Rencontre CGT CRIF : mais qu’est ce qu’ils allaient faire dans cette galère ?
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Succédant au PCF qui avait rencontré le CRIF le 9 octobre dernier, ce 28 janvier la direction de la CGT a cru bon d’aller à son tour rencontrer l’officine communautariste. Cette rencontre a donné lieu à deux communiqués contradictoire :
un en forme de cri de victoire du CRIF
un autre en forme de démenti partiel et de mise en demeure de rectification par Thierry Le Paon
Elle a aussi suscité de nombreuses réactions dans la CGT comme celle des énergéticiens de Paris que nous reproduisons dans le document joint et qui se termine avec juste raison par cette remarque : "notre syndicat, comme beaucoup de militants CGT, aurait voulu te voir répondre favorablement à l’invitation des Goodyear le 17 et non à celle du CRIF le 28". Les réactions sont d’autant plus vives que jusqu’à aujourd’hui la direction de la CGT n’a pas organisé de débat sur la nécessité ou non de s’engager dans le BDS contrairement à un nombre croissant de syndicats dans le monde. Imagine-t-on à son époque Krasucky aller rencontrer des tenants sud africains de l’apartheid ?
Ci-dessous, deux réactions à cette rencontre.
Réaction de Jean-Pierre Page à la rencontre CRIF-CGT
(extraits)
J’apprend avec stupéfaction que la direction de la CGT a rencontré officiellement le CRIF. A ma connaissance cela doit être la première fois (...)
On peut consulter le site du CRIF et y lire entre un hommage appuyé au criminel Ariel Sharon et un appel à agresser l’Iran, le compte rendu de cette reunion ! (...)
Le CRIF c’est la pointe avancée la plus réactionnaire du sionisme en France, un lobby qui du fait de son importance est particulièrement sollicité et de façon condescendante par toute la classe politique française sans exception. Celle-ci considère le CRIF comme un passage obligé. Le CRIF est affilié à la très sioniste World Jewish Organisation et est lié à l’AIPAC aux Etats Unis dont l’influence considérable sur la politique de Washinton n’est plus a démontrer, comme le soulige le livre remarquable "le lobby pro israélien et la politique étrangère américaine" ouvrage de reference de deux universitaires américains , juifs par ailleurs:John Mearsheimer et Stephen Walt , l’un Professeur à l’Université de Chicago, l’autre Professeur à la très prestigieuse Université d’Harvard !
Le CRIF joue le même rôle que l’AIPAC même si ses moyens ne sont pas les mêmes. Le CRIF et la CGT soulignant leur identité de vue est tout simplement consternant pour celle-ci, de surcroît au moment ou des militants de la CGT risquent d’être condamnés par la justice ! Enfin le CRIF s’invitant dans un débat interne de la CGT, ne semble poser aucun probleme à Thierry Le Paon ! Qu’en pensent les organisations et militants de la CGT ?
Cette réunion officielle de Le Paon avec le CRIF marque donc un tournant et une rupture . Par conséquent la manière dont la direction de la CGT se positionne négativement par rapport au mouvement BDS est si il le fallait une nouvelle confirmation et non pas un accident, c’est une orientation (...). Une orientation jamais débattue au sein de la CGT.
Le CRIF ce n’est pas la défense des intérêts de la communauté juive de France , c’est avant tout la défense du sionisme et d’Israël qui se déclare comme un état sioniste avec son racisme anti arabe, , son système d’apartheid vis à vis des Palestiniens, sa brutalité et les guerres contre ses voisins. Un pays qui dans la plus totale impunité se refuse et cela contre la quasi totalité de l’opinion internationale de respecter et appliquer les résolutions de l’ONU, la concernant. Cette rencontre est de mon point de vue très grave, elle est contraire aux orientations de toujours de la CGT et de son indépendance de jugement au plan international, à sa solidarité avec les peuples de cette région du monde.
Jean-Pierre Page
Ancien responsable du département international de la CGT et de la Commission exécutive Confédérale de la CGT.
