POUR UN VERITABLE DEBAT PUBLIC

mardi 30 mars 2010
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L’opposition des Néerlandais au maintien du contingent en Afghanistan a entraîné des divergences au sein du gouvernement. Les pressions du secrétaire général de l’OTAN et des Etats-Unis pour la prolongation de la mission des soldats néerlandais n’ont pas suffi à empêcher la démission du gouvernement. L’Allemagne n’a pas connu le même cas de figure puisque le contingent allemand en Afghanistan a été renforcé malgré l’opposition majoritaire des habitants. Mais, au moins, la décision a été prise au Bundestag après un débat conclu par un vote : le nouveau mandat de la Bundeswehr avec l’envoi de 500 soldats supplémentaires (en plus des 4300 qui y sont actuellement) et de nouveaux crédits a été approuvé par les députés à une forte majorité par 429 voix contre 111 grâce au soutien de la droite et des sociaux-démocrates. De la même façon, le parlement espagnol est passé outre à l’opposition majoritaire de la population en votant l’envoi de 500 soldats supplémentaires.

En France, l’engagement militaire en Afghanistan décidé par Jospin et Chirac et renforcé par Sarkozy (près de 4000 soldats actuellement) suscite également une forte opposition qui est largement majoritaire dans la population. Mais il n’y a pas de véritable débat public, ni dans l’opinion, ni au Parlement, sauf en novembre 2009 au Sénat et en décembre 2009 à l’Assemblée mais avec de courts débats sans vote.

Les principaux médias sont à l’unisson de la volonté gouvernementale d’étouffer tout véritable débat sur l’engagement de la France en Afghanistan. Et quand cette question est abordée, elle est souvent déformée. C’est ainsi que le journal « Le Monde » du 27 février a pu titrer un dossier sur l’Afghanistan : « La France en Afghanistan : le doute de l’opinion, le silence des politiques - Malgré les sondages hostiles à la présence française, la gauche ne remet pas en cause la stratégie de l’Elysée ». Effectivement, le journal fait parler Jean Glavany, député PS et auteur avec un député UMP d’un rapport parlementaire sur l’Afghanistan, qui réfutait même jusqu’à l’hypothèse d’un calendrier de retrait. Pour Jean Glavany, « ce n’est pas un débat droite-gauche », comme le confirme Jean-Christophe Cambadélis, autre député PS : « On souhaite accéder au pouvoir, il est donc logique d’avoir une position de type gouvernemental qui prend en compte les engagements stratégiques du pays ». Quelle continuité de Jospin à Sarkozy ! Par contre, la parole n’est pas donnée aux communistes et aux Verts hostiles à l’engagement militaire de la France en Afghanistan, ni aux associations, comme l’ACCA (Agir contre le colonialisme aujourd’hui), l’AIJD (Association internationale des juristes démocrates) ou le collectif communiste polex qui ont obtenu des milliers de signatures pour le retrait des forces militaires françaises d’Afghanistan. « Le Monde » publie cependant cinq points de vue contradictoires sur la poursuite de l’engagement français ou le retrait des soldats français. Mais ces contributions donnent en définitive leur aval à la nouvelle stratégie de réconciliation avec les talibans dits modérés définie par les Etats-Unis et relayée par le président Karzaï à la conférence du 28 janvier à Londres. Comme s’il n’y avait pas d’autre solution !

Rares sont les médias qui, à l’instar de « l’Humanité », ont rendu compte de l’appel de plus de 200 associations afghanes, notamment féminines et laïques, qui a critiqué cette « réhabilitation des talibans » et proposé une solution démocratique au problème afghan. [1] Comme l’a souligné l’ex-députée afghane Malalai Joya dans une interview exclusive à « l’Humanité » le 20 février 2010 après avoir dénoncé l’ingérence des puissances étrangères : « Les gouvernements occidentaux ne veulent pas voir que des gens se battent pour reconstruire leur pays dans la paix et la sécurité, en respect des droits de chacun et de chacune. Des partis, des associations démocratiques luttent le plus souvent dans la clandestinité (...). Les manifestations étudiantes contre les plus récents bombardements, tout comme les protestations de centaines de femmes à Kaboul montrent au monde la voie vers une réelle démocratie en Afghanistan ».

Les forces progressistes occidentales doivent intensifier l’action (pétitions, manifestations) contre l’envoi de renforts et pour le retrait des troupes étrangères mais aussi pour soutenir le combat des associations féminines et laïques afghanes pour qu’elles puissent jouer un rôle véritable dans la reconstruction du pays après le départ des troupes étrangères.


[1Voir sur Rouge Midi Y a-t-il des taliban fréquentables ? .



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