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Le Monde et les gaz chimiques : des invraisemblances médicales ?

samedi 1er juin 2013

Comme par hasard au moment où la France et les USA poussent à une intervention militaire contre la Syrie, et comme par hasard au moment où Carla Del Ponte et d’autres enquêteurs ont établi que des forces d’opposition ont employé des armes chimiques, voilà que survient un “témoignage” du Monde prétendant que l’armée syrienne les utilise.

Rappelons que ce journal n’en est pas à son coup d’essai. (Irak, Côte d’Ivoire, Libye...). Cet article intervient, et nous y reviendrons, au moment où le parti communiste turc remet en cause la version officielle sur les responsabilités de l’attentat et où de nouveaux éléments viennent si ce n’est contredire l’article du Monde du moins le tempérer fortement sur les responsabilités de la guerre chimique. L’horreur est là et les deux cemps s’en renvoient la responsabilité.

Un correspondant du quotidien vespéral français aurait été témoin de l’emploi d’armes chimiques par l’armée gouvernementale syrienne.

La description des symptômes endurés par les miliciens « rebelles » évoquent ceux produits par des gaz neurotoxiques.

Signes ophtalmologiques avec troubles visuels et une pupille ‘rétractée’, signes digestifs, vomissements et signes respiratoires décrits comme raclements et suffocation.

Le récit, espéré digeste grâce la petite touche littéraire avec le petit bruit de la canette non pas sur le comptoir d’étain mais un certain cliquetis à peine audible, produit des témoignages de ces combattants et d’un médecin.

Le photographe du journal le Monde (en lettres gothiques) aurait souffert de troubles visuels et respiratoires durant plusieurs jours.

Première invraisemblance du récit : les gaz neurotoxiques utilisés comme armes de guerre sont certes inodores et incolores, mais les signes digestifs sont sur le même plan que les signes respiratoires. L’antidote doit être immédiatement administré pour lever le blocage des terminaisons nerveuses sans quoi la paralysie est rapidement mortelle.

Deuxième incongruité. L’iconographie censée illustrer le texte montre un homme qui tente avec une seringue de prodiguer des instillations oculaires. Les effets des gaz neurotoxiques à pénétration cutanée et respiratoire n’ont aucune chance d’être levés par des lavages oculaires. Ceux-ci ne peuvent soulager qu’en cas de gaz irritants des muqueuses.

Troisième aberration. Le médecin rebelle rapporte le cas d’un combattant qui lui a été confié avec un rythme cardiaque fou. Le blocage enzymatique qui conduit à l’accumulation du neurotransmetteur l’acétylcholine induit surtout une bradycardie, et l’hypotension majeure par absence du tonus vasculaire est l’urgence absolue. On restitue une tension artérielle inexistante avant de vouloir contrôler un rythme cardiaque, même aberrant, même anarchique. Pour être rigoureux une phase d’hypertension avec tachycardie peut être observée dans les premières minutes de l’intoxication. Le délai nécessaire pour transporter un patient jusqu’à un centre de secours à travers le dédale imposé par une zone de guerre en milieu urbain exclut cette hypothèse.

Quatrième anomalie. La consultation de n’importe quelle encyclopédie en ligne indique comme symptôme cardinal des effets neurotoxiques les convulsions. Le sujet mortellement atteint suffoque dans un contexte de crises cloniques spectaculaires. Ce type de manifestations est si impressionnant que leur absence dans le roman permet de qualifier le récit de faux témoignage.

L’auteur à la fin de son article prend une précaution rhétorique. Il émet la possibilité de l’usage de plusieurs variétés de gaz toxiques par l’armée gouvernementale, solution élégante pour brouiller les pistes de l’usage d’un gaz mortel prohibé qu’il suggère fortement tout au long de son histoire très arrangée.

Cependant, sensation de brûlure oculaire et toux irritatives se rencontrent lors de l’exposition à des gaz lacrymogènes. À chaque dispersion de foules ou de manifestations par les CRS en France ou aux USA où l’usage des gaz poivrés connaît un regain, il faudra mobiliser la Cour européenne des Droits de l’Homme.

