David Douillet : catégorie poids lourdingue.

lundi 15 août 2011
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A 42 ans, le judoka préféré de Bernadette, qui détient la médaille d’or du fayotage sarkozyste, a décroché à l’usure son strapontin ministériel de VRP électoral.

Vous avez dit bizarre ?.

Même François Fillon trouve « bizarre » la récente nomination imposée par Sarko du double champion olympique de judo David Douillet au poste improbable de secrétaire d’Etat aux Français de l’étranger (« Le Canard », 27/7).

Un portefeuille créé de toutes pièces, mais pas vraiment sur mesure (117 kg pour 1,96m), alors que l’intéressé était depuis deux ans annoncé au ministère des Sports, y compris par lui-même...

Depuis son entrée au gouvernement, Douillet, qui commercialise toujours sous son nom rameurs et vélos d’appartement, galère pour justifier sa nomination :

« Lorsqu’il est venu déjeuner avec nous, explique le socialiste Richard Yung, l’un des 12 sénateurs des Français de l’étranger, il s’est lancé dans un long développement sur l’importance du sport dans la diplomatie... »

Dans une interview à « Paris Normandie » (1/8), le judoka quadruple champion du monde pédale de plus belle :

« Nicolas Sarkozy et Alain Juppé (...) m’ont dit que j’étais l’homme de la situation. En fait, c’était juste intelligent. ».

Merci pour eux !.

"Car, en réalité, je suis un Français de l’étranger quelque part depuis l’âge de 30-32 ans, je les ai côtoyés avec l’équipe de France.
(...) Je n’ai pas fais le rapprochement au départ, mais quand j’ai commencé à réfléchir à la problématique, cela est devenu clair".

Une petite ampoule s’est-elle allumée au-dessus de sa coupe en brosse ?

L’effort a dû le terrasser, car, depuis, Douillet, laissant son cabinet sur le pont s’occuper des assassinats de touristes, est parti en vacances faire du vélo dans le Var, à l’instar de son bien-aimé président.

En bon fayot qui, au moment de l’affaire de l’Epad, comparait Jean Sarkozy au jeune judoka surdoué Teddy Riner ?

« Il ne peut plus faire que du vélo comme sport, car il a le dos en compote ! » le défend son chef de cabinet, Gérald Darmanin, qui cite l’existence d’un ministère des Citoyens établis à l’étranger au Portugal.

« Et au Mali ! » rigole un ministre.

Deus pays d’émigration... Sarko chercherait-il à pousser les Français vers la sortie ?.

Agent électoral XXL.

En clair, le job de Douillet consiste à chouchouter les 2,2 millions d’expatriés qui vont élire pour la première fois leurs 11 députés des Français de l’étranger.

Le ministre des Transports, Thierry Mariani, qui doit se présenter dans la circonscription Asie, l’avoue sans fard :

"Les Français de l’étranger votent de moins en moins à droite :
En 2007, Sarkozy a fait 54%, un point seulement au-dessus de son score national de 53%".

Et le président souhaite verrouiller dare-dare ce réservoir de voix.

Par Ippon ?.

Pour le reste, le décret d’attribution de Douillet limite sévèrement son rayon d’action stipulant que le secrétaire d’Etat « connaît des affaires relatives aux Français de l’étranger » seulement si le ministre Juppé les « lui confie », et sans même avoir la tutelle de la Direction des Français de l’étranger au Quai d’Orsay !

Le sous-ministre est d’ailleurs le dernier du gouvernement dans l’ordre protocolaire.

En un mois, dixit son chef de cab, Douillet a déjà visité 13 pays, et il en visitera 30 autres d’ici à décembre...

Des déplacements « inimaginaux », selon le lapsus qu’il a commis dès le lendemain de sa nomination, le 29 juin.

« Son numéro est déjà bien rodé, rigole le sénateur PS Yung, il fait une réception à l’ambassade pour la communauté française, et tout le monde se rue pour être pris en photo avec lui. C’est simple, la politique, non ? ».

Simple comme une tournée en TGV spécial « Pièces jaunes » avec Bernie, sa première protectrice.

Sous-ministre à tout prix.

Depuis son élection comme député des Yvelines à l’occasion d’une législative partielle en octobre 2009, Douillet s’impatientait de ne pas entrer au gouvernement.

