Coup d’Etat

samedi 8 août 2009
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De l’Organisation des Etats américains (OEA) à l’Organisation des Nations unies (ONU), en passant par l’Union européenne et le président des Etats-Unis Barack Obama, la réaction a été unanime : une condamnation sans appel du coup d’Etat qui, le 28 juin, a renversé le chef de l’Etat hondurien Manuel Zelaya, expulsé manu militari au Costa Rica. Evoquant le « retour immédiat du président Zelaya au poste et aux fonctions que la souveraineté populaire lui a octroyés », le président de l’Assemblée générale de l’ONU, M. Miguel d’Escoto, a affirmé d’emblée : « Aucune autre option ne sera acceptable par la communauté internationale [1]. »

Certains s’interrogeaient toutefois sur la légitimité de l’« ex-président »(!), qui avait « violé la Constitution » en prétendant la modifier « pour pouvoir postuler un nouveau mandat » lors de l’élection présidentielle du 29 novembre prochain [2].
Erreur (ou mensonge).
Appuyé par quatre cent mille signatures, le chef de l’Etat avait simplement prévu d’organiser, le jour du scrutin, auquel il ne pouvait se présenter — la Constitution de 1982 restant en vigueur jusqu’à nouvel ordre —, une « consultation » à caractère non contraignant demandant aux Honduriens s’ils désirent ou non, à terme, la convocation d’une Assemblée nationale constituante.

L’actuelle Constitution a la particularité de comporter plusieurs articles — artículos pétréos — qu’elle « interdit » de réformer de quelque manière que ce soit et dont l’un traite de la non-réélection du président (art. 4). Une curieuse camisole de force imposée au peuple, auquel, en principe, appartient la « souveraineté dont émanent tous les pouvoirs de l’Etat [3] ». C’est, dit-on, pour avoir « envisagé » une révision de la Charte fondamentale — bien au-delà du thème de la réélection ! — que M. Zelaya a été défenestré. En réalité, il a commis trois péchés capitaux : venu du centre droit (Parti libéral), il a rompu avec les élites politico-économiques qui règnent sur le pays ; augmenté le salaire minimum de 60 % ; adhéré à l’Alliance bolivarienne pour les peuples de notre Amérique (ALBA), rejoignant ainsi le camp — Bolivie, Cuba, Equateur, Venezuela, etc. — qui prône la rupture avec le néolibéralisme. C’est le « maillon faible » de cette organisation que la droite continentale vient d’attaquer.

En avril 2002, le président George W. Bush avait appuyé la tentative de renversement de M. Hugo Chávez, au Venezuela. M. Obama, lui, s’est joint à la condamnation générale du putschiste Roberto Micheletti. Mais, alors qu’il déclarait : « l’unique président du Honduras est Manuel Zelaya », la secrétaire d’Etat Hillary Clinton, elle, a offert un ballon d’oxygène aux golpistas en proposant une médiation du président costaricien Oscar Arias, mettant, de fait, l’OEA et ses gouvernements de gauche hors jeu.

A Washington, de fortes pressions s’exercent contre M. Zelaya. Le Pentagone possède au Honduras, à Palmerola, une base militaire considérée comme stratégique. Or il vient déjà de perdre celle de Manta (Equateur, pays membre de l’ALBA), fermée à la demande du président Rafael Correa. Nommé par M. Bush en septembre 2008, l’ambassadeur américain Hugo Llorens était, en 2002 et 2003, le directeur des affaires andines (concernant le Venezuela, au moment du coup d’Etat) au Conseil de sécurité nationale (NSC). Dans les jours précédant le 28 juin, il a participé, d’après le New York Times (30 juin), à de nombreuses réunions avec les « responsables militaires et des leaders de l’opposition ».

La principale proposition de M. Arias — un gouvernement de réconciliation nationale (c’est-à-dire un retour de M. Zelaya à la présidence, mais sans pouvoir réel) — a été refusée par le chef de l’Etat. Elle a aussi été repoussée par M. Micheletti, au grand courroux de Mme Clinton, qui lui offrait sur un plateau une sortie de crise en partie victorieuse.

Double jeu de Washington ? Divergences entre la Maison Blanche et le binôme département d’Etat - Pentagone ? Si force n’est pas rendue au droit et/ou si le Honduras sombre dans la violence, le crédit de M. Obama se trouvera sérieusement entamé auprès d’une Amérique latine qui l’avait accueilli avec espoir et sympathie.

Article de Maurice Lemoine transmis par Linsay.

En documents joints les résolutions de l’OEA et de l’ONU et un article de Fidel Castro "Le médiateur Arias est un allié fidèle des Etats Unis" donnant des éléments historiques essentiels


[1BBC Mundo, 29 juin 2009.

[2Thèse évoquée par LeMonde.fr (29 juin) et soutenue sans réserves, entre autres, par El País (Madrid , 29 juin), Libération (Paris, 30 juin), The Economist (Londres, 2 juillet).

[3Article 2 de la Constitution.



Documents joints

Fidel Castro sur Arias
Résolution <span class="caps">ONU<
Résolution <span class="caps">OEA<

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