Mais qu’est-ce qu’il est allé faire là ? A propos de la rencontre CGT-CRIF
« Qui dort avec un chien ne doit pas ne doit pas être surpris de se réveiller avec des poux » me disait ma grand-mère maternelle, femme pieuse et pleine de bon sens. C’est ce qu’elle dirait sans doute aussi aux dirigeants de la CGT qui viennent de rencontrer le CRIF, et se sont vu manipuler dans les grandes lignes. « Je suis très étonné de découvrir un compte-rendu à la fois partiel et erroné de la rencontre que nous avons eue… » écrit le secrétaire de la CGT, Thierry Lepaon au président du CRIF, qui poursuit en décrivant les méthodes peu civiles, voire manipulatrices, de l’organisation soi-disant représentative des Juifs de France. Manipuler, c’est bien le mot, mais une connaissance, même superficielle, des méthodes de cette institution aurait pu éviter la surprise qui semble être celle de la direction de la CGT.
Une question s’impose : pourquoi la CGT est-elle allée rencontrer le CRIF, alors que la direction de la centrale ne cesse de fustiger le « communautarisme », en particulier quand il s’agit des Musulmans de France ? Thiery Lepaon est-il allé rendre visite aux organisations musulmanes de France ? Et que doivent en penser les milliers de syndicalistes de culture ou de confession musulmanes ? Comment s’étonner alors que sur le net, on trouve depuis deux jours des appels à la constitution d’un syndicat musulman, ce qui serait une catastrophe pour le mouvement ouvrier français ? Alors, une fois de plus, pourquoi ?
L’ancien responsable du département international de la CGT, Jean-Pierre Page, accuse Thierry Lepaon de « se moquer du monde » en essayant de se justifier : « Pourquoi avec le CRIF ? Est-ce parce que la CGT aurait fait le choix de rejoindre la cohorte des conformistes qui semblent croire qu’il faut être bien avec le CRIF parce qu’il serait influent ? » Si tel était le cas, ce serait plus que préoccupant, car cela signifierait reprendre, involontairement j’en suis certain, la thèse antisémite selon laquelle « les Juifs (en occurrence le CRIF) contrôlent tout », et que pour faire avancer les choses il vaut mieux avoir le CRIF de son côté.
A la différence de Jean-Pierre Page, je pense que cette rencontre avec le CRIF – dans la foulée des pitreries antisémites de Dieudonné – est plutôt destinée à montrer que la CGT n’est pas antisémite. Indécent et faux calcul : indécent car la CGT, qui a été à la pointe de la lutte anti-fasciste, n’a pas à démontrer son anti-racisme, et certainement pas à Roger Cukierman, celui-la même qui après l’assassinat de Mohamad el-Dura, proposait à Ariel Sharon de « faire contre-feu », en lançant l’accusation infamante d’antisémitisme contre quiconque critiquerait la politique israélienne. Instrumentaliser l’antisémitisme et accuser d’antisémitisme des personnes de l’intégrité morale d’Edgar Morin, Stephane Hessel ou Daniel Mermet est une gifle aux millions de victimes de l’antisémitisme.
Faux calcul aussi, car quand on cède une fois à un maître chanteur, on sera obligé de continuer à payer sans fin, et, dans ce cas, à faire allégeance à l’Etat d’Israël et ses dirigeants sous peine d’être a nouveau accusé de ne pas être suffisamment net sur la question.
Le secrétaire général de la CGT a été sommé par le CRIF de s’expliquer sur le boycott d’Israël. Loin de saluer la campagne BDS, à laquelle participent de très nombreux militants syndicalistes, y compris la CGT, il s’est justifié en expliquant que la CGT était contre le BDS, mais s’opposait à la criminalisation de ceux qui appellent au boycott. C’est bien la moindre des choses, quand on sait que des militants CGT sont parmi les accusés… Son argument, rabâché par la direction confédérale depuis des années, selon lequel ce sont les travailleurs (Palestiniens et Israéliens) qui pâtissent du boycott a été celui de ceux qui, à gauche, s’opposaient au boycott de l’Afrique du Sud à l’époque de l’Apartheid, malgré l’appel en ce sens de l’ANC et des syndicats sud-africains.
Il ne fait pas de doute que des milliers de syndicalistes CGT et de structures syndicales vont exprimer leur indignation face à cette initiative de leur direction confédérale, et sur le BDS. Ce sera sans aucun doute la seule incidence positive de cette honteuse visite.
Michel Warschawski
cofondateur et président du Centre d’information alternative de Jérusalem
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