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Entretien avec Jelloul Ben Hamida sur la situation en Tunisie
dimanche 10 février 2013
Au lendemain des manifestations qui se sont tenues dans plusieurs villes de France en solidarité avec le peuple tunisien et contre le pouvoir fascisant, nous avons rencontré Jelloul (pris ici en photo lors d’une manifestation à Dakar en 2011), membre du Front populaire nouvellement créé pour recueillir son sentiment sur la situation actuelle
Tout d’abord je veux te dire que Chokri était un ami. C’était le secrétaire général du parti des patriotes démocrates unifié, un des leaders du front populaire qui regroupe 17 partis et des personnalités. Ce front est un pilier de la construction d’une république laïque sociale et démocratique.
Chokri n’était pas le seul menacé, les salafistes ont établi des listes noires de gens à éliminer. Tout ça on le savait. Chokri le savait, mais il disait "je suis un fils du peuple, que veux-tu qu’on me fasse, on ne peut pas tuer tout le peuple". Il était très populaire. En tant qu’avocat il a défendu les gens du bassin minier et de Gafsa et dans cette région tout le monde le connait. Du temps de Benali il a même défendu les salafistes et les gens d’Ennahda emprisonnés sous Ben Ali car la liberté ne se divise pas. Les mêmes qui sont au pouvoir aujourd’hui.
Il faut voir que ce meurtre se situe dans un contexte où se multiplient les attaques contre les lieux culturels, contre tous les symboles de liberté et d’émancipation. Récemment un autre militant a été assassiné à Tataouine , Ennahda demande la libération de ses assassins. On est bien dans un contexte de tentative de mise en place d’une politique de la peur et donc de la soumission.
C’est aussi dans ce contexte qu’il faut apprécier la journée des funérailles de Chokri. L’appel à la grève générale lancée par le Front pouplaire a été massivement suivi et près d’1 million et demi de personnes sont descendus dans les rues (pour un pays qui compte moins de 11 millions d’habitants !).
A l’enterrement c’est une véritable marée humaine qui a accompagné Chokri au cimetière. C’est du jamais vu.
Ennahda peut dire ce qu’il veut, le peuple a désigné ses dirigeants comme les commanditaires
Des funérailles impressionnantes pour Chokri Belaïd . Chokri Belaïd, a eu droit à des funérailles grandioses, émouvantes et extrêmement politiques. Des dizaines de milliers de Tunisiens l’ont accompagné à son dernier repos au cimetière du Jellaz, à Tunis. Pour une très rare fois, et à la demande expresse de la veuve du leader, les Tunisiennes ont pu se rendre au cimetière. L’artiste Amel Hamrouni disait l’importance pour elle que les femmes ont imposé leur présence au cimetière, chose extrêmement rare, voire unique en terre d’Islam. « Ces vieilles coutumes m’ont empêché d’enterrer moi-même un bébé mort prématurément. Casser cette interdiction a plusieurs significations », a-t-elle lâché, fort émue. Basma Khalfaoui, veuve de Chokri Belaïd et militante féministe acharnée, avait appelé ses concitoyennes à braver cet interdit culturo-religieux et à venir massivement pour honorer la mémoire de l’homme politique. Digne dans la douleur, Basma Khalfaoui a suscité l’admiration de tout un peuple en prononçant des paroles qui resteront gravées dans la mémoire collective. « Pleurer, j’aurai le temps. Ce n’est pas grave. Maintenant, il faut lutter », a-t-elle asséné, quelques heures après l’assassinat du père de ses deux fillettes. |
Le Front populaire une force qui monte face à la politique du pouvoir
Le peuple a fait la révolution pour la liberté et la dignité et aujourd’hui nous n’avons ni l’un, ni l’autre. Les premières mesures prises par le pouvoir ont toutes été des mesures libérales, en particulier les privatisations. Heureusement qu’il y a l’UGTT car c’est elle qui a arrêté les mesures de privatisation de l’appareil de santé. Ennahda et ses alliés sont pour suivre les consignes du FMI comme du temps de Benali : le peuple n’a pas fait la révolution pour cela. C’est dans ce contexte que le Front populaire a refusé l’offre de rencontre du FMI car tout doit se faire dans la transparence, il faut que notre peuple sache
Le Front Populaire refuse l’offre du FMI d’avoir une rencontre en privé. . En effet, le FMI a imposé au peuple tunisien durant 23 ans, en s’appuyant sur la dictature de Ben Ali, une politique antisociale et antidémocratique qui a fait beaucoup de ravages (chômage, pauvreté, corruption et dictature..). En revanche, le Front Populaire propose au FMI une rencontre publique lors d’un débat télévisé. |
Aujourd’hui, le Front populaire réclame :
– La démission du gouvernement
– Que les députés issus des organisations démocratiques gèlent leur participation aux assemblées
– La tenue d’un congrès de salut public national pour organiser des élections afin d’éviter la guerre civile dans laquelle le pouvoir veut nous entraîner.
[1] et du parti ouvrier tunisien, exPCOT
[2] D’après plusieurs articles de presse dont Le soir de Belgique et Temps réel
[3] source Le Front populaire