Quelques points que je crois importants pour la préparation des assises du communisme

par Jean-Claude Delaunay
mardi 28 mai 2013
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Je vais faire court et pour cela distinguer deux catégories de points.

a) Les points à éviter, ceux dont nous devons nous démarquer. J’en retiens trois, même s’il y en a d’autres :

Le premier consiste à dire que les assises ne vont pas élaborer les éléments d’une solution pour la prochaine campagne électorale. Il faut en finir avec cette comédie consistant à dire « nous avons des solutions et si vous votez pour nous, vous allez voir ce que vous allez voir, nous allons résoudre vos problèmes ».
Selon moi, c’est du délire. Nous sommes en présence d’une crise profonde de la société capitaliste. Ce qui signifie, si les camarades en sont d’accord, que nous unissions nos efforts pour une solution de long termes en cherchant bien sûr des effets immédiats, mais néanmoins une solution de long terme.

Le deuxième point à éviter est celui consistant à dire que la solution est d’abord dans l’élaboration d’une nouvelle constitution. Quand Jospin a fait voter la loi disant que désormais il y aurait coïncidence entre élection présidentielle et élection législative, cela renforçait le caractère présidentiel de la Constitution. C’était aussi clair que de l’eau de roche. Mais ces connards de députés communistes se sont abstenus. Ils n’ont pas voté contre, ils se sont abstenus ! J’aimerais bien qu’ils fassent aujourd’hui leur mea culpa.
Cela étant dit, la Constitution concoctée par de Gaulle n’était pas une Constitution de type ultra présidentiel comme aujourd’hui. C’était une Constitution visant à éviter les impasses dans lesquelles conduisaient ce qu’il appelait « le régime des partis ». La 4e République a été un bordel permanent. Est-ce que ces crétins de la direction communiste veulent revenir vers le bordel permanent de la 4e République ? Des institutions sont créées non pas pour être justes mais pour permettre de gouverner. Dans un pays, il faut gouverner. Nous sommes des gaulois ingouvernables.

A mon avis, les Français ne suivront pas cette incitation à une 6e République. Par ailleurs, l’idée d’une mobilisation permanente des citoyens est une illusion. Bref, je crois que nous devons nous démarquer résolument de ce genre de bêtise tout juste bonne à satisfaire Clémentine Autain.

Le troisième point à éviter est celui consistant à dire que désormais, il suffirait de redistribuer. Voilà, on pique tout ce que possède la mère Bettancourt, et voilà, c’est fini, les mecs vous pouvez rentrer vous coucher, on a fait la révolution. Sottise encore. je n’ai rien à priori contre le fait que l’on pique quelques fortunes. Mais les fortunes en question sont très peu de choses en regard de la richesse de travail dont les travailleurs sont dotés.
Ce qui importe au premier chef est l’organisation de ce travail, la dépense qui en est faite dans tel ou tel secteur, la façon dont les travailleurs, les travailleuses, ont désormais accès à la richesse qu’ils ou elles ont produites. Mais si Bettancourt veut se barrer aux Etats-Unis avec ses sous, qu"elle y aille, ce n’est pas un gros problème. Nous devons arrêter, si tel est notre défaut, de réfléchir comme de minables piqueurs de sous. Nous avons l’ambition d’être les organisateurs d’une société nouvelle, ce qui est différent.

b) Maintenant les points que je crois prioritaires. Là encore, je vais en retenir trois histoire de me limiter.

Le premier est la France, la nation française. J’ai, personnellement, le sentiment de la décadence de la France. Je pense que nous devons très résolument lier notre réflexion sur le socialisme et notre conviction de ce que ce mot, la France, concentre de valeurs nécessaires. Je sais que la réalité de la nation totalise des options parfois très contraires les unes des autres et très contraires à notre idéal. Mais pour les communistes, pour certains d’entre eux en tout cas, et à mon avis pour beaucoup, la nation a encore un sens. Il en est de même des prolos qui n’ont pas la possibilité de faire leurs réunions de cellule, qui à Porto Alegre, qui à Dakar, qui à Samarkand.

