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Chypre : Le plan de sauvetage qui nous tuera

mardi 19 mars 2013

Il fallait s’y attendre, le départ des communistes du pouvoir chypriote ne pouvait pas être une bonne nouvelle pour le peuple...et cela n’a pas traîné. Dans un pays où le président a les pouvoirs les plus étendus d’Europe, 3 semaines après le retour de la droite (57,5% pour la droite, 42,5% pour le communiste) la population est appelée à la caisse.
Comme le dit justement cet article, entre l’euro et la subvention aux banques au détriment des habitants, le président a choisi... Au peuple maintenant de dire haut et fort que, par exemple, il y a l’exemple d’une autre île, l’Islande, et de montrer que, dans une situation similaire, contrairement à ce qu’écrit l’auteur de l’article, il y a d’autres choix possibles..

L’UE et le FMI se sont mis d’accord sur un plan d’une valeur de 10 milliards d’euros pour renflouer les banques chypriotes, mais le prix de ce sauvetage est une taxe imposée à tous les dépôts. Cette condition a stupéfié la petite nation méditerranéenne et le journal Cyprus Mail accuse maintenant le nouveau président ainsi que d’autres Etats membres d’avoir trahi l’île.

Même si le haircut [1] appliqué aux dépôts bancaires était à l’ordre du jour de l’UE depuis plus d’un mois maintenant, présent dans certains mémos de la Commission et ouvertement discuté par les politiciens européens – beaucoup d’entre eux n’excluaient d’ailleurs pas cette option –, peu de personnes pensaient que l’Eurogroupe le mettrait véritablement en œuvre. La plupart des gens étaient convaincus que c’était une menace en l’air, censée contraindre Chypre à privatiser ses organisations semi-gouvernementales et à augmenter l’impôt sur les sociétés.

Après tout, le président Nicos Anastasiades avait déclaré avec emphase dans son discours d’intronisation “qu’absolument aucune référence à une décote sur la dette publique ou les dépôts ne serait tolérée”, ce à quoi il avait ajouté que “cette question ne ferait même pas l’objet d’un débat”. Le ministre des Finances, Michalis Sarris, a tenu des propos tout aussi rassurants, faisant valoir qu’il serait insensé de la part de l’UE d’imposer une telle mesure car cela menacerait l’euro dans son ensemble.

Sous la contrainte

L’Allemagne et les dirigeants de l’Eurogroupe ont pourtant fait ce choix aberrant, car à leurs yeux, Chypre est trop petite et insignifiante pour qu’une décote imposée aux dépôts bancaires provoque un effet boule de neige dans la zone euro [une taxe de 6,75 % sera appliquée aux dépôts inférieurs à 100 000 euros et de 9,9 % au-delà de ce seuil].

Evidemment, les marchés interpréteront peut-être cette décision différemment, pas nécessairement dès le lundi 18 mars, mais quelques semaines plus tard, lorsqu’il deviendra manifeste que même les dépôts effectués dans les banques européennes ne sont pas protégés des raids de l’Eurogroupe.

A entendre les discours prononcés, il ne fait aucun doute que Nicos Anastasiades a fait l’objet d’un chantage pour accepter cette “taxe de solidarité” – un euphémisme. Un refus aurait signifié que la Banque centrale européenne (BCE) ne verserait pas, après la date limite du 21 mars (l’échéance avait été retardée de deux mois en janvier,), la moindre aide d’urgence pour atténuer la crise de liquidités que traversent les banques chypriotes : ces dernières s’effondreraient le jour même et la population perdrait une part bien plus importante de ses dépôts que les 7 à 10 % qui sont imposés aujourd’hui.

Anéantir au lieu de sauver

Le président avait-il le choix ? C’est difficile à dire, étant donné la pression exercée pour trouver un accord politique le 15 mars. Tout porte à croire que nos partenaires de l’UE avaient pris leur décision en amont, d’où la tenue d’une réunion de l’Eurogroupe un vendredi soir pour discuter du plan de sauvetage. Comme les banques chypriotes sont fermées pendant trois jours [le lundi 18 mars est un jour férié], toutes les mesures nécessaires pourraient être prises avant leur réouverture le mardi, comme si de rien n’était.

Le 16 mars, un député s’est demandé s’il ne vaudrait pas mieux laisser faire faillite les deux banques qui ont besoin d’une recapitalisation de la BCE au lieu d’accepter la décote. Le problème ne s’arrêterait toutefois pas à ces deux banques, car les différentes institutions financières dépendent les unes des autres et la panique bancaire finirait par se généraliser. Voilà l’argument principal que fera valoir Nicos Anastasiades pour justifier le renflouement interne par le biais des dépôts. Dans le cas contraire, les banques se seraient effondrées, l’Etat aurait fait faillite et Chypre serait sortie de la zone euro.

Ainsi, le président a choisi le moindre mal, même s’il est peu probable que la population l’admettra. Concrètement, l’UE a proposé un “plan de sauvetage” conçu pour anéantir et non pas sauver ce qu’il reste de l’économie chypriote.

Source Cyprus Mail Nicosie le 18/03/2013
Traduction : Leslie Talaga

Transmis par Linsay


[1terme appliqué en cas de décote d’une créance ou d’un avoir bancaire

Messages

  • Le MES a, si je ne m’abuse, tout pouvoir pour exiger des sommes énormes de la part des états membres de l’UE, au cas où il en sentirait le besoin. Cette ponction autoritaire ne pourrait pas se faire si facilement sur le budget des états (l’Alllemagne a pris la précaution de conditionner les versements à l’accord de son parlement) et la « solution chypriote » a toutes les chances de se généraliser par ce biais lors d’une prochaine alerte. Les fonds de secours européens (mais est-ce l’objet du chantage sur Chypre ? La « solidarité » passant cette fois par le FMI) seraient ainsi financés par les européens mutualisés. Le fait que les grandes banques et les gros actionnaires soient en priorité les bénéficiaires du dispositif est juste une preuve supplémentaire que le Fric est privilégié sur tout besoin social, sous le fallacieux prétexte au départ d’un possible « ruissellement » (la fumeuse trickle down theory, chère à Reagan).

    Rappelons tout de même qu’une dévaluation ou un taux important d’inflation auraient aussi l’effet de ponctionner les épargnants, pour tout état doté d’une monnaie souveraine (c’est-à-dire hors euro),
    et que ce sont aussi les déboires -artificiels- de la Grèce qui ont entraîné Chypre finalement.
    Empêcher les chypriotes d’investir dans l’exploitation de leurs propres gisements de gaz, emmerder les russes utilisateurs des banques à Chypre, faire peur à tous les européens qui s’obstinent à vouloir du salaire et du service public... cette crise-là a plus d’un aspect positif pour le K prédateur !
    Dernier détail : la sortie de crise « à l’islandaise » n’a pas vraiment rendu sérénité et prospérité à la population, beaucoup étant privés de leur logement ET au chômage avec pourtant des traites élevées à payer...

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