Flavio Briatore : Le mur de l’argent.

lundi 28 septembre 2009
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Exclu des circuits à vie pour avoir contraint l’un de ses pilotes à prendre un mur, ou la porte, l’ex-patron de Renault F1 est le symbole très emblématique d’un sport pourri par le fric.

« SURTOUT, ne me citez pas, sinon je me retrouve dans le lac de Genève avec du ciment aux pieds ».

Ils sont ainsi, les habitués du paddock, toujours à exagérer !.

Leur demande-t-on de parler de Flavio Briatore, à l’origine du « Renaultgate », ils exécutent l’Italien, tombé la semaine dernière au champ du déshonneur.

Certes, il est le premier patron d’écurie de Formule 1 banni pour avoir exigé de l’un de ses pilotes qu’il s’explose dans un mur sinon il prenait la porte !

Mais de là à noircir la gomme !.

Et pourquoi ne pas aggraver son cas en rappelant qu’il avait choisi… Palerme, où il a des amis, pour parrainer les Renault de la saison 2004 ?

La Sicile, c’est tout de même plus sexy que Billancourt, et il ne faut pas désespérer la F1, non ?.

Briatore restera dans l’histoire du sport, comme l’un de ses pires tricheurs.

Ses détracteurs diront qu’il n’en était pas à son coup d’essai.

« L’Espresso », en 2005, racontait qu’il avait été deux fois condamné en Itralie dans les années 80 pour trafic de jeux

Les spécialistes se souviendront encore qu’avant Singapour il y avait eu Adélaïde, en 1994, où Schumacher avait embouti Damon Hill pour l’empêcher de devenir champion du monde.

Briatore était alors le patron du pilote allemand, mais que pouvait-t-il contre la maladresse de ses coups de volant ?.

Les jaloux lui en prêtent beaucoup car on ne prête qu’aux lauréats du bouclier fiscal.

Briatore a ses associés aux îles Vierges et de quoi voir venir.

Il débarque au Grand Prix de Monaco avec « Force Blue », son yacht de 65 mètres , de 123 millions d’euros.

Cela a une autre gueule qu’une arrivée en Clio et ça économise une chambre d’hôtel à la Régie.

Flavio a des défauts, mais une grande qualité : il a le sens du spectacle.

Le public de la F1 veut du sang et des larmes, il l’a comblé.

En lui servant un accident qui déjoue les pronostics et érige en vainqueur celui qui est parti en dernier.

Avec lui, au moins, la F1 change de tête…

Il n’y en avait autrefois que pour les pilotes et la belle mécanique.

Briatore a eu à cœur de privilégier aussi les beaux chassis.

Il a assis les mannequins dans les baquets des monoplaces, ce qui est plus télégénique qu’Alain Prost.

« Carla est une fille exceptionnelle, je suis content pour l’équilibre du Président. Avoir un président heureux, c’est une bonne chose pour la France », glissait-t-il à « Callenges », l’an dernier.

Il n’y a pas que Sarko qui roule des mécaniques…

L’Italien a aussi importé dans les paddocks tout l’arsenal du bling-bling, dont l’épicentre, l’été, est à Porto Cervo, en Sardaigne.

Briatore y tient une modeste boîte de nuit nommée « Billionnaire » (milliardaire en français) à quelques jet-skis de la maison où Berlusconi homologue tchèque avec des jeunes filles déshabillées.

La bouteille de champagne y est à 1000 euros, pour aider à lutter contre l’alcoolisme.

Sous la marque « Billionnaire », Flavio a aussi créé une ligne de vêtements masculins clinquos qui a pignon sur rue à Londres.

Il possède encore hôtels de luxe au Kenya et en Toscane et un bout des Queen’s Park Rangers, club de foot anglais acheté avec Bernie Ecclestone et Lakshmi Mittal, hommes de fer et de bonne compagnie.

En vingt ans de Formule 1 , il était devenu l’un de ses potentats.

Mis dans le circuit par Luciano Benneton, qui ne savait pas quoi faire de son écurie, il a découvert, Schumacher et Alonso, soit deux meilleurs pilotes des dernières décennies.

Avant de mettre par terre la réputation de Renault, il a assis sa renommée en lui offrant deux titres de champion du monde des constructeurs.

De quoi installer Briatore au panthéon des puissants de la F1 au côté d’Ecclestone, son grand argentier, et de Max Mosley , le président de la FIA .

On notera que ces trois –là ont un point commun.

Fils d’un admirateur du Reich, Mosley aime le fouet et les chromos nazis ; Ecclestone, en juillet dans le « Times », trouvait des qualités à Hitler ; et Flavio a été photographié par le journal « Bild » en 2006, en train de faire le salut nazi en direction de l’écurie McLaren-Mercedes !

Bref, avec leur politique de la main tendue, ces trois-là, plus intéressés par le business que par le sport, ont transformé la F1.

Elle est devenue un « sport corrompu », « qui a perdu son intégrité », selon l’avis autorisé du « Guardian ».

« Renault prenait un risque en nommant un voyou, un homme sans scrupules comme Favio, à la tête de son écurie », ajoutait Henri Pescarolo, la semaine dernière sur France 2 .

Pourquoi l’a-t-il pris ?.

« Si on veut aller vite, il faut un type comme lui », avait assuré Patrick Faure, alors patron de Renault F1, à Louis Schweitzer, le PDG de la Régie.

Renault a donc tout donné à Flavio.

Qui lui a beaucoup pris.

Il se contentait officiellement d’un modeste salaire d’à peine plus d’1 million d’euros par an, sans les primes.

Mais il se rattrapait en étant le manager de nombreux pilotes, dont Alonso, passé de … Renault à McLaren pour une jolie somme.

Briatore prenait aussi 20% sur les jeunes pousses du « Renault drivers team ».

Il avait encore convaincu la firme au losange de fournir ses moteurs à deus championnats, GP2 et GP3, que dirigent ses proches.

Sans parler du traiteur de l’écurie, qui lui appartient et qu’il facturait aussi à la Régie !.

Carlos Ghosn, comme son prédécesseur, à toujours laissé faire, séduit par l’abattage de Briatore, il s’en mord les doigts.

L’affaire l’a rendu électrique, et il ne jure plus aujourd’hui que par les véhicules propres .

« Briatore s’était créé une sorte d’impunité, raconte le spécialiste de la F1, Renaud de Laborderie.

Ils sont tous contents aujourd’hui de le voir dehors, il gênait trop de monde ».

Mosley et Ecclestone, à qui il s’était opposé ces derniers mois, tiennent leur vengeance.

Et si Renault, exclu à vie, mais avec deux ans de « sursis » pour ne pas priver la F1 de ses millions d’euros, y a perdu sa réputation sportive mondiale, cela n’est pas pour attrister outre-Manche.

Les hommes de main de Flavio sont, eux, toujours dans le circuit .

Et, sur son « Force Blue », le milliardaire déchu Briatore, bientôt sexagénaire, se console, lui, en revisitant Pagnol :

« Si on ne peut plus tricher avec ses amis, ce n’est plus la peine de courir en Formule1 … ».

Par Jean-Michel Thénard dans Le Canard enchaîné du 23/09/2009

Transmis par Linsay



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