Le beurre et l’argent du beurre

mercredi 14 juin 2006
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LA LIBERALISATION DE L’ENERGIE

On connaît le crédo des libéraux, libérez l’énergie et tout le monde en profitera, les consommateurs et les entreprises. Cette libéralisation de l’énergie a été décidée et signé, rappelons le, par jacques Chirac et Lionnel Jospin en 2002 au sommet de Barcelone (19 Mars 2002). « L’ENJEU principal du sommet de Barcelone est la libéralisation du marché de l’énergie. Début 2001, la Commission avait proposé de libéraliser à 100 % le marché de l’électricité et du gaz, en 2003 et 2004 pour les entreprises, puis en 2005 pour les particuliers ».

Pour aider à la libéralisation du secteur c’est l’Etat lui-même qui va aider la constitution d’entreprises privées : « Pour réduire le monopole de fait d’EDF, la France a suscité la création d’entreprises électriques indépendantes, Energie du Rhône, issue du rapprochement de Suez et de la Compagnie nationale du Rhône (CNR), et la SNET, filiale de Charbonnages de France, dont l’espagnol Endesa a pris 30 % du capital. Elle a ouvert le marché français aux gros industriels, conformément à la directive européenne. Rappelons sur un plan théorique, que la libéralisation de l’énergie doit se traduire par une baisse des prix pour les entreprises et les particuliers : « Pour "vendre" sa libéralisation, Bruxelles explique que les prix ont le plus baissé dans les pays qui ont le plus libéralisé. »

Pourtant déjà à l’époque, la France avait le prix de l’électricité le plus bas d’Europe : « certains estiment que le vrai débat n’est pas celui de la libéralisation de l’électricité, mais celui de la "rente nucléaire" dont bénéficie EDF, qui permet à l’électricien français de mettre sur le marché l’un des kilowattheures les moins chers d’Europe. Les tarifs français restent inférieurs de 30 % et 14 % - respectivement pour les entreprises et les particuliers - à ceux pratiqués en Allemagne, selon une étude de la Commission . »

LA THEORIE PRISE EN DEFAUT

Il suffit de regarder ces trois graphiques pour constater que la réalité n’est pas au rendez vous de la théorie.

Les prix « libérés » de leur tutelle publique se sont envolés, au point que certaines entreprises en viennent à demander un retour de l’Etat et de l’intervention publique.

Car si d’un côté les prix régulés (sous contrôle de l’Etat) n’ont pas bougé, les prix libres ont eux explosés (+ 48 % en France), ce qui fait dire aux patrons qu’il souhaite un retour de l’Etat : « Le marché de gros de l’énergie se base, comme partout en Europe, sur les coûts gaziers alors que la France a fait le choix du nucléaire.

C’est inacceptable car le coût de développement d’un EPR de série est de 35 euros par mégawattheure (MWh) quand le prix de marché se situe entre 55 et 57 euros/MWh. Il faut des mécanismes qui permettent de marier la concurrence et les avantages du nucléaire. Il est légitime en effet que les Français profitent du choix stratégique fait en France en faveur du nucléaire. Voilà pourquoi je ne suis pas contre le maintien des tarifs réglementés après 2007 ».

AU SECOURS L’ETAT

Si l’on comprend bien, le prix de l’électricité dans une économie de marché, dépend du marché. Or que dit le marché. Il fixe le prix en fonction de l’évolution du prix du Gaz, lui même voyant son évolution dépendre de l’évolution du pétrole, dont les médias nous disent qu’il s’agit d’un prix de marché. Que fait E.D.F ? Etant de moins en moins une entreprise de service public et de plus en une entreprise comme les autres devenant de plus en plus dépendante d’actionnaires privés dont l’objectif est la maximisation de leur capital, elle va profiter de sa situation (résultat d’investissements publics) pour fixer ses prix non en fonction des couts de production mais comme ses concurrents selon les règles du marché.
Là est le hic...
*

Le secteur privé esperait simplement que la libéralisation obligerait de fait E.D.F, à maintenir ses prix de vente au niveau des prix publics, et que les capitaux pourraient profiter de la rente différentielle, pour vendre de l’électricité au prix du marché. D’où la supplique : « EDF doit céder une part de sa production nucléaire aux fournisseurs présents en France et ce, en fonction de leur part du marché. EDF le ferait au coût de développement de l’EPR de série de façon à sauvegarder ses marges. Ce dispositif permettrait de rendre aux Français le bénéfice du nucléaire, de baisser les prix pour les gros industriels, et de faire vivre les « commercialisateurs » comme Direct Énergie. »

MAIS QUE FAIT LE POLITIQUE ?

Confronté à cette situation qu’ils ont eux-même créés, que font les politiques, les mêmes qui demandaient la libéralisation de l’énergie à Barcelone ? Au nom de la suépériorité du marché !! Ils ne disent pas comme pour les « licenciements Michelin », que face à la mondialisation, « ils n’y peuvent rien » car, élus par ce milieu là (le patronat), ils savent intervenir et corriger le marché : « « Fixer les prix du marché dérégulés pour les PMI-PME à partir du gaz et du pétrole pose un vrai problème alors que 82 %de notre électricité est d’origine nucléaire » , notait le 2 mai Pierre Méhaignerie, président UMP de la commission des Finances à l’Assemblée nationale » .

LE BEURRE ET L’ARGENT DU BEURRE

Jamais un proverbe populaire ne m’a semblé aussi juste qu’à la lecture des articles qui viennent d’être cités. Derrière le discours médiatique et la promotion de l’idéologie libérale, la privatisation de l’énergie cache :

- L’énergie est le produit d’une politique publique d’investissement, qui nécessite un temps long pour pouvoir être amorti, or le marché, ne sait pas penser au-delà du temps court .

- La politque énergétique a été le produit d’une histoire dans laquelle le politique était déterminant.

- Comme dans beaucoup d’autres secteurs (communication , médias , formation , transport terrestre et aérien ), le service public et l’Etat ont été les innovateurs. Les choix de développement fait dans le cadre d’un financement public de long terme ont permis d’obtenir à la fois la sécurité, la performance technique, et une difusion de masse (c’est ça qui crée le marché).

- C’est l’ensemble de ces caractéristiques, qui intéréssaient les entreprises et les capitaux en recherche de placements rentables et surs.

- Le secteur privé ne se comporte pas comme un innovateur mais comme un prédateur , car il comme les prédateurs , il sait où se trouve le gibier sain, et il sait le dépecer jusqu’à l’os.

La libéralisation de l’énergie appartient à cette situation d’un marché captif créé par le service public dans le cadre s’une politique industrielle de long terme qui a permis d’installer sur tout le territoire des installations technologiques et un réseau performant, qu’il suffit de s’approprier.

Il suffit de développer un discours idéologique, sur l’inefficacité du service public. Peut importe que la rengaine soit fausse, il suffit que les médias le répétent pour qu’il en reste quelque chose permettant au politique de justifier des décisions. Une fois celle-ci prise, les entreprise peuvent à la fois prendre le beurre (les équipements publics) et l’argent du beurre.

* désolé pour les fautes on n’est pas arrivés à corriger...



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