Ce qui est important

lundi 15 février 2010
par  Charles Hoareau
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Pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois on a entendu parler, de rencontres multiples à l’intérieur et entre organisations d’une « gauche de gauche » qui tente de se rassembler en vue des régionales….sans y parvenir vraiment. De ces débats nombreux où les questions de place de quelques individus et d’équilibre entre forces semblent prendre le pas sur le débat de fond, émane une impression de grande confusion, impression renforcée par le fait que les alliances varient d’une région à l’autre quand elles ne divisent pas à l’intérieur d’une même organisation dans une même région et ce malgré les votes de militant-e-s.

Ainsi, et c’est du jamais vu, il y aura, dans toutes les régions, des dirigeants d’une même formation politique qui vont s’affronter au moins le temps de l’élection…pour se réconcilier après ?…

Le moins que l’on puisse dire c’est qu’une telle première n’aide ni à la clarté du clivage gauche droite, ni à la crédibilité de l’engagement politique, le second tour risquant encore d’accentuer ce phénomène. A gauche cela atténue – et c’est regrettable – la portée du vote des militant-e-s du PCF exprimant une volonté de ne pas (plus ?) être à la remorque du PS et de se démarquer de son orientation.

De son côté, la presse fait des élections prochaines son sujet favori sur lequel elle revient chaque jour. Elle se fait l’écho des contorsions et des rencontres à répétition, des péripéties des candidatures, choisit les phrases qui, selon nos médias, font choc et créent l’évènement et bien sûr publie régulièrement les résultats de sondages, qui font plus penser aux pronostics sportifs qu’à une analyse des citoyens de France sur cette élection et l’impact de la gestion régionale sur leur vie de tous les jours.

Peu ou pas (mais il faut reconnaître que je ne suis pas un acharné des infos officielles) d’explication sur le rôle des régions, mais surtout sur la différence entre une gestion « de droite » et une gestion « de gauche ». Vit on plus mal en Alsace ou en Corse qu’en PACA ou Midi Pyrénées grâce aux politiques menées ? En quoi telle région est un lieu de résistance ou d’accompagnement de la politique nationale ?

Qu’est ce que ça change pour un chômeur la couleur politique de sa région ? Qu’en disent concrètement les habitants des quartiers populaires, les salarié-e-s dans la précarité, celles et ceux dont on casse l’emploi ?…Quel regard ont-ils sur cette échéance ? Se sentent-ils concerné-e-s ?
Quand la vie est dure comme elle l’est pour nombre de gens l’immédiat, l’urgence sociale pèsent et ces élections paraissent souvent bien loin.

D’autant que ceux donc, qui ont les moyens de voir loin, en sont à dire que 2010 sera un bon test pour les présidentielles de 2012, dont ils nous parlent déjà ! Ainsi ce chroniqueur de France Inter spéculant sur les chances de Martine Aubry si le PS, (qu’il appelle la gauche comme si ce parti la représentait entièrement), réussit ce que nos observateurs patentés appellent « le grand chelem »…et revoilà le sport ! Comme si la France entière était tous les jours devant ses écrans de télévision passionnée par cette course d’obstacles qu’on appelle les élections et dont les épreuves sont devenues annuelles…sans que cela ne favorise le débat politique voire le parasite.

Aucun ne parle (ou si peu) et sans en tirer d’analyse ni de conséquence pour son action de ce qui est pourtant le plus important à savoir le score du probable véritable vainqueur de cette prochaine consultation, le camp de celles et ceux qui ne votent pas.

Les mêmes sondages annoncent en effet environ 55% d’abstentions (on a déjà dit ici qu’il vaudrait mieux parler de refus de vote). Si on ajoute à cela les près de 10% d’électeurs non inscrits [1] et les étrangers privés de droit de vote (environ 10% aussi) [2] quel résultat aura le plus de signification au soir des élections ? Lequel sera le plus lourd pour l’avenir ?

Le fait qu’une coalition ait atteint les 50% de votants ou le fait que ces 50% ne représentent moins de 20% du pays réel ? [3]

Il y a toujours eu des abstentionnistes et les étrangers n’ont jamais eu le droit de vote, mais les refus de vote n’ont jamais été aussi nombreux. Ils témoignent d’un décalage grandissant entre la population et celles et ceux qui se présentent aux suffrages. Ce décalage est criant, pour ne prendre qu’un exemple, quand on sait que le nombre de non inscrits est de 21% chez les chômeurs contre « seulement » 6% chez les salarié-e-s à temps plein. [4]. D’ores et déjà tous nos efforts, toutes nos analyses devraient porter sur cette question là.

Si on veut que les choses changent, rendre les gens acteurs, c’est le B.A BA de l’action sociale. En politique cela veut dire s’attacher à reconstruire une organisation populaire de notre temps avec toutes celles et tous ceux qui sont conscients que l’on ne peut rester dans cette situation de bas niveau de conscience et d’inorganisation politiques, situation porteuse de régression sociale mais aussi de dangers pour les libertés démocratiques. Dans un tel état de marasme social, de brouillard idéologique et de recul des droits, que peut-il sortir de bon demain d’une explosion sociale dont chaque jour accumule les raisons objectives ? Une situation qui continue à nous faire penser à « l’année terrible » de Victor Hugo…

On peut discuter des étapes, de la forme, des moyens de la conscientisation mais pas de la priorité.

Une organisation des entreprises et des quartiers où celles et ceux qui se sentent abandonné-e-s de tout et de tous puissent se retrouver, une organisation qui, partant du quotidien, des préoccupations premières, rende espoir dans nos capacités à changer le monde. Une organisation qui entende et prenne en compte et non une organisation qui fasse la leçon à celles et ceux qui s’abstiennent « parce qu’ils n’ont pas compris », une organisation qui ne veuille pas faire le bonheur du peuple malgré lui ou mieux voudrait, si c’était possible, changer de peuple, mais une organisation qui fasse avec, au milieu, en harmonie avec lui.
Une organisation qui réconcilie avec la perspective d’avenir.

Les prises de pouvoir futures sont à ce prix.

Il est de bon ton aujourd’hui de dire que « l’on veut faire de la politique autrement ». Il ne suffit pas de le dire. Il faut le faire et c’est urgent !


[14,9 millions données INSEE 2004

[24,5 millions d’étrangers en âge de voter idem

[3Si on compte qu’il y a environ 55 millions de personnes en âge de voter, avec 55% d’abstentions soit 20 millions de votants, la « majorité » est à 10 millions. 10 millions sur 55…

[4données INSEE



Commentaires

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lundi 22 mars 2010 à 08h16 - par  Dominique Idir
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samedi 20 février 2010 à 17h15 - par  Carpentier Dominique
lundi 15 février 2010 à 21h14
lundi 15 février 2010 à 10h50