4 juillet chez les FRALIBS : mémorable !
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Paradoxalement, depuis le 8 mars 2010, c’est peut-être l’article le plus difficile à écrire.
Comment décrire cette journée du 4 juillet dédiée à la fête de la victoire des Fralibs ? Et d’abord combien étions-nous ? Celles et ceux qui n’étaient jamais venus et qui ont pu admirer l’usine et ses ateliers qui ont toujours été en état de marche impeccable, celles et ceux qui se remémoraient telle ou telle visite précédente, celles et ceux à qui presque chaque coin de l’usine rappelait un moment fort de la lutte…Les Fralibs attendaient 1000 personnes et avaient tout tablé là-dessus.
A partir de 14h heure officielle du démarrage déjà des centaines de personnes étaient dans l’usine et le flot n’a cessé de grossir jusqu’à une heure avancée de la soirée. Dans ces conditions pas étonnant que le buffet (de 60 mètres de long !) prévu pour 700 personnes et en permanence envahi ait rapidement été dévalisé forçant (sic !) nombre de participants à se rabattre sur les boissons !!!
Les glaces de La belle Aude (la SCOP créée par les ex-pilpa) en vente dans un guichet de la solidarité, elles aussi n’ont pas tenu la distance….
Tout au long de l’après-midi et jusque tard dans la nuit il y avait du monde partout : dans la cour, dans les ateliers où se tenaient les différentes initiatives, dans les bureaux…du monde qui se saluait, s’interpellait, s’esclaffait, dans une ambiance de joie et d’émotion mêlées.
Alors combien étions-nous ? Difficile à dire même si certains malins ont annoncé avoir compté… 1336 participant-e-s !!! On dira donc plus de 1000…
L’après-midi a commencé par une lecture de poèmes de l’ami Francis Combes extraits en particulier de son dernier livre : « Si les symptômes persistent, consultez un poète ». Moment d’émotion et d’humour partagé avec une salle qui ne cessait de réagir à chaque texte à l’humour caustique et satirique sur les maux de notre société qu’engendre le capitalisme.
Ainsi celui-ci, le plus court :
Collaboration de classe
Nous gagnons NOTRE pain
A la sueur de VOS fronts.
Première rupture de stock : celle du livre de Francis : on se rattrapera ultérieurement.
Puis presque sans prendre le temps de souffler on se rend dans l’atelier du fond pour voir la pièce de « Los Théâtros ».
Au passage on peut admirer l’exposition qui retrace les 4 ans de lutte en 10 panneaux explicatifs et commémoratifs réalisés par Rouge Midi [1] avec l’aide d’Olivier et Gérard bien sûr. [2]
Les acteurs/lutteurs ont le trac car vu les circonstances, ils n’ont pas pu répéter. De plus la situation a changé et il y a plein de monde….et la pièce est un très grand succès. La salle réagit tout au long du spectacle en chantant avec Yves, en vilipendant les « patrons » d’UNILEVER, en sifflant l’ouvrière qui choisit la valise plutôt que la lutte, en applaudissant les ouvriers en colère ou l’avocat des salariés…A la fin, (changée et actualisée donc), Rim est très applaudie quand elle dit « on a gagné mais le capitalisme est toujours là donc le combat continue » et le spectacle se termine en apothéose avec un public qui applaudit à tout rompre la chanson Demain si, si on s’unit, s’il n’y a plus de guerre, s’il n’y a plus de frontières, demain si…
Le temps de ranger les chaises afin que l’on puisse toutes et tous s’entasser dans cet atelier qui a vu tant d’AG et de moments historiques, et c’est le meeting avec les prises de parole.
Successivement c’est Cynthia pour l’UL, Thierry pour l’UD, Jean Luc pour la fédération, Gérard pour la CGC et le binôme incontournable Gégé et Olive (comme on les appelle ici) qui clôture. Phrases volées au passage : « Vous avez marqué l’histoire » (Cynthia) « désormais à votre suite nous disons, pas un boulon ne sortira du département » (Thierry Pettavino CGT 13). « Nul n’a oublié la formidable journée du 3 octobre 2011 où vous avez accroché à la Bonne Mère cette immense banderole proclamant : l’Eléphant vivra à Gémenos » (Jean Luc Bindel, fédération agroalimentaire CGT).
