Europe sociale : les français n’y croient pas !
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Le message est clair et c’est même la principale indication du scrutin : les français ne croient pas que cette UE, cette alliance que les gouvernements de 27 pays d’Europe construisent dans leur dos et à marche forcée puisse leur être bénéfique.
C’est même un constat partagé avec l’ensemble des européens si l’on en juge par les taux de non vote qui parcourent les pays de l’alliance.
Ne nous y trompons pas, dans leur grande masse, celles et ceux qui ne se sont pas déplacés ne se sont pas abstenus, ils ont refusé de voter, de participer à ce jeu électoral. La France (comme les autres pays de l’alliance) n’a pas été prise d’un brusque accès de pêche à la ligne ou d’incivisme, mais un refus massif s’est exprimé.
Comme à chaque élection européenne, sauf…sauf le dernier référendum (70% de votants exactement comme pour le référendum sur le traité de Maastricht) où ils avaient là aussi clairement dit leur refus, refus dont il n’a pas été tenu compte et qui a été bafoué.
Sur les plateaux de télévision, l’un ou l’autre de ceux que les médias présentaient comme les vainqueurs du jour pouvait bien pérorer à partir de pourcentages trompeurs sur un soi disant succès, les résultats ne peuvent tromper personne.
L’UMP est bien sûr mal placée pour se glorifier d’un score obtenu dans tel un désert de votants. Un seul chiffre résume assez bien cela : avec près de 4,8 millions d’électeurs elle retrouve moins de la moitié de ses voix de 2007 qu’il s’agisse du premier tour de la présidentielle ou de celui des législatives.
Cohn-Bendit peut bien encore « se la jouer », avec l’immense modestie qu’on lui connait, « En France il y a un effet Cohn-Bendit depuis 50 ans » (sic !), la leçon de ce scrutin n’est pas dans le score circonstanciel d’une liste, score qui illustre le vote flottant d’électeurs hésitant au gré des élections entre PS, MODEM et Verts. Et ce n’est pas le fait que certains de ses leaders sont prêts à nous rejouer la fable de la grenouille et du bœuf qui nous fera dire le contraire.
Non la leçon est ailleurs.
Si on compare les chiffres de cette élection avec ceux du référendum un constat saute aux yeux : les partis du OUI (UMP, PS, Verts, MODEM), avec un peu moins de 12 millions de voix, retrouvent peu ou prou leur score de 2005.
A l’inverse les partis du NON, avec moins de 4 millions de voix retrouvent à peine un quart de leurs voix de 2005 (15 millions de votants) !
L’abstention est là !
Elle est dans cette partie du peuple qui, s’étant rassemblée pour refuser cette constitution européenne point d’appui d’une construction impérialiste qui se fait contre les peuples, n’a pas trouvé dans la campagne électorale d’offre politique répondant à ses attentes. Et cela est particulièrement vrai pour celles et ceux qui souffrent le plus des choix politiques de l’UE. A Marseille et dans sa région (comme sans doute dans nombre d’endroits de France), dans les cités populaires, le refus de vote dépasse allègrement les 60% et atteint couramment les 70, voire 80% !
Ne pas entendre cela, ne pas se laisser interroger par cela c’est courir le risque de voir grandir les replis nationalistes et xénophobes, replis sensibles dans nombre de pays européens lors de ce scrutin.
Dans une soirée électorale digne de ce nom cette question du refus de vote aurait du être au centre de tous les débats. Sur France 2 il n’y a guère eu que Mélenchon pour ne pas se satisfaire de la progression en pourcentage de sa formation et dire que les résultats ne sont pas bons, que « la gauche est dans le trou ».
La question de la désunion de la gauche du NON a bien sûr pesé sur la participation au vote, et de ce point de vue le Front de Gauche a certainement bénéficié d’une prime à la position unitaire, mais elle n’explique pas tout. Une gauche clamant haut et fort le slogan « tous unis pour l’Europe sociale » aurait sans doute bénéficié d’un vote exprimant la volonté de résistance face à la politique de casse, mais cela n’aurait pas rendu la perspective politique européenne crédible pour autant.
Comment peut-on avoir dans un même pays 80% des habitants qui soutiennent un mouvement de protestation sociale qui depuis janvier porte en lui l’exigence d’un changement de société, une participation record aux manifestations exprimant cette exigence et une telle désaffection des urnes ? Voilà une question qui mériterait débat !
Comment un peuple peut il croire à l’efficacité de son vote s’il voit depuis Maastricht tous les dénis de démocratie qui sont faits au nom de l’UE ? Comment ne pas entendre les questions sur l’emploi, les rapports Nord Sud, la souveraineté populaire, le carcan des traités européens ?
Comment être crédible sur l’Europe sociale quand on sait qu’une politique réellement progressiste en France se heurterait à la banque centrale européenne, aux directives qui s’opposent à toute nationalisation, à celles qui organisent la casse des services publics ?
Il reste pour ce qui nous concerne à faire grandir et à crédibiliser, en particulier au plan économique et social, l’idée d’une sortie de cette alliance au profit d’autres coopérations internationales mutuellement avantageuses. Les réactions à nos tracts nous y encouragent.
Celles et ceux qui ont voté pour ce qu’ils ont estimé être dans la lignée de leur NON de 2005, mais aussi celles et ceux qui ont refusé de choisir parmi les listes en présence nous y engagent.
Ce rassemblement là sera lui, porteur de perspectives.
En attendant les champions de la méthode Coué feraient peut être bien de méditer sur ce vieux proverbe touareg – ce qui au passage prouve que l’homme africain ne nous a pas attendu pour entrer dans l’histoire, « Ce que tu fais pour l’autre, si tu le fais sans lui, tu le fais contre lui » ;
Aucune alliance internationale ne se fera sans les peuples, c’est cela la leçon du scrutin.
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