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Ouagadougou, une capitale au luxe obscène.

samedi 23 septembre 2006

Dans le quartier Ouaga 2000, l’élite du pays étale sans retenues ses nouvelles richesses.
Alors qu’à quelques mètres de là , des enfants meurent faute de nourriture et de médicaments.

Il semble que Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso, soit l’une des rares villes de l’Afrique subsaharienne à s’embellir.

 Les rues des grands axes sont très propres, les nouveaux bâtiments s’alignent et la réfection des anciens bâtiments, surtout des ministères se poursuit.

 Une nouvelle banque du sang a été érigée, mais, si vous avez besoin de sang pour un proche, mieux vaut y aller avec quelques amis qui veulent donner leur sang.

 Un magnifique bâtiment pour le secrétariat de la lutte contre le sida, mais pas de gratuité pour les médicaments des sidéens.

 Il est question aussi - c’est le président Blaise Compaoré lui-même qui en a parlé - d’un nouvel aéroport, comme par hasard à Ziniaré

 Pourquoi ?

 L’aéroport de Ouagadougou n’a même pas cinquante vols par semaine, un peu moins que Schiphol, l’aéroport d’Amsterdam, par heure.

 Mais pas d’argent pour diminuer la taxe sur le carburant, pour lutter contre la flambée de son prix, qui affecte tous les citoyens sauf le pauvre, qui n’a même pas une lampe-tempête.

 Si vous allez à Ouaga 2000, c’est encore mieux ou peut-être pire.

 Je ne connais aux Pays-Bas aucun site aussi somptueux que Ouaga 2000.
Là -bas, il y a aussi des bâtiments somptueux, mais regroupés comme à Ouaga 2000, certainement pas.

 Une salle de concert digne de Vienne, un monument des martyrs, et, ailleurs à Ouaga, un monument des héros, tous les deux plus grands et plus somptueux que ce que je connais aux Pays-Bas.

 Les agriculteurs tirent le diable par la queue, mais le nouveau ministre chargé de l’Agriculture à Ouaga 2000 va certainement les tirer de leur misère une fois que ce bâtiment aura été payé : un petit, pardon, un grand bijou !

Je ne parle pas des villas ni des châteaux privés que certains salariés habitent mais qu’ils peuvent difficilement payer avec des salaires burkinabés.

 Un nouveau palais de justice, une Cour de cassation.
Un complexe libyen avec hôtel ou tu paies plus pour une bouteille de Fanta que ce que gagne un cireur de chaussures par jour.

Egalement une nouvelle présidence. Une présidence au centre-ville, un petit palais privé à Ziniaré, un pied-à -terre à Bobo-Dioulasso (la ville la plus importante après Ouagadougou), ect., ne suffisent pas au président alors que plus de 40% de ses compatriotes vivent dans des habitations insalubres.

J’ai été avec des amis européens à Ouaga 2000.

Je leur ai montré quelques châteaux appartenant à des particuliers.
Ils ne voulaient pas me croire.
Nous nous sommes approchés d’un "château" et j’ai demandé si M. Nasré était à la maison.
Non, me répondit-on, vous devez vous tromper, ici c’est l’habitation de M. Kaboré (nom fictif).

Mes amis n’en croyaient pas leurs oreilles.

 Je suis content que Ouaga soit une ville propre.
Honneur au maire, Simon Compaoré.

 Je suis content que Ouaga soit une belle ville et qu’elle ait des infrastructures modernes.

 Mais je trouve que la personne humaine est plus importante.
La vie est de plus en plus chère, l’enseignement privé va encore augmenter les frais de scolarité, des enfants ne peuvent pas aller à l’école car les parents ne peuvent pas payer leur scolarité et, entre-temps, on bâtit des choses du plus grand luxe.

 Faites ce qui est nécessaire pour une capitale qui se respecte, mais ne faites pas de luxe quand les citoyens croupissent dans la misère.