Dans une époque de mondialisation, où s’opèrent la comparaison et la confrontation de toutes ces valeurs, je n’ai vraiment pas honte de ce que la France représente encore et j’en souhaite la permanence et la durée. Je pense que bien des gens qui émigrent en France, souvent au péril de leur vie, ont une haute idée de la France. Pourquoi avoir honte de ces valeurs ? Si nous, communistes, ne les défendons pas, personne ne le fera à notre place. Or ça en vaut la peine. J’en ai marre de ces conneries sur la repentance. J’en ai marre de l’ignorance de certains ou de certaines de mes camarades pour lesquelles toutes les civilisations se valent. Non, ce n’est pas vrai. Il existe une commune humanité. c’est vrai. Cette commune humanité est en train de se réunir sous l’effet de la globalisation économique.
Mais cela produit des clashs et il y aura des valeurs qui, je l’espère, disparaîtront. Cela dit, rien de ce choix ne sera nécessairement optimal. Nombre des valeurs véhiculées par l’idéologie française me semblent devoir être retenues. Cela va bien au delà du socialisme et des combats pour la liberté.

Le deuxième point a trait à la mondialisation capitaliste. Nous disons, pour faire court, que le socialisme est la solution et que sortir de l’euro est le moyen immédiat de cette solution. Je suis d’accord. Mais en même temps je trouve que c’est très en deçà de la main. Je vais mentionner deux aspects.
D’une part, les forces productives ont atteint un nouveau degré de développement en sorte que nous, communistes, devons réfléchir à une zone politiquement et économiquement adaptée à cette évolution. Nous engendrerions une complète illusion en disant : « Replions nous sur la nation française et ça ira ». Il est possible que l’on ait à le faire, je n’en sais rien. Mais à mon avis, ça n’ira pas mieux pour autant. Nous sommes un petit pays au regard des forces productives. On aura beau augmenter le pouvoir d’achat, à un moment donné les gens n’achèteront plus de casseroles. Tenant compte de cette évolution des forces productives, soit on augmente le marché, soit on réduit le temps de travail et la production.

D’autre part, on doit se prononcer sur la nature actuellement mondiale de notre horizon économique, avec de l’hyper-concurrence, et de l’hyper-compétitivité, un véritable délire. Pour l’instant, à mon avis, ce point est mal perçu par les communistes, sous le prétexte que leur idéologie n’a pas de frontière. Je crois que, dans l’état actuel des choses et des nations, des niveaux de productivité, des cultures, de l’absence d’Etat mondial, la mondialisation profite d’abord aux grandes entreprises mondialisées. Elles ont évacué la demande nationale de leurs préoccupations et elles recherchent la demande mondiale.
Nous devrions, selon moi, être contre la mondialisation capitaliste tout en étant favorables à la formation d’une Europe socialiste, nourrie par les combats et les propositions des États membres souverains. Plus généralement, nous devrions œuvrer explicitement et simultanément à la formation d’un monde dit « multipolaire » dans un contexte mondialisé, cela va de soi, et à la formation d’une Europe socialiste.

Le troisième point, peut-être le plus important, a trait aux travailleurs des entreprises, des administrations. Nous avons des idées des propositions, mais qu’en pensent-ils ? Qu’en pensent-elles ? Je n’attends pas que de telles rencontres donnent des solutions. mais elles devraient constituer une information de première main sur notre démarche, même si les solutions avancées sont discutables. Ce serait une information de première main sur le niveau de conscience et de luttes.

Voilà, chers camarades, ce que j’aimerais dire à la réunion du samedi 25 mai à laquelle je ne pourrai assister, car je participe au Brésil à un symposium d’une association de marxistes.

Jean-Claude Delaunay



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