La publication de cet épisode survient au moment où les pays incarcérés dans l’Union Européenne ont décidé de suspendre officiellement l’embargo sur la livraison des armes à la rébellion en Syrie.

Elle est contemporaine également de la préparation des pourparlers en faveur d’un Genève II où devraient siéger les « belligérants » et les pays qui les arment et sans lesquels cette confrontation du bloc occidental avec les intérêts de puissances dites émergentes sur les décombres de la souveraineté de la Syrie n’aurait pas lieu.

Le régime syrien est explicitement accusé de crimes de guerre ou contre l’humanité au moment où plus de 15 000 soldats des armées impériales occidentales et de leurs vassaux subissent un entraînement intense en Jordanie. Cette préparation anormale sur le plan numérique indiquerait l’imminence d’une attaque type coalition contre l’Irak.

Déjà , les effets d’une dissémination du conflit au Liban se font ressentir.

Les escarmouches autour du plateau occupé du Golan entre Israël et des combattants du côté syrien signalent la possibilité d’un autre front. Un char d’assaut israélien y a été récemment détruit.

Ce que redoutent le plus les rares stratèges sionistes, c’est l’extension du chaos à la Jordanie. La version officielle de la neutralité israélienne est une légende de façade. Le soutien à la rébellion syrienne a pris de nombreuses formes, y compris celle d’une assistance logistique et médicale. Au-delà de leur crainte que des missiles russes S 300 soient opérationnels aux mains de la défense de la souveraineté syrienne, l’embrasement de la région aura un impact civil non négligeable sur une population israélienne prête à émigrer en cas de danger. En cas de conflit militaire généralisé, l’État-major sioniste n’oublie pas que les discours de Sayed Hassan Nasrallah ne sont pas des rodomontades. Le Hezbollah doit disposer d’un arsenal et d’un entraînement convaincants.

Badia Benjelloun

28 mai 2013

Transmis par Linsay

Messages

  • Bon, le quotidien de référence nous bourre le mou, c’est tristounet mais pas nouveau.
    Yougoslavie, Rwanda, Côte d’Ivoire, Libye etc : les affaires étrangères sont un sujet où la propagande prend le pas sur l’info, au Monde.
    A propos des indignés réprimés en Turquie, il me semble important de noter que les manifs sont aussi la suite d’une contestation depuis plusieurs mois de la politique d’Erdogan, notamment vis-à-vis de la Syrie.
    Le parti turc CHP participe à des rassemblements de protestation contre le bellicisme de l’AKP, contre le soutien actif qu’il octroie aux opposants armés à al Assad. La zone frontalière a subi une terrible récession économique du fait de l’arrêt du commerce avec le voisin syrien, et elle est envahie de troupes takfiristes qui agressent régulièrement les alaouites, nombreux dans cette région "récemment" annexée par la Turquie. Des slogans "on ne veut pas des réfugiés" mettent en évidence la générosité du gvt à l’égard des envahissants insurgés "syriens", alors que les minorités sont écrasées, que la majorité subit ...
    Pour ceux qui comprennent un peu le turc : la vidéo http://www.francetvinfo.fr/video-les-turcs-expriment-leur-colere-contre-... donne un exemple de ces manifs, quoique la traduction mensongère des slogans les transforme en colère contre... al Assad !

