santé de Johnny en 2009, 22600 sur l’équipe de France en Afrique du Sud, 283 sur le foyer et ses morts…

[3plus de 1600 articles sur une vague histoire de chaises musicales

Messages

  • je suis entièrement d’accord sur l’article. Et venant de visionner un film nommé : "la bande à BAADER", après la lecture d’un livre sur les FFI, la réponse au fascisme latent et au racisme exacerbé, me parait simple et courte. Nous devons continuer de diffuser nos idées par nos propres moyens et sur nos propres supports, sans attendre d’aide ou de soutien. coller des papillons, tagger des mur, jeter des milliers de tracts dans la rue, et appeler dans tous nos messages à la rebellion contre ce système..... si cela était possible en 45, ce le sera toujours aujourd’hui car rien n’a changé contrairement à ce que l’on dit, les gens souffrent, meurt brûlés, ou tout simplement ce suicident. Non rien n’as changé, le capitalisme ne change pas même s’il tente de diversifier ses modes d’administration de la pauvreté.

  • oui, tragique l’ incendie du foyer pour étrangers à Dijon, et s’ inquiéter des causes, mais en France et pour les français, y compris à la Cgt et chez les communistes la sécutité au quotidien et au travail vient très loin dans les préoccupations.

    Oui ce peut etre réjouissant de se retrouver entre militants communistes ......... à quand une internationale conséquente ?
    mais le premier problème en France est le chômage des jeunes 50 % dans les cités et l’ abstentionnisme de la classe ouvrière, classe, seul lieu possible où faire voter pour un vrai parti communiste de classe et de masse, la tentative de [ a ] front de gauche ne s’ adresse qu’ à la gauche du PS. Et Mélenchton n’ en veut qu’ aux moyens matériels du PCF et à ses moyens humains encore existants.

    Cela, cette tentative, me rappelle le " coup " de Juquin qui grimpa sur le dos du PSU en 1988, puis PSU qui disparu en groupe Vert et rouge/Alternatifs. Cependant, le congrès du PSU prédédent l’ élection de 1988 avait décidé de ne pas y aller, une consultation bidon par téléphone en décida autrement.

    Yves Le Gloahec, retraité PTT, 73330 Le Pont de Beauvoisin

  • oui on pourrait ou plutôt ils pourraient parler mais la presse et les médias ne sont en principe que les porte voix de la classe dominante au pouvoir et ce n’est pas la notre.
    L’incendie de Dijon est criminel à double titre : il est sans doute volontaire et il est le résultat de réhabilitations à la con, avec des financements qui n’en sont pas, une volonté de faire mal avec rien et pour excuse : c’est toujours mieux que rien ! Pourtant c’est dans un foyer dit en bon état que la mort a frappé.
    En bon état de quoi, oui aux normes anti tout mais pas anti misère avec des chambres exigues, une surpopulation, l’interdiction d’accès au logement dit commun, la relégation au fin fond de la zone industrielle d’avant, celle qui est morte depuis si longtemps.
    Oui des travaux à la con, à minima, de quoi baffrer des petits gâteaux à l’inauguration et se tirer bien vite avant que ne retombe le soufflet avec ses fuites d’eau, son réseau électrique défaillant, mais tout cela aux normes, les normes réservées aux pauvres.
    Le sourire d’Ibrahim n’aura jamais la valeur de celui de la Joconde, n’importe comment Ibrahim ou qui soit-il ne sourit plus, il est "fatalement" mort asphyxié, une chambre à gaz qui ne dit pas son nom.
    Tiens je prends les paris , dans un an, ils seront tous là les ceux qui savent, décident et pensent, la larmichette à l’oeil découvrant la plaque commémorative : ici sont morts par un pur hasard des gens que nous aimions et traitions comme les nôtres bien que la France ne puisse accueillir toute la misère du monde, les logeurs sociaux reconnaissants.
    Et loin, très loin de là, il ya des frères, des épouses, des mouflets en larme, sauront-ils un jour la vérité que l’homme de la photo jaunie dans un cadre barré d’une larme noire est mort non pour la France, dans les tranchées comme avant, mais dans un putain de foyer en France, le sauront-ils avant d’être garrottés par le FMI, un autre tueur mais les mêmes maîtres.
    C’est quoi déjà les trois mots gravés aux frontons de nos mairies ?

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