Il s’y voyait à chaque remaniement, renouvelant sans cesse ses offres de service.

Exemple : « Si Nicolas Sarkozy me proposait [le portefeuille des Sports],, j’accepterais » [1], une phrase qui lui a valu, l’été dernier, d’être sèchement remis à sa place par la titulaire du poste, Rama Yade :

« Il mériterait la ceinture noire du ridicule ».

Et aussi la ceinture blanche du travail parlementaire : d’après les tables nominatives, il totalise en un an et demi deux questions au gouvernement et quatre séances où il est intervenu sur un texte !.

Et il n’a assisté qu’à un tiers des réunions de la commission des Affaires culturelles, selon « Rue 89 » (12/7).

Son principal fait d’armes dans sa circonscription : avoir obtenu la fermeture prochaine de la maison centrale de Poissy, une des rares prisons françaises plébiscitée par les détenus.

En novembre 2010, Douillet, furieux de voir les Sports lui échapper in extrémis au profit de Chantal Jouanno, a boudé plusieurs semaines l’Assemblée, se souvient le député UMP Damien Meslot, qui le fréquente au sein du groupuscule de 15 élus créé par l’Elysée pour contrer Copé ainsi que dans le cercle plus large des proches de Xavier Bertrand.

Car c’est l’actuel ministre du Travail qui a véritablement lancé sa carrière politique, en le nommant secrétaire national de l’UMP aux Sports en mars 2009 et en le poussant à se présenter dans les Yvelines puis aux régionales de 2010.

Douillet semble, au passage, avoir oublié ses premiers mentors, les Chirac.

Jacques, dont il était le sumo attitré, et qui l’avait fait nommer au Conseil d’analyse de la société de ce cher Luc Ferry en 2004, l’année même où il était confortablement embauché à la direction des sports de Canal Plus.

Et Bernadette, avec qui il affirme sans rire ne jamais avoir fait de politique.

Ou alors à son insu, pendant l’opération « Pièces jaunes » ?

Le tataministre contre les « tapettes ».

Il a pourtant des affinités avec elle :

« Il appartient à la droite dure, traditionnelle, voire nationaliste, opposée au mariage homosexuel et prônant le respect du drapeau », explique un jeune ministre qui le trouve « très sympa et malin ».

Dans son autobiographie, « L »âme du conquérant«  [2], Douillet défendait crûment sa conception de la »femme au foyer" :

« Si Dieu a donné le don de procréation aux femmes, ce n’est pas par hasard ».

Le rappel d’une autre phrase par « Le Canard » (4/11/09) a provoqué sa fureur :

« On dit que je suis misogyne. Mais tous les hommes le sont. Sauf les tapettes ! »

« Tapettes » n’étant pas une injure homophobe, selon lui, mais devant être entendu au sens d’« homme qui ne s’assume pas ».

Un terme technique, en somme.

Douillet est un faux gentil qui peut s’énerver.

Dans son instructive bio [3], le journaliste Arnaud Ramsay rappelle l’affaire Travelstore, cette agence de voyages où le judoka avait investi, et dont la faillite frauduleuse en 1997 lui avait valu e, 2000 une mise en examen pour « complicité et recel de banqueroute par détournement d’actifs », suivie, en 2002, d’une amnistie taillée sur mesure par Chirac (au cas où il aurait été condamné), et finalement un non-lieu, en 2004.

Son ex-associé a témoigné sur PV que Douillet était venu récupérer, séance tenante, sa mise de 400 000 francs de manière musclée...

Sur le plateau de Ruquier, en janvier 2009, le comique Jonathan Lambert rappelait aussi à Douillet, hilare, un épisode de jeunesse :

Il a un jour chopé le joueur de pingpong qui partageait sa chambre à l’Insep et l’a tenu par les chevilles au-dessus du vide pour qu’il accepte de troquer sa thurne [4]...

Pourvu que Sarko ne finisse pas suspendu au bout de sa pogne à une fenêtre de l’Elysée !.

Par David Fontaine dans Le Canard enchaîné du 10/08/2011

Transmis par Linsay


[1Var-Matin 22/7/10

[2Robert Laffont, 1998

[3Editions du Moment, avril 2011

[4terme d’argot pour désigner une chambre universitaire



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