Les hésitations des « Renault-Flins » en proie au chômage partiel

mercredi 21 février 2007
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A l’usine Renault de Flins (Yvelines), le président de l’UMP est encore loin d’être devenu un héros de la classe ouvrière.

Mais lorsque l’on interroge les membres de l’équipe de l’après-midi, qui prennent leur poste à 13 h 5, tout le monde n’est pas contre lui. « Sur la délinquance, il sait bien expliquer les choses », commente Mélanie, âgée d’une vingtaine d’années. En revanche, les propositions du ministre candidat dans le domaine de l’emploi, en particulier son invitation à « travailler plus pour gagner plus », la laissent perplexe. « Lorsqu’il n’y a plus de travail, comme c’est le cas aujourd’hui, nous autres intérimaires sommes jetés comme des Kleenex, soupire la jeune fille qui assure ignorer en faveur de qui elle glissera son bulletin dans l’urne. Ce qu’il faudrait, ce sont de vraies embauches. »

Mais à Flins, on n’embauche pas. L’établissement (4 500 salariés) ne tourne que quatre jours sur cinq et multiplie les mesures de chômage partiel. On y produit la Clio et, pour quelques semaines encore, la Twingo. Dès cet été, la deuxième génération de la petite Renault sera produite dans l’usine de Novo Mesto, en Slovénie.

« TRAVAILLER PLUS, POUR GAGNER PLUS, C’EST DU PIPEAU INTÉGRAL »

« Notre gros problème, ce sont les délocalisations mais Sarkozy n’y peut pas grand-chose. La seule issue est d’apporter la démonstration qu’à Flins, nous sommes capables de fabriquer de très bonnes voitures avec un excellent niveau de qualité », insiste Dominique, 49 ans. Ce chef d’équipe aux cheveux poivre et sel ne fait pas mystère de la sympathie que lui inspire le président de l’UMP. « Je l’aime bien. Il apporte sa jeunesse, va sur le terrain, parle aux ouvriers. Et puis, il parle clairement. Mais il ne faudrait pas qu’il revienne sur les 35 heures, poursuit-il après un silence. Cet acquis-là, au moins, il faut le garder. »

Parmi le personnel ouvrier, les anti-Sarkozy sont les plus loquaces. « Dans le contexte actuel, travailler plus pour gagner plus, c’est du pipeau intégral », lâche sans ambages Richard, tenté de voter Besancenot « à moins que cela risque de faire perdre une voix contre Sarkozy ». « Les heures supplémentaires ne se décrètent pas », fait remarquer de son côté Bruno Chirra, secrétaire de la section CFDT de Renault-Flins. « En revanche, ajoute le syndicaliste, Nicolas Sarkozy est capable de nous faire travailler plus longtemps en retardant le départ en retraite alors que les bilans médicaux réalisés par la direction sont alarmants. Comment voulez-vous maintenir en poste tous ces gens que la chaîne a usés ? »

LES « ATELIERS » NE VOTENT PAS COMME LES « BUREAUX »

« Retarder le départ en retraite des cadres ou même des agents de maîtrise, pourquoi pas ? Mais pas pour les ouvriers », enchérit Guillaume, 27 ans, qui s’apprête à prendre son poste. Pour autant, le jeune homme, qui a voté « à gauche » en 2002, n’exclut pas d’apporter son suffrage au candidat de l’UMP. « Il y a du bon et du moins bon dans ce que dit Sarkozy », considère-t-il. Son collègue Ludo, 26 ans, qui dit avoir « voté ras-le-bol » - comprendre : Front national - lors de la dernière présidentielle, se situe « sur la même longueur d’ondes ». « A Flins, envisager de voter Sarkozy, c’est tabou. J’attends d’avoir tous les éléments avant de me décider. »
Max, 43 ans, qui attend sur le parking de l’usine le départ des cars qui ramènent chez eux les membres de l’équipe du matin, sait pour qui il votera. Ce sera « Ségolène ». « J’attends avec impatience le face-à-face télévisé avec Sarkozy », assure cet opérateur à l’atelier-peinture qui dit avoir longtemps éprouvé « un manque ». « C’est bien qu’elle ait annoncé la couleur. Ca commençait à faire long, vous ne trouvez pas ? »

Située entre les quartiers difficiles de Mantes-la-Jolie et des Mureaux, l’usine de Flins fait écho aux inquiétudes et aux tensions de la banlieue. A ses mobilisations, aussi. « En parlant de ’racaille’ et en menaçant de manier le Kärcher, le ministre de l’intérieur a manqué de respect aux jeunes des cités, lance Abdel en courant vers les cars. Autour de moi, vous n’imaginez pas le nombre de gars qui se sont inscrits sur les listes électorales à cause de ces deux mots-là et avec une seule idée en tête : faire échec à Sarko. »

Derrière lui, Joël, 56 ans, presse le pas. En poste au service des pièces détachées, cet électeur de Jean-Marie Le Pen au premier tour du dernier scrutin présidentiel avant de rallier Jacques Chirac au second, ne s’est pas encore décidé. « Ici, les ateliers sont plutôt anti-Sarkozy et les bureaux plutôt pro-Sarkozy. Mais tout le monde nourrit la même crainte : que ça bouge très fort dans les quartiers s’il est élu. »

Source : Le Monde

Transmis par Linsay

Curieux cet intéressant article, il n’y a donc à Flins que ces hésitations et ces convictions là ?



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