 Encore une autre présidence.

 Pourquoi ?

-Je suis allé voir une famille à cinq kilomètres de là et on m’a dit :
"Mon père, cela n’arrive pas plus de deux ou trois fois par mois, mais parfois nous et nos trois enfants nous allons nous coucher sans avoir mangé de toute la journée".

 Ou cette autre femme, à qui je demande des nouvelles de la santé de son enfant, qui me répond :
"Aline est décédée il y a trois jours, après un accès de paludisme ; je n’avais pas d’argent pour payer les médicaments."

 J’ai demandé à voir l’ordonnance :
2 250 francs CFA (3,5 euros).

 Morte par manque de 2 250 francs CFA.**

 Ce ne sont pas des exceptions : il y a des centaines de cas par jour.

Mon coeur se serre quand je vois ces beaux bâtiments ou cette nouvelle présidence.

Paru dans "Le Courrier international".

Transmis par Linsay.

Messages

  • je trouve cet article très intéressant. J’aimerais bien trouver (gratis sur le net, car je suis ASS, c’est à dire pauvre) une explication historique et politique de cette situation.

  • C’est un reel plaisir pour moi de partager avec vous mon point de vue apres lecture de votre article intitule "Ouagadougou, une capitale au luxe obscene".
    En effet je suis un Burkinabe vivant au Burkina Faso.Heureusement pour moi, j’ai pu connaitre d’autres pays africains et Europeens (France, Allemagne, Luxembourg...). ces voyages m’ont permi de me debarrasser de certains cliches de la vie.
    Dans l’histoire de l’humanite, le developpement d’une cite n’a jamais ete homogene encore moins equitable. Le burkina Faso est certe un pays parmi les plus pauvres au monde, mais il lui revient aussi le droit d’ameliorer sa cite. Il faut que le Burkinabe soit fier de son pays et y vivre.Le developpement en son sens n’exclut aucune priorite. combattre la pauvrete, a mon avis n’est pas seulement manger a sa faim et de pouvoir se soigner. meme si c’etait le cas, le gouvernement en depit de la maigre richesse du pays fait un effort pour satisfaire son peuple qu’il aime tant.Le combat actuel n’est pas seulement une affaire du Gouvernement mais plutot de tout le monde.
    Il faut que nous prenions conscience de notre etat, de notre situation. le probleme Africain surtout Burkinabe reside dans la mentalite. Il ne faut pas toujour voir en mal ce que le Gouvernement actuel fait. aujourd’hui on peut cultiver sur toute l’annee en depit des alleas climatiques, les livres sont gratuits dans les ecoles primaires, les grands centres sont desservis par les voies de bitume. comment peut-on combattre la pauvrete sans veritable voies de communication ? sans creer des emplois ? les Hotels ´a Ouaga 2000, a ce que je sache, se ne sont pas des indiens ou des cambodjiens encore moins des Afghans qui y travaillent, mais plutot des Burkinabes. ces maisons luxees dont vous parliez , qui assure la securite ? c’est aussi des burkinabes. ce sont des exemples parmi tant d’autres.
    Vous qui parlier, pouvez-vous me dire de facon concrete ce que vous apportez comme contribution au combat contre la pauvrete.
    Pour rappel, je travail dans le monde rural en occurence dans le domaine de l’agriculture, donc en contact avec le monde paysan. pour un seul moulin, les habitants d’un village quelconque doivent attendre une faveur d’un projet quelconque, alors que des fils qui sont soit a Ouaga soit expatries sont en mesure d’en fournir dix (10).
    Je ne pourrai pas tout dire dans ces ecrits. peut etre qu’on trouvera un cadre plus ideal pour en debattre.
    Laisser les dirigeants de ce pays travailler dans la tranquilite pour la bonne marche de la notion.

    Mes sinceres respects.

    Mien Abdoul. mienkarim@yahoo.fr

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