  • C’est reparti : largement médiatisé, le sinistre des affaires étranges brode sur « la certitude que le gaz sarin a été utilisé en Syrie à plusieurs reprises et de façon localisée ». Selon TF1 même (4 juin 20 h 15), les étatsuniens ne croient pas aux preuves de Fabius. Cela n’empêche pas le « responsable pas coupable » de surenchérir, sur la foi d’éléments foireux fournis par un reporter ad hoc et traités par nos services pas du tout indépendants.
    L’éventuelle utilisation d’armes chimiques par Bachar ou ses sbires (ou par ses ennemis !), outre qu’elle rappelle les ADM mensongèrement reprochées à l’Irak de Saddam, est depuis des mois un tel sujet de polémique... et de propagande qu’il faut un bon rabâchage à la Goebbels pour donner de la consistance aux accusations.
    Obama a beau lui susurrer « Couché, Rex, lâche le pantalon au Monsieur », la posture de L. Fabius assure le suivi : après le prochain fiasco des négociations de paix, c’est le sarin qui permettra de continuer à asticoter le régime, via mercenaires « incontrôlables », armes de plus en plus létales et tests ultérieurs de Tsahal. Surtout, le soupçon tient en respect les anti-guerre, labellisés « soutiens du dictateur sanguinaire ».
    En tout machiavélisme ! Car enfin, l’agent orange sur le Vietnam, ou le phosphore lancé sur Gaza et Falloujah ont fait tant de morts que les soupçons à l’égard du régime syrien sont véniels en comparaison. La guérilla urbaine menée par l’armée syrienne ne cadre pas avec l’élimination massive de civils. Et les composants chimiques ont été fournis par les démocraties...
    Malgré ça, Delenda est Damasco, quoiqu’il en coûte au peuple.

    Quand bien même la « ligne rouge » placée par Obama - à défaut d’accord contre la Syrie au Conseil de sécurité de l’ONU - serait franchie, on ne voit pas ce que gagneraient la France et la démocratie, à une escalade militaire en Syrie. Juppé puis Fabius ayant depuis deux ans empêché ou ralenti les négociations, l’un puis l’autre ayant soutenu à la fois une introuvable opposition unie et des groupes armés dont certains au moins se sont avérés terroristes, notre diplomatie s’attache à brandir des fioles comme ultime raison de ne pas être raisonnable. L’avenir des syriens sous le joug de salafistes n’est surtout pas évoqué, tant l’intérêt du peuple est un prétexte au chaos, « chaos constructif » du point de vue des « démocraties » occidentales et pétromonarchies.

    Une crédibilité proche de zéro n’a pas d’importance. Faut avouer que Fafa vit avec, depuis les nombreux renoncements (parjures) de son impopulaire majorité socialiste. Sur l’Europe, sur la croissance et l’emploi et la réduction des inégalités, sur la protection sociale (maladie, bientôt retraites) et le droit du travail (ANI), sur les services publics, sur le pouvoir des banques et du capital, etc. Sans oublier les escroqueries du responsable du budget couvertes (longtemps !) par ces faux vertueux de la gouvernance et de la démocratie.

    Alors, la France « roquet de l’empire » ? En dépit des airs patelins ou désolés de L Fabius, la qualification est de plus en plus pertinente : il ne lâche pas les basques de Bachar.

  • La journaliste syrienne W. Natour balaie les "preuves françaises"
    http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=c6mUe3Zrv38
    Syria reporter schools french reporter on Sarin Gas war crime

    En VF, ça donne :

    Q : Wafaa Natour, toujours sur le gaz sarin : même le journal Le Monde dit qu’il y a des preuves d’utilisation du gaz sarin.
    W.N. : Je confirme que du gaz sarin a été utilisé, mais par qui ? Qui sont les habitants de Khan Asal contre qui il a été utilisé ? Cela nous rappelle la propagande sur le massacre de Houla. Qui a massacré à Houla ? Qui commettait des massacres à la veille de chaque réunion du conseil de sécurité de l’ONU ? Et accusait le « régime » et l’armée ?
    Q : Il y a des preuves, avec les analyses d’échantillons du sol.
    W.N. : Preuve de journaliste français, cet échantillon du sol. Ouais. Une poignée de terre est apparue, et leur a dit « je viens de Syrie », et le drapeau syrien à deux étoiles était dessus, et elle leur dit « c’est l’armée [du régime] qui m’a aspergée »... C’est ça, les preuves de Mr Fabius ? Je peux donner à Mr Fabius des preuves venant de sites étudiés, d’usage d’armes à l’uranium appauvri. Qu’il utilise ces preuves contre Israël qui les a lancées au sud Liban, et contre les USA qui s’en sont servi en Irak par exemple.

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