Bras de fer explosif

jeudi 24 septembre 2009
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« Au Honduras, le retour clandestin du président déchu ravive les tensions », titre un quotidien du soir français, le 22 septembre (1). Est-ce à dire que, dans ce pays, les « tensions » s’étaient atténuées, après le renversement et l’expulsion du président Manuel Zelaya, le 28 juin dernier ?

Depuis ce jour, et alors que le Front national de résistance mène de puissantes mobilisations populaires, jamais la répression contre la population n’a cessé, au vu et au su de tous – mais n’émouvant guère les médias. Le 6 août – seize jours avant le retour de M. Zelaya –, le Comité des familles de détenus disparus au Honduras (Cofadeh), comptabilisait deux mille sept cent deux arrestations illégales et neuf meurtres, « certains commis par des militaires habillés en civil » (2). Le bilan s’est alourdi depuis. Mis en sommeil à la fin des années 1980, des escadrons de la mort ont diffusé une liste de cent vingt syndicalistes à abattre. Faut-il s’en étonner ? Le conseiller spécial à la sécurité du « golpiste » Roberto Micheletti n’est autre que M. Billy Joya, ex-membre du Bataillon 3-16, unité militaire responsable de la disparition de cent quatre-vingt-quatre personnes et de l’assassinat de dizaines de militants de gauche, précisément au cours de ces années 1980.

Après deux tentatives infructueuses, les 5 et 24 juillet, le président légitime est donc parvenu à rentrer clandestinement à Tegucigalpa – pour y entamer des négociations avec les secteurs politiques du pays. Il a trouvé refuge dans l’ambassade du Brésil, avec l’accord préalable du président Luiz Inacio Lula da Silva. Preuve, s’il en était besoin, que le sort du Honduras ne provoque pas l’intérêt du seul « déstabilisateur régional » Hugo Chávez.

Les quelque quatre mille partisans de M. Zelaya, qui avaient passé la nuit devant l’ambassade en ont été très violemment délogés – deux morts et trente blessés – le 22 septembre à l’aube. Alors qu’était annoncée une visite de M. Miguel Insulza, secrétaire général de l’Organisation des Etats américains (OEA), M. Micheletti a ordonné la fermeture de tous les aéroports du pays.

Les forces de l’ordre cernent l’ambassade du Brésil, privée d’eau courante, d’électricité, de téléphone, et où la nourriture commence à manquer – bien qu’elle ait été ravitaillée en vivres, le 22 septembre, par la représentation de l’Organisation des Nations unies (ONU) à Tegucigalpa.

Malgré le couvre-feu, la résistance populaire ne fléchit pas. Les médias non inféodés aux putschistes ont été fermés et les forces de l’ordre répriment toute manifestation. Tandis qu’on recense une centaine de blessés dans les hôpitaux de la capitale, plusieurs milliers de personnes ont été arrêtées dans l’ensemble du pays. A Tegucigalpa, entre deux cents et quatre cents d’entre elles sont regroupées… dans le stade Chochy Sosa.

Trente-six ans après les stades de Santiago du Chili.

Maurice Lemoine

Transmis par Linsay

(1) Le Monde, daté 23 septembre 2009.

(2) Pagina 12, Buenos Aires, 6 août 2009.



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