Immigrés ou émigrés, tous maltraités.

lundi 3 juillet 2006
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Le président de la Commission nationale des droits de l’homme s’insurge contre les mauvais traitements réservés aux centaines de milliers de migrants clandestins qui sortent du Mexique ou y entrent.

Situé entre la puissante économie américaine et les faibles économies centraméricaines, le Mexique, lui même traversé de grandes inégalités et asymétries, connaît toutes les manifestations du phénomène migratoire : il est à la fois pays d’origine, de transit et de destination des migrants.

Quotidiennement, sur les chemins de fer du Sud du pays -et du nord, dans une moindre mesure-, les migrants (qui proviennent en majorité des pays d’Amérique centrale) sont victimes d’actes délictueux et de graves violations des droits de l’homme.

Ils sont agressés par des délinquants, des membres du gang de la Mara Salvatrucha (d’origine salvadorienne), des cheminots, des agents de sécurité privés, voire par des membres de la police ou de l’armée.

La vulnérabilité des femmes et des enfants, de plus en plus présents dans les flux migratoires, appelle des mesures urgentes.

Et l’immigration ne peut qu’augmenter.

On estime qu’à lui seul l’ouragan Stan (qui a causé de graves inondations en Amérique centrale en octobre 2005) a fait passer le nombre d’étrangers asegurados (arrêtés) à un total de 270 000, contre 240 000 en 2005.

Certaines des propositions que nous avons fait passer aux candidats à la présidence concernent précisément les droits des migrants.

Nous demandons la dépénalisation de la migration, l’interdiction que des autorités non autorisées détiennent administrativement des imigrés et l’interdiction d’utiliser des prisons comme officine d’immigration.

De l’autre côté du miroir, l’émigration des Mexicains vers les Etats-Unis ne cesse de croître.

Au cours des cinq dernières années, environ 400 000 de nos compatriotes ont franchi chaque année la frontière.

- Sur ce nombre, 70% étaient des sans-papiers

- 15% disposaient d’un visa de tourisme.

- 15% avaient effectué toutes les démarches légales.

Entre novembre 2004 et octobre 2005, les autorités migratoires des Etats-Unis ont arrêté et expulsé 1,41 million de Mexicains sans-papiers, soit 20% de plus que l’année précédente.

- Ainsi, il est clair que les plus de 30 milliards de dollars dépensés par le gouvernement des Etats-Unis ces dix dernières années pour renforcer la surveillance aux frontières n’ont pas endigué l’émigration venue du sud.

En revanche, cette politique a transformé la frontière avec le Mexique en une zone à haut risque.

Une réforme migratoire est actuellement en discussion au Congrès américain. Nous ne pouvons que nous réjouir de la possibilité de légaliser le statut des millions de Mexicains clandestins, mais nous regrettons toutes les initiatives visant à durcir la politique migratoire, car elles représentent des menaces directes contre l’intégrité physique des migrants, qui sont la proie des trafiquants de personnes.

Aisi, douze ans après son lancement, l’opération Guardian (en anglais « Gatekeeper », militarisation de la frontière lancée par le département d’Etat étasunien) est un échec.

Elle n’aura réussi qu’à causer la mort, directement ou indirectement, d’au moins 3 500 Mexicains, le plus souvent par hypothermie ou déshydratation.

Nous avons même du mettre en place un numéro de téléphone gratuit, « où l’on peut s’informer sur la localisation de restes humains à la frontière », afin de permettre aux familles d’offrir une sépulture décente à leurs proches.

Il est impératif que le Mexique et les Etas-Uns fassent des migrations un problème bilatéral et le traitent comme un phénomène économique et social -ce qu’il est-, et non comme un thème criminel et de sécurité nationale.

Par ailleurs, la multiplication des cas de migrants mexicains essuyant des coups de feu tirés par des agents de la Border Patrol (police des frontières américaine) nous préoccupe.

Au cours de ces dernièrs mois, nous avons recensé pas moins de douze cas de migrants mexicains blessés par balle à la frontière : et cinq d’entre eux n’ont pas survécu à leurs blessures.

Art de « José Luis Soberanes Femandez », El Universal(extaits), Mexico. Dans « Le courrier international », transmis par Linsay



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