Gérard, lui le délégué CGC, se taillera un succès hors du commun dans une ambiance très CGT, lors de son intervention plusieurs fois interrompue par les applaudissements, symbole d’une lutte dans lequel les travailleurs se sont unis au-delà de leurs différences.
Applaudissements qui redoubleront quand Olivier dira, en préalable de sa prise de parole : « la direction a annoncé la fermeture le 28 septembre. Quelques jours après, le 5 octobre Gérard pouvait faire valoir ses droits à la retraite et partir avec un chèque. Il a refusé et mené les 1336 jours de lutte avec nous ».
L’intervention du binôme on ne peut la résumer : vous la lirez. Elle est à la hauteur de ce que cette lutte a porté de solidarité, de détermination et de fraternité pendant 1336 jours.
Puis, alors que quelques centaines se pressent devant un écran géant pour regarder le match de coupe du monde France Allemagne (dont le résultat passe vraiment au second plan pour les présents de cette journée mémorable, les spectacles s’enchainent.
Audrey Vernon, le soutien de la première heure, joue « Comment épouser un milliardaire », la pièce qu’elle avait jouée 2 fois ici : une, le 2 juillet 2011 au théâtre Sylvain, le théâtre de plein air de Marseille pour une soirée de soutien à la lutte, l’autre, 3 mois plus tard, pour la journée folle du 3 octobre dans ce même atelier de l’usine occupée.
Viendront ensuite les Red Lézard, ce groupe du Havre natal de bien des salarié-e-s de Fralib, [3] soutien lui aussi de tous les moments.
Puis « bien sûr », HK qui n’a jamais « rien lâché » de son soutien aux Fralibs et Los Fralibos bien évidemment !
Au milieu de ses spectacles « pro », le père d’Olivier est venu, avec sa pancarte qui a accompagné le conflit, avec ses 80 printemps faire chanter le chiffon rouge à une salle conquise.
La soirée se finira au petit matin par des files de marcheurs allant chercher leur voiture garée à des centaines de mètres le long du biaou [4] qui sépare la route à cet endroit de la zone industrielle et d’autant plus loin qu’ils étaient arrivés plus tard dans l’après-midi…
Que vous-dire d’autre ? Comment vous faire partager ce moment que nous avons eu la chance de vivre ?
Vous parler des larmes qu’Amine, cet avocat à qui l’un des fralibiens a dit qu’il allait faire sa statue au milieu de la cour, n’a pas pu retenir en plein meeting ?
Vous raconter par le menu ce que l’on s’échangeait au hasard de nos rencontres avec une ou un fralibien que l’on croisait au cours de nos déambulations ?
Vous parler de souvenirs qui remontaient à la surface pour nombre d’entre nous et dont vous avez pu, pour une grande part, suivre le récit sur Rouge Midi depuis le 11 mars 2010
Dire des mots que l’on n’a toujours pas inventés depuis le 27 mai ?
Peut-être vous dire simplement, ce que l’on se disait à quelques-uns le lendemain :
par la longueur du conflit,
par le symbole de la victoire du pot de thé contre le pot de fer qu’il représente,
par l’admirable détermination, lucidité, intelligence et dignité collectives dont il témoigne,
par l’unité et la solidarité qu’ils ont su gagner autour d’eux,
par la qualité de ce qui était donné à voir et à entendre ce 4 juillet,
par leur sens de l’accueil qui se manifestait dans chacun des moments de cette journée inoubliable,
par la fraternité qui a été le carburant de toutes ces années et qui se dégageait en grand ce jour-là pour envelopper tout le monde,
par l’espoir et ce souffle d’air frais que font naître cette victoire,
c’est sans doute la plus belle fête de la victoire que l’on ait connue dans la région…………...pour l’instant !!
Pas un boulon n’est sorti d’ici !
[1] et en particulier Vincent
[2] On pourra la voir à la fête de l’Humanité...entre autres
[3] En 1998 UNILEVER fermait l’usine du Havre, ne laissant pas d’autres choix aux salarié-e-s qui avaient tout fait pour empêcher cette fermeture, que de venir à Gémenos
[4] fossé en provençal
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